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Manganèse

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Caractéristiques du manganèse

  • Symbole : Mn
  • Masse atomique : 54,938 044 ± 0,000 003 u
  • Numéro CAS : 7439-96-5
  • Configuration électronique : [Ar] 3d5 4s2
  • Numéro atomique : 25
  • Groupe : 7
  • Bloc : Bloc d
  • Famille d’éléments : Métal de transition
  • Électronégativité : 1,55
  • Point de fusion : 1 246 °C

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Produits relatifs au manganèse :

Le manganèse, élément atomique n°25 de symbole Mn : ses généralités, son histoire, ses isotopes, ses propriétés, ses utilisations, sa toxicologie et sa production.

Proche parent du fer en raison de son aspect, le manganèse est un élément présent dans un certain nombre d’alliages. L’Afrique du Sud détient environ 80 % de la réserve mondiale en manganèse. Il s’agit du quatrième métal le plus utilisé dans le monde après le fer, l’aluminium et le cuivre. Il joue un rôle crucial dans la fabrication d’acier au carbone. Cet élément chimique a des applications dans les secteurs de l’automobile et de la construction. Il entre dans la composition des piles, des batteries de véhicules électriques, des céramiques et des circuits électroniques. On l’emploie aussi dans l’agroalimentaire.

Généralités sur le manganèse

Le manganèse est un élément chimique du groupe VII. Son numéro atomique est le 25 et son symbole est Mn. Son corps simple se présente sous forme de métal de transition. Il est situé au milieu de la première série de métaux que l’on qualifie « de transition ». Les chimistes considèrent les éléments suivants comme appartenant à ce groupe : le technétium, le rhénium et, accessoirement, le bohrium (un transactinide synthétique radioactif). L’atome de manganèse est caractérisé par une structure électronique [Ar] 4s2 3d5. Il dispose en tout de 7 états d’oxydation. Les états II et III sont les plus courants dans la nature. L’état +3, par contre, n’est stable qu’en formant des complexes.

La valeur d’électronégativité de Pauling du manganèse est de 1,55. Il est donc l’un des éléments les plus électropositifs et les plus abondants du 7ᵉ groupe secondaire. Sa réactivité est plus importante que celle du rhénium. À titre de comparaison, le chrome et le fer, dans leurs groupes respectifs (6ᵉ et 7ᵉ), sont plus réactifs par rapport au tungstène et à l’osmium. Le technétium, étant un élément synthétisé par l’être humain, on ne le retrouve pas dans sa forme naturelle. Par ailleurs, le corps simple métal du manganèse n’a pas de propriétés magnétiques, contrairement au corps composé sulfate de manganèse. On reconnaît ce dernier à sa forme poudreuse de couleur blanche résultant de l’accumulation de cristaux incolores.

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Histoire du manganèse

Des chimistes et minéralogistes suédois ont découvert le manganèse dans la magnésie noire, « magnesia nigra » en latin. On parle ici du dioxyde de manganèse ou pyrolusite, un minéral naturel de formule chimique MnO2. On retrace l’utilisation de ce minéral à l’antiquité. Son nom provient de la cité lydienne de Magnésie du Sipyle (Mont Sipylos). À cette époque, il faisait déjà l’objet de commerce par les habitants de cette ville.

Le chimiste suédois, Torbern Olof Bergman, soupçonne la présence d’un nouvel élément dans la magnésie noire. Il entreprend alors d’analyser ce minéral. Son étudiant, Carl Wilhelm Scheele, est le premier à considérer le manganèse comme un élément chimique à part. Ce chimiste est arrivé à cette conclusion en utilisant la magnésie noire pour produire des gaz oxydants : l’oxygène en 1773 et le chlore en 1774. Le gaz oxygène a été nommé comme tel par Antoine Laurent Lavoisier plus tard.

Le chimiste, Johan Gottlieb Gahn, préparateur et collègue de Carl Wilhelm Scheele, a pu isoler le corps simple du manganèse sous forme de métal pur en 1774. Pour ce faire, il a réduit du dioxyde de manganèse avec du carbone dans un creuset. Martin Heinrich Klaproth a reproduit la préparation en 1808. Il baptise en latin le corps simple qu’il a obtenu et le nomme « magnesium ». En allemand, il a choisi l’appellation « das magnesium ». Humphry Davy l’avait appelé « magnium ». Guyton de Morveau, un chimiste français, donne finalement l’appellation « manganèse » en 1785 dans sa nomenclature des éléments en s’inspirant des travaux de Lavoisier.

Pyrolusite

Ce minéral, essentiellement constitué de dioxyde de manganèse (MnO2), est souvent associé à la magnétite ou à l’oxyde de fer. La pyrolusite possède des propriétés magnétiques. Les mots gréco-latins « magnes », « magnetis », « magnetem » et « magnes lapis » font référence à l’aimant. Ce dernier est aussi appelé « pierre de magnésie » ou « pierre d’aimant » pour caractériser par sa puissance et sa force. Le terme « magnes(ia) » est un qualificatif qui  désigner la magnesia nigra. Ce pigment minéral noir s’intègre autant naturellement qu’artificiellement aux argiles et aux ocres.

L’utilisation de cette substance colorante remonte à la préhistoire. On en a retrouvé des traces dans des peintures vieilles de 17 000 ans. Les Romains et les Égyptiens employaient des dérivés du manganèse pour fabriquer du verre. Ils s’en servaient pour les colorer ou les décolorer. La magnésie noire était et continue à être manipulée pour blanchir le verre. En effet, les ions ferreux entraînent l’apparition d’une coloration verdâtre sur les coulées de verre.

D’ailleurs, la signification de « pyrolusie » en grec fait penser au savoir-faire des vitriers. Cette appellation peut se traduire par « ce qui se dissout et qui agit par le feu ». Effectivement, l’oxydation d’ions ferreux Fe2+ en ions ferriques Fe3+ fait intervenir le dioxyde de manganèse. En fonction de la concentration de pyrolusite, le verre peut devenir incolore ou brun.

Le fer et le manganèse

Du manganèse a été trouvé dans les minerais de fer par les Spartiates et les Lacédémoniens. L’acier spartiate est reconnu pour sa dureté. Elle résulterait d’un alliage de fer et de manganèse. La magnésie noire a été utilisée depuis l’Antiquité comme fondant actif. Elle a été largement exploitée par les hommes de l’art alors qu’ils n’avaient pas une connaissance poussée des corps minéraux. Différents composés ferromanganèses ont ainsi été créés pour fabriquer des lames de fer à couche d’acier. La réduction au charbon de bois d’oxyde de manganèse et de minerai de fer, suivi d’une coulée de cuivre, a permis de façonner du bronze.

Les usages du manganèse à travers l’histoire

Des textes arabes du XIe siècle font état de l’ajout de magnesia nigra dans les creusets servant à la production d’aciers fondus. Cette opération avait pour but d’augmenter la résistance de ces derniers. Elle a donné naissance à l’acier de Damas.

Le permanganate, correspondant au degré d’oxydation le plus élevé du manganèse, a été découvert par le chimiste allemand Johann Rudolf Glauber au XVIIe siècle. Le dioxyde de manganèse a servi dans la fabrication du chlore dans la première moitié du XVIIIe siècle.

Le manganèse servait d’oxydant commun dans les laboratoires au XIXe siècle. À une échelle industrielle, il permettait de générer du gaz oxygène et du chlore et des décolorants. Il en est de même pour l’eau de Javel, l’eau de Labarraque ou le chlorure de calcium avant le développement du procédé Solvay.

Au début du XIXe siècle, des scientifiques ont étudié la possibilité d’intégrer le manganèse dans la fabrication de l’acier. Leurs essais ont été concluants et ont abouti à l’obtention de brevets. En 1816, on a constaté que la combinaison manganèse-fer rendait l’acier plus dur sans devenir plus cassant. L’utilisation du manganèse dans la métallurgie a été lancée en 1858 avec le procédé Bessemer. On doit à l’industriel et métallurgiste anglais, Robert Forester Mushet, la mise au point des techniques développées dans ce premier processus de fabrication de l’acier.

Le soufre contenu dans les mauvais minerais de fer est bloqué par le manganèse. En effet, la présence de sulfure de fer, même en petite quantité, rend l’acier cassant. Cet élément réagit pareillement avec le gaz oxygène lors des procédés de coulage moderne. La formation de dioxyde de manganèse pendant ces coulées évite l’apparition de poches d’air (boursouflures au refroidissement des coulées). La fonte spéculaire de la technique Bessemer a permis la création d’alliages de fer, de manganèse et de carbone. Ils sont appelés Spiegeleisen (« fer à miroir » ou « miroir/fer ») en allemand à cause de leur cassure miroitante. En langage technique internationale, on utilise le terme « spiegel ».

Le manganèse durant la Belle Époque

L’acier au manganèse, particulièrement dur et résistant à l’abrasion, est exploité dans la conception de chemins de fer. Les hélices de navire de l’époque sont pour la plupart construites avec des alliages de ferromanganèse et de cuivre. On assiste alors au développement des bronzes au manganèse, selon le même principe et pour des applications similaires.

Le chimiste naturaliste Hikorokuro Yoshida et le chimiste français Gabriel Bertrand ont observé l’effet du manganèse à faible dose au niveau de l’arbre à laque. Ils ont remarqué son rôle d’engrais catalytique, favorisant ainsi l’assimilation des éléments fertilisants par les plantes cultivées. Le chimiste français est par ailleurs à l’origine de la notion d’oligo-éléments. Il a ouvert la voie aux cultures intensives ainsi qu’à l’agrochimie.

Le dioxyde de manganèse est employé comme dépolarisant pour entourer la cathode d’une pile sèche. Pour les piles alcalines, la cathode est à base d’un mélange de poudre de carbone et de dioxyde de manganèse. On le retrouve aussi dans les batteries et piles au lithium créées à la fin du XXe siècle.

Lexique autour du manganèse

Jöns Jacob Berzelius est à l’origine de l’adjectif manganeux. Il l’a cité dans son ouvrage de chimie en 1831. Ce terme sert à qualifier à la fois :

  • le monoxyde de manganèse MnO ;
  • le chlorure de manganèse MnCI;
  • le sulfate de manganèse MnSO4 et l’ensemble des composés de Mn(II).

Les adjectifs « manganésifère » et « manganique » ainsi que le mot « manganate » n’ont été acceptés par l’Académie française qu’en 1840. Cependant, des nuances sont à faire sur ces appellations. « Manganésifère » désigne les corps chimiques qui contiennent du manganèse. L’appellation « manganique » regroupe les composés Mn de valence VI. Le terme « manganate » fait référence à l’anhydride manganique MnO3 ainsi qu’aux sels de l’acide correspondant tels que le trisulfate de manganèse Mn(SO4)3

En revanche, les adjectifs « manganésé » et « manganésien » sont cités dans le dictionnaire Larousse. En effet, ils ont été très utilisés dans les laboratoires avant 1870. Les mots « manganine » et « manganite » ont fait leur entrée dans ce même dictionnaire en 1873. Ils sont suivis par le mot « permanganite » et son adjectif « permanganate » durant l’année 1874. Le terme « manganite » désigne également les oxydes doubles de MnO2, le sesquioxyde métallique et les sels dérivés de MnO2.

En 1922, le mot « manganine » devient « manganin » , sans pour autant changer de sens. On parle alors de l’alliage résultant de la combinaison de 13 à 15 % de manganèse, de 82 à 83 % de cuivre et de nickel pour le reste. Ce matériau métallique est souvent présenté sous la forme d’un fil de manganin inséré dans les bobinages et les résistances électriques.

L’anhydride permanganique Mn2O7, en présence d’un oxydant fort de type nitrate ou chlorate oxydant, entre en réaction avec l’alcali pour former du permanganate de base. Le permanganate de potassium est un agent oxydant à haute énergie qui a été manipulé dans les laboratoires dès 1874. On s’en sert pour réaliser l’analyse volumétrique des eaux contaminées. En médecine, on l’emploie comme désinfectant puissant pour le lavage des mains et des plaies, entre autres. Pour traiter les MST, en particulier la gonorrhée, on fait appel à des antiseptiques spécifiques. Par ailleurs, l’industrie remplace parfois les manganates basiques par des permanganates. Ils sont connus pour être de puissants agents de blanchiment de matières organiques, notamment dans le traitement des éponges et pulpes végétales. Le permanganate de potassium et de calcium est, entre autres, employé dans la désinfection de l’eau.

Les préfixes « manganoso- »  ou « mangano- » indiquent, respectivement en chimie minérale et en chimie organique, la présence de manganèse dans un composé chimique. On peut citer la saponite de manganèse, au même titre que les substances suivantes :

  • calcite de manganèse ou carbonate de manganèse à teneur variable en anions ;
  • minerai de manganèse ou antimoniate de fer et de manganèse ;
  • tungstène de manganèse ou tungstate de manganèse naturel ;
  • silicate de manganèse naturel ;
  • saponite de manganèse à teneur variable en anions.
  • Calcium, composés de manganèse d’ammonium ou sels de manganèse,
  • oxydes et ammoniaque, etc.

En outre, certaines appellations ont été retenues pour des raisons phonétiques :

  • manganagraphite pour désigner le silicate naturel hydraté de manganèse ;
  • manganapatite ou phosphate naturel de chaux manganésifère (environ 6 %) ;
  • manganamphibole (rhodochrosite à haute teneur en manganèse).
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Les isotopes du manganèse

Le manganèse dispose de 26 isotopes artificiels dont la masse varie de 44 à 69. Il possède 7 isomères nucléaires. Un seul de ces isotopes est stable : le 55Mn. On ne retrouve le manganèse naturel que dans cet état, faisant de lui un élément monoisotopique et mononucléaire. Par conséquent, sa masse atomique standard correspond à la masse isotopique de 55Mn : 54,938 045(5) u.

Les occurrences du manganèse, son extraction minière et sa purification

Après le fer et le titane, le manganèse est le troisième métal de transition le plus abondant dans la croûte terrestre. Elle renferme entre 850 à 1 000 g/t de clarke. Les estimations sont significativement plus élevées dans le granite, soit entre 1 500 à 1 600 g/t, contre 400 et 500 g/t dans les roches magmatiques basiques. On parle donc d’un élément moyennement abondant.

Le manganèse est retrouvé dans les « nodules polymétalliques » qui se déposent sur le fond marin. Il prend alors la forme de composés de manganèse hydraté associés à des particules de quartz, d’argile et de feldspath. Les nodules les plus importants économiquement disposent d’une granulométrie de l’ordre de 8 cm de diamètre. En moyenne, ils renferment des composés de Mn à hauteur de 30 % de leur masse. Ils contiennent de l’eau en proportion équivalente ou supérieure en masse. De même, ils sont constitués de fer, de nickel, de cobalt, de cuivre, de zinc, de molybdène, de titane et de cérium (de 1,5 % à 50 %, mais généralement, en quantité plus faible).

Certaines zones d’eaux profondes de l’océan Pacifique abriteraient environ 120 000 kg/km² de manganèse. Les réserves combinées de minerai de manganèse pourraient dépasser 30 milliards de tonnes. Toutefois, l’exploitation minière est délicate en raison de la taille et de la profondeur des grains des sédiments à l’échelle centimétrique. Les conséquences des extractions de cet élément sur la biodiversité des fonds marins sont inévitables. Les nodules d’oxydes métalliques, constitués en grande partie de Fe et de Mn, se sont formés après l’érosion des gisements primaires de silicate de manganèse. Ils émanent également d’acier corrodé de navires ou d’installations anthropiques.

Le manganèse est présent dans de nombreux oxydes et dans plusieurs silicates, en substitution aux ions ferreux. Il se transforme facilement en solution, pour être par la suite précipité. Il est alors trouvé à forte concentration dans des roches chimiquement sédimentaires. Tel est le cas des minerais oolithiques à gangues calcaires, des minerais à gangues siliceuses ou dolomitiques, ou des nodules polymétalliques.

Les minéraux communs qui renferment du manganèse sont :

  • pyrolusite MnO2 quadratique ;
  • rhodochrosite MnCO3 ou « manganspath » ou « diallogite » (pour les anciens chimistes et minéralogistes) ;
  • rhodonite CaMn4(Si5O15) ;
  • braunite Mn7SiO12 ;
  • manganite MnO(OH) monoclinique en aiguilles avec des macles noires à brunes ;
  • hausmannite Mn3O4 des roches sédimentaires oolithiques et des filons hydrothermaux.

L’hausmannite et la braunite sont abondantes dans certains sols. Le sulfure de manganèse cubique MnS est représenté par l’alabandite, un minéral rare autrefois appelé alabandine.

Les grands gisements d’oxydes de manganèse non cristallins sont nombreux. La pyrolusite accompagne parfois ces oxydes. On parle génériquement de « wad ».

Par ailleurs, une équipe géologique russe a mis en exergue le manganèse natif à l’échelle micrométrique en 2001. Cependant, l’étude, assez délicate en raison de la rareté des échantillons, n’a pas été approuvée par l’association internationale de minéralogie.

On retrouve souvent les minéraux de manganèse dans les minéraux de fer. De temps en temps, ils sont associés aux roches qui contiennent une quantité importante de chrome ou de fer. Ces minéraux prennent la forme de composés chimiques de manganèse.

L’eau ferrugineuse peut, de manière exceptionnelle, avoir une grande concentration d’anions manganèse, allant jusqu’à 0,5 g/l.

Les minerais qui contiennent de l’oxyde de manganèse les plus courants sont :

  • la pyrolusite MnO2 ;
  • l’ancienne psilomélane [(Ba,H2O)2Mn5O10] ;
  • la coronadite ou le groupe des cryptomélanes ;
  • les oxyhydroxydes produits d’altération ou hydroxydes (mélanges de vernadite et de birnessite) ;
  • les carbonates comme la rhodochrosite (MnCO3).

Les gisements stratiformes syngénétiques, sédimentaires ou hydrothermaux-sédimentaires, surtout ceux en milieu détritique et carbonaté, sont les principales sources de ces minerais. On compte également les gisements volcano-sédimentaires. Ils sont la conséquence d’une précipitation chimique en milieu aqueux  des oxydes de manganèse, lorsque les conditions physico-chimiques sont favorables.

En France, au XIXe siècle, le terme générique « manganèse » désignait de nombreux minéraux. Ce nom renvoyait aux hydroxydes, oxyhydroxydes, oxydes et aux silicates de manganèse se trouvant en inclusion dans des roches. Les mines de Périgueux et de Saint-Martin en Dordogne, qui étaient exploitées sous l’ancien régime, appelaient le manganèse « pierre de Périgueux ». Sous le régime consulaire et impérial, les divisions minéralogiques comptaient les départements suivants parmi les producteurs de ces minerais :

  • la Saône-et-Loire, qui compte une mine reconnue se trouvant à Romanèche, près de Mâcon ;
  • la Loire ;
  • le Bas-Rhin à Dambach ;
  • la Sarre, dans la mine de Kreslenich du canton de Wadern ;
  • le Gard, dans la mine de Cévenole de Saint-Jean de Gardonnenque ;
  • le Périgord.

Une relance des investigations minières a été faite durant la période de la Restauration. L’exploitation du manganèse a été de nouveau reprise :

  • de 1817 à Saint-Martin-de-Fressengeas ;
  • de 1833 à 1841 à Milhac-de-Nontron ;
  • entre 1840 à 1912 à Saint-Pardoux-la-Rivière.

De 1823 à 1949, la France n’a produit que 0,875 Mt de minerai, dont la teneur en Mn était inférieure à 50 %. Cette période correspond à la fermeture de la production en Saône-et-Loire et à Saint-Prix. De plus, la majorité de ces gîtes étaient isolés et assez petits. En revanche, ceux localisés dans le sud étaient exploitables et rentables. On parle surtout des mines des Pyrénées, des Corbières, de la montagne Noire ainsi que ceux des côtés nord-nord-est du Massif central. On y a extrait 2 000 à 28 000 tonnes de minerai au XIXe siècle et au XXe siècle.

Le deuxième producteur français de manganèse s’est implanté dans le district de Las Cabesses, en Ariège. Ses extractions sont estimées à 0,195 Mt de 1890 à 1946. À Chaillac, dans l’Indre, on extrait des minéraux lenticulaires à faible teneur en manganèse. Elles sont incrustées entre les couches mésozoïques de grès et d’argiles du Permo-Trias et du Lias basal.

Ce type de minerai est rarement disponible en gros filons. On en trouve néanmoins dans les mines de Romanèche en Saône-et-Loire. Elles sont gérées par le premier producteur français de manganèse. Sa production était de 0,435 Mt de 1823 à 1919. À la fin du XXe siècle, la majorité du minerai extrait servait dans la fabrication de ferroalliages de ferromanganèse carburé ou affiné. Il était utilisé pour préparer du silicomanganèse constitué de Mn à hauteur de 65 à 68 %.

Les propriétés physiques et chimiques du corps simple métal de manganèse, ses préparations et alliages

Le manganèse Mn est un métal solide, gris-blanchâtre ou grisâtre. Sa couleur gris clair et sa brillance s’apparentent à celles du fer. Les atomes de rayon sphérique proche de 1,4 Å forment un cristal avec une structure centrale en réseau cubique et un paramètre de maille de 6,28 Å. Sa densité est de 7,2 à 7,44 (pur), avec une dureté comprise entre 5 à 6 ½ sur l’échelle de Mohs. Il est fragile et particulièrement cassant. Ce corps métallique possède quatre formes allotropiques. Le plus courant de ces variétés cubiques est le Mnα, dont la densité est de 7,44. Il est stable à 742 °C. Il se transforme en Mnβ par aluminothermie. Sa densité diminue alors jusqu’à 7,29. Cette forme classique se métamorphose ensuite en Mnγ à 742 °C et en Mnδ à 1 160 °C. Ces modifications de la structure cristallochimique du manganèse sont réversibles. Après électrolyse, les dépôts de métal sont composés de Mnγ avec une densité minimale de 7,18. Ce dernier se change rapidement en Mnα au repos et à température ambiante.

Variétés allotropiquesMnαMnβMnγMnδ
Structure cristalline
Système cristallincubiquecubiquecubiquecubique
Nombre de coordination16+16+13+1214+12128
Groupe d’espaceI43mP4132Fm3mIm3m
Paramètre de maille a (pm)891,1631,5386,3308,1
Nombre d’atomes par maille élémentaire582042
Masse volumique calculée (g/cm3 théorique)7,4637,246,336,238

Dans une atmosphère inerte, le manganèse se liquéfie moins par rapport au fer. Il fond sans effort à environ 1 246 °C. Son point d’ébullition est d’approximativement 2 061 °C. Son oxydation est très lente à température ambiante. Cependant, chauffé à l’air, il s’oxyde facilement et brûle. Sa combustion produit du tétraoxyde de manganèse Mn3O4. La poudre fine de manganèse s’enflamme de manière spontanée au contact de l’air et à température ambiante. En s’oxydant dans l’air en grande quantité, il donne du dioxyde de manganèse MnO2.

Le manganèse est antiferromagnétique et ne devient ferromagnétique qu’après un traitement spécial. Le premier potentiel d’ionisation est de 7,434 V. Les métaux ainsi que leurs ions les plus courants sont paramagnétiques. La conductivité électrique de ce métal de transition est de 4% IACS. Cette valeur a été établie par rapport à la conductivité du cuivre pur.

Il est facilement corrodé par les acides dilués, même par l’acide acétique. Dans ce sens, des cations divalents Mn2+ sont libérés par le métal selon la réaction d’équilibre électrochimique réversible suivante :

Mn2+ + 2 e− == Mn0 manganèse métal ε0 = −1,18 V

L’attaque à l’acide nitrique concentré libère une quantité équivalente de cations tétravalents ou MnO2. Le manganèse se dissout alors dans l’acide, libérant de l’hydrogène gazeux. Il a la capacité de réduire les acides oxydants, notamment l’acide sulfurique en acide sulfureux.

Le corps simple métallique du manganèse peut décomposer l’eau à froid. Ce procédé libère de l’hydrogène gazeux. Il dissocie l’eau en hydrogène et en oxygène à 100 °C. Dans des conditions difficiles à contrôler, la poudre de manganèse finement divisée catalyse la décomposition de l’eau oxygénée ou du peroxyde d’hydrogène en solution aqueuse. Cette poudre résulte de la formation de dioxyde de manganèse primaire en surface.

Le corps pur du manganèse ne possède pas de couche d’oxydes. Il entre en réaction avec la majorité des corps métalloïdes. Il est à noter qu’à température normale, sa réactivité est faible. En revanche, elle augmente par chauffage et devient plus facile à mesure que la température augmente. On peut le combiner aisément avec l’oxygène, l’antimoine et le soufre, les corps allogènes. On a recours au manganèse pour éliminer les imperfections dans certains processus de métallurgie du fer pour cette raison.

Le manganèse entre en réaction avec l’azote à 1 200 °C, puis laisse du nitrure de manganèse Mn5N3.

Préparation et production du corps simple de manganèse

Le carbone et le charbon permettent de réduire les divers oxydes de manganèse dans un four électrique. Néanmoins, le corps simple de cet élément chimique renferme beaucoup d’impuretés composées de carbone. Pour produire du manganèse pur, on peut recourir à l’aluminothermie. Louis Troost a décrit cette technique ancienne faisant intervenir la poudre d’aluminium dans son cours de chimie. Ainsi, l’oxydoréduction exothermique de MnO2 par l’aluminium en l’absence de Mn3O4 permet d’obtenir du manganèse métallique pur.

3 MnO2 solide + 4 Al poudre métallique → 3 Mn manganèse β + 2 Al2O3 alumine

Δ H = −1 791 kJ/mol

Le chlorure de manganèse MnCl2 peut être réduit par le sodium métallique. En utilisant du charbon actif, il est possible de réduire le carbonate de manganèse. On le chauffe alors au rouge blanc dans un creuset à chaux (entouré de chaux vive) ou dans un creuset réfractaire.

La préparation industrielle du manganèse métal est possible avec une solution de sulfate de manganèse(II) et d’acide sulfurique bimolaire. Pour ce faire, on y applique une tension de 4,5 V et une densité de courant d’environ 35 000 ampères. Outre le MnSO4, une autre technique consiste à réaliser une électrolyse de MnCl2. Le raffinage du manganèse métal a été propulsé par les utilisations chimiques ou électriques qui nécessitent une plus grande pureté. La production des métaux purs a longtemps été insignifiante, de l’ordre de quelques %. Cette comparaison a été faite par rapport à la majorité de la production de ferromanganèse dans l’industrie sidérurgique. Ils contenaient entre 30 à 80 % de manganèse. Leur fabrication se faisait dans de hauts fourneaux remplis de coke et de minerai mixte de fer-manganèse. Contrairement à ces derniers composés intermédiaires, les spiegels ne disposent que d’une teneur en Mn inférieure à 30 % en masse. Ils sont obtenus par réduction du minerai de manganèse par du carbone.

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Les alliages à base de manganèse

Le manganèse est généralement combiné avec le fer (symbole chimique Fe). Cet alliage rend l’acier plus dur et lui confère des propriétés mécaniques particulières. Noté « M » par convention en ancienne sidérurgie, le manganèse peut être introduit dans de l’acier par ferroalliage. Il se décline ainsi en silicomanganèse, en ferromanganèse, etc. On l’assimile souvent à un métal additionnel. Dans ce cas, il augmente les propriétés mécaniques et chimiques de l’acier et de la fonte, entre autres. Pour ce qui est des aciers modernes à faible proportion en Mn (2 %), ils sont simples à travailler à haute température. Les alliages hautes performances renferment au moins une teneur en manganèse allant de 8 à 15 %. Cela optimise la dureté du matériau, sa force de traction et sa résistance aux chocs. À titre illustratif, l’acier de Robert Hadfield a une teneur en Mn variant de 12 à 13 %. Ce type d’acier se durcit sous l’effet de coups répétés. Il résiste efficacement à l’usure.

Parmi les alliages manganèse-fer, on peut citer la fonte mangané et ceux avec du silicium (Si) et/ou du chrome (Cr). Ces derniers sont caractérisés par leurs propriétés superélastiques. Les combinaisons telles que le Ni0,52, le Mn0,24 et le Ga0,24 ont une mémoire de forme ferromagnétique.

Dans le but de maintenir un alliage indéformable, on associe le manganèse avec le chrome et le tungstène (W). Ce type d’acier spécial entre dans la fabrication des outillages, des rails d’aiguillage, des plaques de blindage, des socs de charrue et des casques lourds de protection. On compte également les aciers de cémentation au chrome et au bore (B). D’autres associations ont été utilisées pour créer les types d’aciers suivants :

  • acier austénitique au Cr, Mn et Ni ;
  • acier spécifique au Mn, Ni molybdène (Mo) ;
  • acier spécifique au Cr, Mn Si.

Les aciers aux Mn (Ni) résistent au fluage. Les aciers aux Mn Cr (Ni) sont amagnétiques.

Le manganèse se retrouve aussi dans les cuproalliages ou les bronzes. Il est fréquemment présent dans les alliages de métaux non ferreux d’étain (Sn), d’aluminium (Al), de cuivre (Cu) et de zinc (Zn) à fonction industrielle. Autrefois très exploité dans l’industrie navale, le laiton au manganèse, qui résiste à l’eau de mer, en est un parfait exemple.

L’alliage manganine, contenant du Cu à 84 %, du Mn à 12 % et du Ni à 4 %, possède une résistivité basse de 0,45 x 10-6 Ω. Lorsqu’il est soumis à de hautes pressions, il montre une variation linéaire. Le fait d’introduire du Mn offre la possibilité de concevoir des résistances électriques standards ou calibrées. Ce procédé permet de fabriquer des thermocouples électriques et des éléments magnétiques. De ce fait, les manomètres garantissent une grande précision de mesures de pression à hauteur de 30 x 106 hPa, même à haute température.

Pour l’alliage constantan à base de cuivre (55 %), de nickel (44 %) et de manganèse (1 %), la résistivité est quasiment stable. Sa valeur est de 50 x 10-8 Ω m à 20 °C.

En outre, la création d’alliages d’aluminium à rigidité renforcée est possible avec l’utilisation du manganèse. On peut citer en exemple les canettes pour boissons. Ces alliages qui résistent parfaitement à la rupture sont très utilisés dans l’industrie automobile.

Les alliages de titane et de manganèse sont employés pour réaliser des moulages d’acier. Ceux au Mn et au Ni restent intéressants en raison de leur malléabilité. Ceux avec du cobalt, du silicium, du zinc, du bismuth et de l’étain résistent plus à la corrosion et ont de meilleures performances mécaniques. Ils sont réputés pour leur légèreté.

Chimie, corps composés/complexes et techniques d’analyse du manganèse.

Tous les états métalliques oscillant entre +1 et +7 s’observent avec -1 et -3, outre celui de zéro. Les états d’oxydations communs du manganèse sont de +2, +3, +4, +6 et +7.

En général, les composés du manganèse sont colorés. À partir des états d’oxydation 2 à 7, on a :

  • le dichlorure de manganèse MnIICl2 rose ;
  • le dioxyde précipité MnIVO2 brun ;
  • le trifluorure MnIIIF3 rouge ;
  • l’ion manganite MnVO43- bleu ;
  • l’ion manganate MnVIO42- vert ;
  • l’ion permanganate MnVIIO4 violet.

La solubilité des oxydes des éléments Mn, Cr et Fe est plus ou moins identique, notamment chez ceux à degré d’oxydation bas. Il n’est donc pas rare que l’on retrouve souvent au même endroit les éléments manganèse et fer. Les possibles oxanions de manganèse sont plus oxydants et acides en raison de leur état d’oxydation élevé. Comme leur propriété oxydante augmente en milieu acide, en même temps que leurs degrés d’oxydation, leur production est plus facile dans un environnement basique.

Chimie de base du manganèse

Le corps simple métal Mn représente l’état de valence 0. Il en est de même pour les composés carbonylés et/ou complexes de coordination tels que le K6[Mn(CN)6] • 2 NH3,particulièrement réducteurs et instables.

Plus rare, le cation monovalent Mn+ ne se retrouve que sous forme de complexe à l’état solide stabilisé. Le cation Mn2+, en revanche, est peu acide. Il est difficile à oxyder en solution aqueuse. Il est dépourvu de caractéristiques réductrices. Sa couleur rose très pâle est souvent confondue avec le Mg2+ dans les systèmes biologiques. L’action des alcalis produit un précipité d’hydroxyde de manganèse. Tel est le cas de l’hydroxyde ou carbonate de potassium en solution aqueuse. On y récupère de l’oxyde de manganèse par calcination douce ou par l’action de l’air.

Dans les liqueurs neutres, l’action des sulfures alcalins comme le Na2S ou K2S conduit à la formation de précipités de sulfures blanc rosé. Obtenus par chauffage, les sels manganeux anhydres sont d’ordinaire blancs. Les sels hydratés avec de l’eau de cristallisation arborent une teinte rose. Cette analogie est généralement sans équivoque avec des ions divalents Fe2+, Co2+, Ni2+, Cu2+ et Zn2+. On parle d’anions complexes tels que :

  • le phosphate MnPO42− ;
  • l’oxalate Mn(C2O4)22− ;
  • le tartrate Mn(C4H2O6)22− ;
  • l’EDTA Mn(EDTA)22− ;
  • le cyanure Mn(CN)3 ou Mn(CN)64−.

Les complexes de Mn2+ servent de base pour former des complexes de Mn(I) et Mn(III). Le premier résulte de la réduction par le zinc et le second, par oxydation à l’air. En outre, le cation Mn3+ , de couleur rouge, est instable. Cet oxydant dispose d’une faible puissance, mais l’est suffisamment pour décomposer l’oxygène de l’eau. Sa dismutation en Mn2+ et MnO2 est relativement simple en milieu acide. En le mettant dans l’eau, il s’hydrolyse en Mn3O4. La formule permettant de réaliser cette réaction est :

Mn3+ aq + e == Mn2+ aq

ε0 = 1,51 V

Dans le cas où l’on tiendrait compte de la réaction d’électrode dans un milieu aqueux acide, on a :

MnO2 solide + H3O+ anion hydronium + e == Mn3+ aq + H2O eau

ε0 = 0,95 V

En solution aqueuse, le bilan montre l’absence de chimie de Mn3+.

2 Mn3+ aq + 2 H2O == Mn2+ aq + MnO2 + 4 H3O+

Δε0 = 0,56 V

À l’état solide, l’oxydation III du manganèse est stable. Dans un environnement basique ou alcalin, la combinaison d’un corps avec l’oxygène du dihydroxyde de manganèse donne l’ancien oxyde manganique Mn2O3. Ce dernier est en même temps stable et basique.

Mn(OH)2 aq + ½ O2 gaz dioxygène → Mn2O3 solide + 2 H2O

Le cation Mn3+

Le cation Mn3+ n’est stable qu’en formant des complexes, comme :

  • Mn(PO4)23− violet ;
  • Mn(CN)63− rouge ;
  • MnF52− rouge foncé ;
  • Mn(C2O4)23− rouge foncé ;
  • [MnCl4]− ;

La combinaison Mn3+-dioxalate Mn(C2O4)23− étant instable en milieu chaud, il se désagrège à partir de 60 °C. Ce phénomène explique la raison pour laquelle les doses de permanganates à l’oxalate sont uniquement produites à chaud.

Le cation Mn4+

On ne retrouve pas le cation Mn4+ dans une solution acide. Il est fortement représenté par MnO2. On parle d’oxyde amphotère, dont la composition est non stœchiométrique stable. Dans la majorité des cas, une déficience en oxygène est observée. Cela se manifeste par la présence d’une poudre brun-noir ou brun foncé. Par rapport aux réactions électroniques de base, les formulations suivantes sont possibles  :

  • oxydant puissant dans un milieu acide :

MnO2 solide + 4 H3O+ anion hydronium + 2 e == Mn2+ aq + 6 H2O eau

ε0 = 1,23 V

  • réducteur potentiel en solution basique :

MnO2 solide + 2 H2O + 2 e == Mn(OH)2 aq + 2 HO anion hydroxyle

ε0 = −0,5 V

Ainsi, le cation tétravalent se présente sous forme d’ions complexes. Ces derniers sont souvent jaunes comme le Mn(CN)84- ou MnF62-, ou rouge foncé tel que le MnCl62-.

L’ion manganite bleu MnVO43-

Plutôt rare, l’ion manganite bleu MnVO43 existe seulement en milieu basique fort tel que la soude fondue. Sa dismutation en MnO42- et en MnO2 est possible dans un environnement moins basique. Sous l’influence de la chimie anglo-saxonne et allemande, ce cation est également qualifié d’hypomanganate.

L’ion manganate vert MnVIO42

Cet ion n’existe quasiment pas en solution aqueuse. Il ne se retrouve qu’en milieu très basique. Le trioxyde MnO3 n’existe pas à l’état libre. Il se dismute facilement en ion permanganate MnO4 et MnO2 dans un environnement moins basique. Cela se produit, par exemple, par la reprise d’une masse de base fondue avec de l’eau légèrement acide. On parle ici d’acidification et de dilution. La formule est donc :

3 MnO42− + 4 H3O+ aqueux anion hydronium → 2 MnO4aq permanganate violet + MnO2 précipité brun-noir + 6 H2O eau

Δε0 ~ 1,7 V

Pour former du manganate de potassium (K2MnO4), on fait chauffer un mélange de dioxyde de manganèse, de nitrate de potassium et d’hydroxyde de potassium. On obtient alors un solide vert clair très soluble dans l’eau, mais qui n’est pas stable en milieu basique. Les manganates ont des propriétés similaires à celles des chromates et des ferrates. Leur différence réside dans leur stabilité, celui des manganates étant intermédiaire.

Les composés de manganèse à l’état +7 ou VII, très acides, ont un fort pouvoir oxydant. Le permanganate de potassium KMnO4 peut décomposer lentement l’eau en peroxyde d’hydrogène ou en heptoxyde de manganèse Mn2O7. Le liquide résultant de l’association du permanganate de potassium avec l’oléum est très instable. L’ion permanganate MnO4 présente une couleur violet foncé, très indicatrice et bien connue des chimistes. Ses sels, en tant qu’agents oxydants, restent solubles. Cela explique alors l’intérêt de son utilisation en chimie analytique et préparative, notamment pour le dosage des « solutions fraîches » pendant la manganimétrie. L’acide permanganique HMnO4, découvert par Mitscherlich, est l’un des acides les plus forts connus. En chauffant le permanganate de potassium à environ 240°C, celui-ci se décompose et libère de l’oxygène. Il se forme alors du dioxyde de manganèse et d’oxyde de potassium.

Certains cations de manganèse réagissent avec l’anion sulfure. Ils participent à plusieurs réactions redox. Ils sont stabilisés sous forme de complexes. Le Mn2+ et le MnO4 sont utilisés régulièrement par les chimistes. Ils s’en servent dans des méthodes expérimentales ou analytiques à cause de leur stabilité. Les potentiels normaux des couples MnO2solide/MnO4 et Mn2+aqueux/MnO4 en milieu acide sont respectivement de +1,69 V et +1,50 V.

MnO4aq + 8 H3O+ + 5 e == Mn2+aq + 12 H2O

ε0 = 1,51 V

Les réactions spécifiques les plus communes permettant d’isoler les cations manganeux Mn2+ font intervenir des persulfates. Elles sont possibles en présence d’ions argent Ag+ comme catalyseurs. Il en résulte une oxydation au-delà de l’état IV. Ces réactions sont aussi réalisables à chaud avec le dioxyde de plomb PbO2 dans un milieu concentré en acide nitrique. On parle alors de la réaction de Crum.

Ces réactions d’identification respectives sont décrites ci-dessous :

2 Mn2+ aqueux + 5 S2O82− aq persulfate + 24 H2O eau → 2 MnO4aq permanganate violet + 10 SO42− aq sulfate + 16 H3O+ ;

2 Mn2+ aq + 5 PbO2 solide noir + 4 H3O+ → 2 MnO4aq permanganate violet + 5 Pb2+ aq + 6 H2O eau.

En revanche, les cations permanganate peuvent être réduits en cations manganeux en milieu aqueux acide par de nombreux agents réducteurs tels que :

  • Fe(II) ;
  • peroxyde d’hydrogène ou eau oxygénée ;
  • sulfure d’hydrogène gazeux ;
  • anion chlorure à chaud ;
  • bromure ;
  • iodure ;
  • tartrate à chaud.

Cependant, ils oxydent également de nombreux composés organiques en milieu aqueux neutre ou basique. On peut parler de l’anion formiate qui s’oxyde en anion carbonate. De même, l’oxydation à chaud de l’éthanol donne de l’acétate ou de l’aldéhyde.

La fusion basique oxydante de tout composé de manganèse dans un creuset réfractaire (par exemple, en porcelaine) entraîne la formation d’un mélange résiduel vert après refroidissement. Cette réaction se réalise avec une partie de nitrate de sodium et quatre parties de carbonate de sodium pour une partie de composé de manganèse. Elle sert à mettre en évidence la présence d’anion manganate ou de manganate alcalin. Cette ancienne technique a été éprouvée en verrerie.

MnSO4 sulfate de Mn par exemple + 2 Na2CO3 soude des Anciens + 2 Na2NO3 nitrate de sodium → Na2MnO4 manganate de sodium vert + Na2SO4 sulfate de sodium + 2 NaNO2 nitrite de sodium + 2 CO2 gaz carbonique dégagé

Dans le passé, les étudiants en chimie simplifiaient souvent la fusion en laboratoire en utilisant de la poudre de carbonate de sodium. Une fois chauffés avec un chalumeau réglé sur une flamme oxydante, ils la saupoudraient légèrement ou la plongeaient dans une solution d’ions manganèse. Ils ont obtenu un petit amas de manganate de sodium, de couleur verte, qu’ils ont dissous dans l’eau.

Une technique de détection qualitative du manganèse a été mise au point par Heinrich Rose. Le chimiste Jean-Baptiste Boussingault a appliqué ce procédé pour prouver la présence de cet élément dans le fer carburé ayant une teneur massique de 1/10000e. Il a chauffé les sels issus de la dissolution complète de ces matériaux ferreux avec de l’acide nitrique HNO3 et l’oxyde en feuille de plomb PbO2. Son objectif était d’observer la formation d’un permanganate violet intense.

Les principaux composés du manganèse

Les oxydes de manganèse
FormesCaractéristiques
Trioxyde de manganèse Mn2O3

Trioxyde de dimanganèse ou trioxyde de manganèse

Oxyde ionique basique Vert ou rose

Oxyde de manganèse(II) MnO ou minéral de manganèseOxyde ionique basique
Gris foncé ou parfois vert émeraude
Oxydes mixtes de manganèse (Ⅱ, Ⅲ) Mn3O4

Oxydes mixtes similaires à Fe3O4

Oxydes de sel de manganèse
  Poudre dont la couleur variant entre le brun et le noir. Dans la nature, on le retrouve sous la forme minérale d’hausmannite.
Dioxyde de manganèse hydraté MnO2 • H2OCorps brun résultant d’une lente précipitation du cation manganeux oxydé dans un milieu basique.

Réaction obtenue avec du peroxyde d’hydrogène, du brome liquide ou de persulfate de sodium.
Trioxyde de manganèse et de lanthane LaMnO3 ou Manganite de lanthaneOptimisé au strontium
Degré d’oxydation III  
Dioxyde de manganèse MnO2Tétragonal, noir
Formes minérales : la pyrolusite et la polianite globuleuse
Les oxyhydroxydes de manganèse

Les oxhydroxydes de Mn(III) ou MnO(OH) correspondent au manganite cubique, à la feitknechtite trigonale et à la groutite orthorhombique.

L’hydroxyde de manganèse

Ce corps de teinte blanche a pour formule chimique : Mn(OH)2. Il brunit progressivement lorsqu’il est exposé à la lumière. Il se transforme ensuite en hydrate de MnO2 et Mn3O4. La pyrochroïte, de maille trigonale, est sa forme minérale.

Les oxysels avec du Mn en oxoanion

Les sels d’oxyacides à base de manganèse sont les suivants :

  • manganate de sodium Na2MnO;
  • acide permanganique HMnO;
  • manganate de potassium K2MnO;
  • permanganate de potassium KMnO;
  • permanganate de sodium NaMnO;
  • permanganate d’argent AgMnO;
  • permanganate d’ammonium NH4MnO;
  • permanganate de baryum Ba(MnO4)2 ;
  • permanganate de calcium Ca(MnO4)2.
Les halogénures de manganèse

Les principaux composés chimiques issus de la combinaison du manganèse avec des halogènes sont :

  • halogénures de manganèse(II) :
    • (di)fluorure de manganèse MnF2 ;
    • tétrahydrate de chlorure de manganèse(II) MnCl2 • 4 H2O sous une forme commerciale ;
    • chlorure de manganèse mncl2 monoclinique, trigonal ou cubique avec des cristaux roses, correspondant à de la scacchite ;
    • iodure de manganèse Mnl;
    • bromure de manganèse MnBr2 α monoclinique ;
    • bromure de manganèse MnBr2 β orthorhombique ;
  • halogénures de manganèse(III) :
    • (tri)chlorure de manganèse MnCl3 ;
    • (tri)fluorure de manganèse MnF3 ;
  • halogénures de manganèse(IV) :
    • perchlorure de manganèse MnCl4 de couleur verte, soluble dans l’eau, dans l’éthyl-éther et dans l’alcool à 95 ° ;
    • perfluorure de manganèse MnF4.
Les sulfures de manganèse
FormesCaractéristiques
Sulfure de manganèse(II) polyhydraté MnS • n H2ODe couleur rose chair, on l’a produit avec un précipité de cation manganeux. La réaction a été faite en présence de sulfure d’ammonium dans un milieu aqueux neutre
Sulfure de manganèse(II) MnSComposé amorphe vert ou cubique noir. Sa forme minérale est l’alabandite.
Sulfure de manganèse(IV) MnSCorps cubique noir
Les carbonates de manganèse

Le carbonate de manganèse(II) MnCO3 est un corps solide blanc brunissant à l’air. En subissant la même réaction que celle de l’eau portée à ébullition, il se transforme en MnO2 et en CO2. Le minéral correspondant est la « diallogite » ou rhodochrosite

Les phosphates de manganèse
Substances chimiquesAppellation et caractéristiques
MnHPO4Hydrogénophosphate de manganèse
MnNH4PO4 • H2OPhosphate double d’ammonium et de manganèse hydraté Corps rose pâle
MnHPO4 • 3 H2OTrihydrate de hydrogénophosphate de manganèse
Mn2P2O7Pyrophosphate de manganèse
Mn3(PO4)2Ce composé blanc est très peu soluble dans l’eau (pKs~22). Il l’est en revanche dans l’acide acétique et dans les acides forts.  
Mn2P2O7Pyrophosphate de manganèse
Les nitrates de manganèse

L’hexahydrate de nitrate de manganèse Mn(NO3)2 • 6 H2O a une teinte rose rouge. Cette substance est soluble dans de l’alcool à 95 °.

Les sulfates de manganèse
Substances chimiquesAppellation et caractéristiques
MnSO4Sulfate de manganèse(II)
De couleur blanche anhydre ou rose, il est très soluble dans l’eau.
MnSO4 • H2OMonohydrate de sulfate de manganèse(II)
Cette substance ayant une teinte rouge clair ou rose monoclinique correspond au minéral appelé szmikite.
MnSO4 • 2 H2ODihydrate de sulfate de manganèse(II)
MnSO4 • 3 H2OTrihydrate de sulfate de manganèse(II)
MnSO4 • 4 H2OÉtrahydrate de sulfate de manganèse(II)
Sa forme commerciale a une couleur rosée monoclinique ou rhomboédrique
MnSO4 • 5 H2OPentahydrate de sulfate de manganèse(II)
MnSO4 • 6 H2OHexahydrate de sulfate de manganèse(II)  ;
MnSO4 • 7 H2OHeptahydrate de sulfate de manganèse(II) rouge  
Mn2(SO4)3Sulfate de manganèse(III) ou sulfate manganique
De couleur vert cristal, il est déliquescent et assez instable. Il est hydrolysable dans l’eau. Il se dissout facilement dans de l’eau froide et se décompose dans de l’eau chaude.
Les autres composés courants du manganèse

Les autres formes les plus fréquemment rencontrées des corps chimiques à base de manganèse sont :

  • les séléniures de manganèse ;
  • les carbures de manganèse, comme le Mn3C ;
  • les tellurures de manganèse ;
  • les siliciures de manganèse tels que la disiliciure de manganèse MnSi2 ;
  • les nitrures de manganèse Mn5N3 et difluorure de manganèse ;
  • le tétrahydrate de iodure de manganèse MnI2 • 4 H2O ;
  • les phosphures de manganèse ;
  • l’arséniate de manganèse Mn3(AsO4)2, composé très peu soluble (pKs~28,7) ;
  • le molybdate de manganèse MnMoO4 ;
  • le silicate de manganèse MnSiO2 ;
  • le thionate de manganèse : sous forme de dithionate de manganèse(II) MnS2O6 ;
  • les titanates de manganèse MnTiO3 ;
  • les tungstates de manganèse MnWO4 ou minéral hübnérite. Ces composés forment le pôle manganésé du minéral wolframite ;
  • les acétates de manganèse Mn(CH3CO2)2 ;
  • le tétrahydrate d’acétate de manganèse(II) Mn(CH3CO2)2 • 4 H2O ;
  • les oxalates de manganèse Mn(C2O4), qui est peu soluble (pKs~15) ;
  • les tartrates de manganèse : représentés par le tartrate potassique de Mn K2Mn(C4H2O6)2 ;
  • les orotates de manganèse
  • les cyanures de manganèse : Mn(CN)2 brun, KMn(CN)3 vert, ferrocyanure de Mn(II) Mn2Fe(CN)6, et ferricyanure de manganèse ;les dérivés carbonyles Mn2CO10 ;
  • les dérivés carbonyles Mn2CO10 ;
  • les dérivés nitrosocarbonyles ;
  • les composés organométalliques de type manganocène :
    • bis (cyclopentadiényl) manganèse ou manganocène officiel ;
    • (Méthylcyclopentadiényl) manganèse tricarbonyle ou MMT ;
  • les complexes de porphyrine ou phtallocyanine ;
  • les métalloenzymes de Mn ou arginase.

 

manganese-04

Analyse du manganèse

Les perles de borax placées dans une flamme oxydante prennent une coloration violette en présence de manganèse. L’analyse quantitative a montré une précipitation des ions manganeux Mn2+ en un mélange de phosphate mixte d’ammonium et de manganèse NH4MnIIPO4. Cette réaction nécessite l’ajout de chlorure d’ammonium NH4Cl et de phosphate d’ammonium NH4PO4 dans de l’ammoniac. La calcination du précipité a donné du diphosphate de manganèse Mn(PO4)2. Son pesage à froid permet de calculer la teneur en manganèse de l’échantillon initial.

La spectrométrie d’absorption ou spectrométrie d’émission atomique a été utilisée pour analyser les échantillons qui contiennent du manganèse. Diverses formes ont été étudiées : des minéraux solides, des sels dissous dans des milieux aqueux, plusieurs complexes et des particules colloïdales.

Une des méthodes d’analyse classique consiste à dissoudre les particules et les colloïdes dans un milieu acide pour obtenir des ions permanganates solubles. Cette opération nécessite un traitement au persulfate d’ammonium. Un dosage par étalonnage est possible grâce à une analyse colorimétrique ou spectrophotométrique basée sur de fortes absorbances dans le visible et l’ultraviolet. Toutefois, il peut être nécessaire d’augmenter la concentration en manganèse. Pour ce faire, on fait précipiter ou coaguler les composés initiaux pour les rendre insolubles, avant de les filtrer. Les autres procédés d’analyse de la teneur en manganèse d’un échantillon sont la spectrométrie de masse et l’analyse par activation neutronique ou par fluorescence X. Ils fournissent des informations sur la teneur totale en Mn, mais n’apportent pas de données précises sur l’état d’oxydation.

D’autres techniques d’analyse plus complexes, parfois électrochimiques, sont indispensables. Ces méthodes sont le plus souvent couplées ou triplées, en fonction de la nature de l’échantillon. L’analyse chimique est un ancien procédé de distinction des ions de différents états de valence. Le manganèse appartient au groupe du sulfure d’ammonium dont le réactif de collecte en présence d’ammoniac est le (NH4)2S. De même, il occupe une place dans le sous-groupe du zinc. Les cations de ce groupe sont précipités sous l’effet du mélange réactif collecteur cité précédemment. En revanche, quand les réactifs sont en excès, on obtient des précipités solubles.

La présence d’autres ions peut interférer avec les méthodes chimiques. À titre d’exemple, le fer perturbe la méthode à la formaldoxime.

Utilisations du manganèse

Les alliages

La préparation des alliages ferreux et non ferreux nécessite près de 90 % de la production de manganèse. On retrouve essentiellement ces combinaisons dans l’acier. Le manganèse est employé pour conférer certaines propriétés mécaniques. Les aciers qui contiennent ce métalloïde peuvent en contenir jusqu’à 14 %. Il est hautement résistant à la corrosion et est non magnétique. Ce type d’acier est adapté à la fabrication des barreaux et des portes de prison (lorsqu’on le lime, cet alliage se durcit). Des tôles d’acier au manganèse de différentes épaisseurs, que l’on trouvait auparavant dans les casques lourds des soldats, comme les modèles 1951 et 1978 français en renferment également. On en rencontre encore aujourd’hui dans les casques de sécurité des ouvriers du bâtiment. Ce métal est couramment utilisé dans la construction de meubles de sécurité anti-perçage.

Les soudures à l’arc à électrode enrobée à haute température nécessitent de la poudre de manganèse.

Les corps simples de manganèse sont largement manipulés dans la métallurgie industrielle. Ces aciers durs et résistants à la corrosion entrent dans la composition des aciers ferroviaires, des aiguillages, des roulements, des meubles de sécurité, etc. Pour les outillages, les fabricants se tournent plus vers les aciers à base de Cr, Mn, voire des aciers modifiés contenant du Cr, du V, du Mn et du Si.

Pour améliorer l’acier au manganèse, on y ajoute du nickel. Cet alliage est maniable à basse température. Un acier spécial au manganèse à 0,3 % de carbone est exploité pour le formage à froid. On parle aussi d’aciers de moulage, au même titre que les aciers austénitiques au manganèse. Les aciers au carbone-manganèse conviennent à la cémentation. Les aciers au chrome-manganèse ou au bore-manganèse sont des versions cémentées. L’acier au bore et celui au manganèse sont des spécimens à boulons typiques. Ceux au manganèse et au nickel sont le premier choix pour la conception de chaînes. On tire parti des propriétés des combinaisons de manganèse et de molybdène à moyen carbone pour fabriquer des tubes légers, mais solides. On peut citer le châssis de course Reynolds 531 et les tiges pour les matériels de forage.

Le manganèse est présent dans les alliages légers d’aluminium. Il est alors combiné avec le chrome et divers bronzes au manganèse. Cet élément étant peu soluble dans l’aluminium, il augmente la résistance des alliages d’aluminium. Il renforce les propriétés frottantes du produit fini contre l’acier (tribologie). L’ajout de 5 à 15 % de manganèse améliore la résistance à la corrosion. Les hélices et les gouvernails en contiennent pour être résistants à l’eau de mer.

Le dioxyde de manganèse

Le dioxyde de manganèse MnO2 est un oxydant et un désulfurant de l’acier et du fer. On s’en sert pour polir les aciers des canons de fusils ainsi que ceux des tuyaux et des pièces d’artillerie. Combiné avec d’autres oxydes par frittage, il donne des aimants en céramique. Il est parfois utile pour enlever le fer ou ses dérivés d’un liquide.

Il est le dépolariseur historique de la pile Leclanché (pile saline). L’électrode positive ou centrale de la batterie est recouverte de dioxyde de manganèse (MnO2) ou d’un composé électrochimique en couches plus complexe. Le dioxyde de manganèse fait à la fois figure de stockage et de régulation électrochimiques. Le chlorure de manganèse (II) sert d’électrolyte dans les piles et les batteries.

Il est la matière première de base dans la chimie du manganèse. Il est utilisé pour générer du permanganate par fusion alcaline oxydative. On le manipule fréquemment en chimie organique. Il figure parmi les agents oxydants dans la fabrication technique de l’uranium. Chimiquement parlant, il agit en tant que catalyseur. Ses nombreux composés intermédiaires expliquent son rôle dans la décomposition du chlorate de potassium dans l’ancienne méthode de production de l’oxygène. Il joue le rôle de siccatif d’encres d’imprimerie, de vernis et de peintures.

L’acétate de manganèse est employé dans l’industrie textile en tant qu’agent de mordançage. Le chlorure de manganèse (II) est aussi un agent siccatif pour l’huile de lin. En chimie organique, le permanganate de potassium agit comme agent d’oxydation dans plusieurs réactions.

Le dioxyde de manganèse est un pigment de couleur pour les émaux céramiques tels que le verre minéral, la poterie, la porcelaine et l’émail. Dans l’industrie du verre, l’ajout de dioxyde de manganèse à faible dose permet de blanchir cette matière. À forte dose, il lui donne une couleur allant de violette à améthyste et de brun à noir. La coloration finale du verre dépend du mode de préparation et de la composition de la verrerie. Cela s’explique par la dispersion des ions métalliques et des métaux à l’état d’amas colloïdaux. La teinte violette spécifique de l’améthyste s’explique par la présence de traces ou de particules de composés de manganèse.

L’ajout de dioxyde de manganèse donne une coloration noire ou brun foncé à la céramique ou aux pierres et dalles préfabriquées. Pour ce faire, il est combiné avec d’autres oxydes métalliques tels que l’oxyde de fer (II) et celui du chrome. De ce fait, le manganèse est particulièrement populaire dans les briqueteries. Certains types de briques et de tuiles sont teints en noir avec du dioxyde de manganèse.

Les autres composés du manganèse

La famille des sulfates de manganèse est l’une des matières premières du manganèse métal électrolytique industriel. Cet ancien déchet de l’industrie de l’aniline colore et pigmente les tissus. Il entre dans la préparation de vernis rouges pour le verre et les minéraux. Sous forme de silicate, il agit comme un pigment rouge géranium, essentiel dans la coloration des matières citées précédemment. Le carbonate de manganèse est un pigment blanc entrant dans la composition des peintures. Les substances chimiques colorantes à base de manganèse se retrouvent dans les matériaux d’art, à l’instar du violet et du bleu de manganèse. Ils sont surtout manipulés dans le domaine de la peinture artistique.

Au même titre que le permanganate de potassium, le chlorure de manganèse (II) est un désinfectant. Le carbonate de manganèse, à faible dose, aide à biocatalyser les produits pharmaceutiques.

Le décacarbonyle de dimanganèse est un additif antidétonant pour l’essence. On l’emploie couramment dans la chimie des polymères.

Le manganèse dans l’agriculture et l’élevage

Dans le monde végétal, le manganèse est un oligo-élément crucial. Il est présent dans les engrais sous forme de sels plus ou moins solubles. Ceux-ci sont exploités dans la culture des légumes et des agrumes. Pour compenser la carence en manganèse, on ajoute du sulfate de manganèse (MnSO4) ou de l’acétate de manganèse Mn(CH3COO)2 au sol, en plus des engrais. Toutefois, cet apport n’est pas nécessaire quand le mélange de pesticides (fongicides à base de manganèse) en contient. Le sulfate de manganèse a des propriétés antifongiques. On s’en sert aussi comme additif alimentaire pour bétail.

Dans le monde vivant, le manganèse a un fonctionnement semblable au fer. On le considère souvent comme le second micronutriment des cultures végétales après le fer.

Agriculture

Le manganèse est un oligo-élément typique du sol. Il est couramment présent dans les sols ayant un pH compris entre 4 et 8. Il peut prendre la forme d’oxydes insolubles générés par une action complexe de bactéries en milieu alcalin. La teneur en Mn est variable selon la nature du sol et le type de végétaux cultivés.

Les plantes n’assimilent pas facilement le manganèse. La méthode foliaire reste possible lorsque certaines conditions sont respectées. La teneur de cet oligo-élément influence la qualité du microbiote du sol. En revanche, il entre en jeu dans l’activation d’enzymes qui ont un lien avec le fer, comme dans la synthèse des chlorophylles. Les signes d’un déficit en Mn sont la diminution de la taille, du nombre et de la fertilité des pollens.

Les carences en manganèse sont fréquentes dans les terres agricoles. Les causes sont souvent multifactorielles. Des chaulages massifs peuvent les aggraver. On a rencontré ce cas au niveau de sols bretons riches en éléments organiques et acides dans les années 80. On retrouve fréquemment le Mn dans les composés organiques sous forme de complexes. Ils deviennent alors insolubles quand le pH augmente. Ce phénomène s’accentue en présence de lait de chaux disséminé. Une fois que le Mn assimilable est piégé, il ne peut plus couvrir les besoins des plantes, surtout dans le cadre de cultures intensives. Les régions dans lesquelles cette carence est fréquente ont adopté un chaulage à effet modéré.

Les besoins en manganèse des plantes varient entre 400 à 500 g par hectare. Dans un système d’agriculture intensive, il peut s’avérer indispensable de pulvériser une solution aqueuse avec une teneur en sulfate de manganèse variant entre 0,5 et 1,5 %. Une autre possibilité consiste à répartir de manière modérée et anticipée des scories Thomas (2 ou 4 % en masse de Mn). L’action alcalinisante de ces scories rend le manganèse lentement ou peu mobilisable. Depuis l’époque d’entre-deux-guerres, on préconise l’usage de carbonates, de chlorures et d’oxydes de manganèse. L’objectif est de favoriser le processus d’assimilation des engrais par les plantes.

Cependant, si des seuils spécifiques sont dépassés, le Mn devient toxique pour les végétaux. Cette toxicité est fonction des variétés et des espèces, sans oublier le pH du sol. Dans la plupart des cas, les limites concernées sont rapidement atteintes dans les sols manganésifères naturels ou au niveau des friches industrielles.

Élevage

Le manganèse est un cofacteur enzymatique ou un activateur de type carboxylase, peptidase ou phosphatase. On le retrouve dans les tissus des animaux vivants. Il joue un rôle vital dans la formation des os ainsi que dans le développement et le fonctionnement du système reproducteur. Il est particulièrement important dans l’hypophyse antérieure, où il stimule la production d’hormones sexuelles.

Chez les bovins, la carence en manganèse implique un retard de croissance et de maturation sexuelle chez les veaux et les génisses. Une altération dans la reproduction des adultes est également possible. Un léger manque se traduit généralement par une démarche raide chez les vaches adultes, en particulier au niveau du jarret droit. Par ailleurs, on remarque une diminution importante de la production laitière. Les jeunes bovins ont besoin de 60 mg/kg de matière sèche par jour. Les spécimens adultes ont besoin de la moitié de cette quantité.

Chez les volailles, il existe une maladie d’ossification spécifique si l’alimentation est trop pauvre en manganèse. D’autre part, le maintien du phosphore et du calcium dans l’alimentation explique l’apparition de certains symptômes qui entraînent une ossification ou une déformation des pattes. Les poussins ont besoin de 55 mg/kg de matière sèche par jour, contre 35 mg pour les poules.

L’alimentation des porcs doit fournir 40 mg/kg de matière sèche au quotidien. Une carence en Mn cause un retard de croissance typique des os longs ainsi que des difformités caractéristiques des pattes avant. On constate aussi une perturbation de la reproduction des truies. Elles sont souvent sujettes à des œstrus irréguliers et des avortements spontanés.

Toxicologie du manganèse

À de petites doses, le manganèse figure parmi les bioéléments courants du règne végétal et animal. Dosé à 1 mg par jour (jusqu’à 5 mg par jour pour l’homme adulte), cet oligo-élément est indispensable pour les enzymes de l’organisme. Ses dérivés sont toxiques à fortes doses. Le manganèse est une neurotoxine mortelle à partir de 10 mg/j. En milieu industriel, la poussière de manganèse doit faire l’objet d’une surveillance particulière, avec une limite de teneur en élément Mn inférieure à 5 mg/m3. Une absorption trop importante peut entraîner de graves troubles au niveau du métabolisme et du système nerveux. Connu sous le nom de folie du manganèse, ce ralentissement psychomoteur se manifeste par une série de convulsions et d’apathie similaires à la maladie de Parkinson. Il s’accompagne d’une psychose hallucinatoire et, éventuellement, d’une paralysie. On nomme l’ensemble des maladies causées par cet élément : le manganisme.

Oligo-élément

Le manganèse est un oligo-élément indispensable pour le maintien des fonctions vitales des humains. Selon le modèle animal, une carence en manganèse peut entraîner des troubles de la reproduction chez les deux sexes. On assiste à des déformations du squelette, une dépigmentation, une ataxie ainsi qu’à des lésions au système nerveux central. Ces phénomènes se produisent à la suite d’un apport insuffisant évalué à moins de 2 à 3 mg/j chez l’adulte.

Le manganèse est nécessaire à l’activité biologique de nombreux enzymes qui jouent un rôle important dans divers processus métaboliques :

  • glycosyltransférase ;
  • pyruvate carboxylase ;
  • GTP oxaloacétate carboxylase ;
  • isocitrate déshydrogénase ;
  • malate déshydrogénase ;
  • arginine synthase ;
  • aminoamide synthétase.

Il est notamment présent dans le métabolisme des glucides et la synthèse des mucopolysaccharides. Il est indispensable dans la synthèse d’enzymes (Mn-SOD) impliqués dans la lutte contre le stress oxydatif. Il apporte une réelle protection contre les dommages causés par les radicaux libres. Il participe à la production de vitamine E et contribue à l’efficacité de la vitamine B1 (thiamine). Cet activateur d’oxygène moléculaire joue un rôle majeur dans la fonction des métalloprotéines telles que le superoxyde dismutase.

Plusieurs systèmes enzymatiques ayant recours au magnésium sont fonctionnels avec du manganèse. En revanche, leurs propriétés enzymatiques (Km, Vmax) sont différentes. En fonction de la nature de l’enzyme, ce métalloïde peut parfois remplacer le zinc.

Toxicité du manganèse

Chez les adultes en bonne santé, 3 à 5 % du manganèse ingéré est absorbé lorsque le bol traverse l’intestin. Il pénètre ensuite dans la circulation sanguine. Les substances non utilisées par le métabolisme normal sont alors rapidement éliminées par le foie. Ce dernier les excrète dans la bile, qui les renvoie dans l’intestin, d’où elles sont excrétées dans les fèces. La partie restante, soluble dans l’eau, est évacuée avec l’urine.

Cependant, selon les modèles animaux et les données de la médecine du travail, le manganèse devient neurotoxique dès qu’il est ingéré à plus de quelques mg/j. Il en résulte des troubles graves et irréversibles au niveau des systèmes nerveux et neuromoteur. Des cas isolés ou des séries d’empoisonnements sont régulièrement signalés depuis 1837. Une étude canadienne a démontré qu’en étant présent dans l’eau potable, cet élément peut nuire au développement cognitif et intellectuel des enfants. La maladie neurodégénérative qu’il induit est irrémédiable et évoque une maladie de Parkinson idiopathique. Selon les recherches effectuées par Takser et al. en 2003, il y a un risque d’accumulation de Mn dans l’organisme du fœtus pendant la grossesse. Toutefois, on observe un manque flagrant d’informations sur les effets d’une faible exposition au manganèse chez l’homme. Ce que l’on sait, en tout cas, c’est qu’une exposition in utero aurait des conséquences sur le développement psychomoteur chez les nouveau-nés.

Une limite de sécurité a été définie en France par l’Anses, anciennement Afssa. Elle est de 4,2 à 10 mg/j. L’inhalation d’aérosols de dioxyde de manganèse est nocive pour les voies pulmonaires, surtout chez les professionnels de la soudure.

Il existe des tests comportementaux neurologiques, neuropsychologiques et neurophysiologiques qui permettent de détecter les premières prémices de la neurotoxicité du manganèse. L’exposition professionnelle ou environnementale au manganèse est un facteur qui doit alerter les personnes concernées, avant même l’apparition des manifestations cliniques d’intoxication aiguë ou chronique. Ces tests recherchent les signes suivants  :

  • une fonction motrice ralentie ;
  • des tremblements accrus ;
  • des réponses neuromusculaires ralenties ;
  • des déficits possibles de l’odorat et de la mémoire ;
  • des déficits intellectuels ;
  • des changements d’humeur.

Les chercheurs Mergler et Baldwin n’ont pas trouvé de relations claires entre l’exposition au manganèse (évaluée par estimation) et une éventuelle incorporation (déterminée en fonction du résultat des tests neurologiques). D’autres scientifiques ont avancé la possibilité d’une relation dose-effet. La teneur en Mn est alors mesurée à travers sa concentration dans le sang, les urines ou les cheveux. Les résultats de ces analyses peuvent ainsi traduire une imprégnation plus ancienne, au même titre que le plomb dans un cadre de saturnisme. Elle se remarque fréquemment chez les enfants qui vivent à proximité des zones à risques de contamination par le manganèse (zones industrielles ou minières).

Autrefois, on mélangeait le manganèse tricarbonyle ou méthylcyclopentadiényl au plomb dans le carburant. Il est toujours utilisé comme agent antidétonant dans l’essence à ce jour, mais à très faibles doses en raison de sa toxicité. On s’en sert également en tant que fongicide. Ces deux types d’utilisation du manganèse sont des sources d’expositions à ne pas négliger selon Mergler et Baldwin. Ce composé devient rare aux États-Unis, mais son usage augmente dans les pays pauvres.

De nos jours, on commence à mieux comprendre les mécanismes biochimiques de la toxicité du manganèse. On sait, par exemple, qu’il existe une susceptibilité individuelle en partie d’origine génétique. De même, le processus toxique qui implique l’auto-oxydation de la dopamine et la production de radicaux libres sont à prendre en compte. Ces intoxications induisent des dommages neuronaux. Certaines recherches ont avancé la possibilité que le manganèse figure parmi les perturbateurs endocriniens. En effet, des analyses ont été faites en médecine du travail. Elles ont mis en évidence qu’une exposition, même en faible quantité, aux oxydes de manganèse a entraîné une modification de la teneur en prolactine sérique. Cette dernière se retrouve aussi à des taux particulièrement élevés chez des travailleurs exposés. Cette augmentation anormale de valeur est d’ailleurs persistante chez ces personnes.

D’autres marqueurs biochimiques ont été évalués. En même temps, un modèle dose-réponse a été développé sur la base du manganèse urinaire, un marqueur d’exposition. La dose de référence est donc de 0,4 μg de manganèse par litre d’urine. Cela signifie qu’une exposition environnementale au manganèse peut entraîner une augmentation anormale des taux de prolactine sérique dans la population générale.

On observe actuellement une évolution rapide de la maladie de Parkinson (500 000 à 1,5 million de cas par an aux États-Unis). Les médecins doivent alors mieux prendre en compte l’exposition au manganèse pendant le diagnostic différentiel. Les médecins du travail peuvent donc contribuer à limiter l’exposition à ce métalloïde et ainsi limiter ses effets néfastes sur la santé au travail.

Radiotoxicité du manganèse

Le manganèse a 29 isotopes radioactifs. Ils vont de 44Mn à 67Mn. Ils sont pratiquement rares dans la nature (pas de bruit de fond détectable). Cependant, ils sont bioconcentrés et bioaccumulés par les bryophytes aquatiques comme Cinclidotus, Fontinalis et Platyhypnidium. Dans ce cas, le facteur de concentration est de 15 000 à 25 000 (Karine Beaugelin-Seiller, 1994). Cette valeur est plus élevée dans les zones de rejets de liquides radioactifs des installations nucléaires.

Les radio-isotopes les plus utilisés en laboratoire ou dans les industries industrielles sont :

  • le 54Mn : on l’emploie en tant que radiotraceur β+ et gamma dans l’industrie métallurgique et minière. La période radioactive de cet isotope est de 312,5 j, avec une activité massive de 2,87 × 1014 Bq/g. Son dosage est réalisable par spectrométrie gamma à 835 keV.
  • Le 56Mn est un émetteur β et gamma. Son émission principale par désintégration est de 2 848 keV en rayonnement bêta et 847 keV en rayonnement gamma. Cet isotope a une courte période radioactive de 2,5 heures. Il est exploité en tant que radiotraceur biologique.

Ces deux radio-isotopes sont générés par les centrales nucléaires. Ils résultent du processus d’activation de l’isotope stable du fer (56Fe) des structures des réacteurs nucléaires. Ils sont entraînés dans l’environnement après corrosion des métaux. Ils sont présents sous forme de particules dans le flux neutronique du réacteur. Au début des années 2000, on a évalué la quantité de manganèse radioactif rejeté sous forme liquide par la centrale nucléaire d’EDF. Le radio-manganèse constituait 1 à 2 % de l’activité gamma du parc électronucléaire, hors tritium, soit l’équivalent de 1 GBq/an (Florence et Hartman, 2002).

Dans les usines de retraitement, le manganèse est issu d’assemblages combustibles sur lesquels se déposent des produits d’activation sous forme d’oxydes. Il est ensuite remis en solution au cours des opérations de dissolution du combustible. Le 54Mn est rejeté sous forme liquide. En 1999, l’activité rejetée de l’usine de La Hague était de 12 GBq et celle de l’usine de Sellafield en 2002 était de 20 GBq. Selon l’IRSN, les paramètres radioécologiques spécifiques qui conditionnent son transfert sur la chaîne sol→plante→alimentation sont bien connus. En effet, des études ont été réalisées chez la truite, mais pas chez les bivalves filtreurs. Ces derniers sont néanmoins considérés comme des indicateurs biologiques intéressants de la contamination d’un milieu. Les recherches sur le transfert foliaire du radio-manganèse, en revanche, ne sont pas nombreuses. Ces paramètres diffèrent selon les espèces et certains cofacteurs. Les effets radiotoxiques de ceux-ci sont encore mal connus, mais l’IRSN a publié en 2001 un tableau sur le 54Mn (un émetteur bêta). Chez l’animal et l’homme, on peut supposer qu’ils influencent le métabolisme, puisque le manganèse est un élément essentiel à faible dose. Il joue un rôle non négligeable dans la minéralisation osseuse, le métabolisme énergétique, la synthèse et l’activation des enzymes (métalloenzymes). Il est indispensable dans la protection des cellules contre les radicaux libres. Cela implique une teneur élevée en manganèse dans le foie, la mélanine, le pancréas, les reins ainsi que les organes riches en mitochondries. L’ingestion de manganèse paraît s’effectuer par diffusion dans le sang avec une liaison avec les protéines plasmatiques telles que l’albumine et les transferrines. L’assimilation du manganèse se fait par diffusion dans le sang. Il se lie alors aux protéines plasmatiques telles que l’albumine et les transferrines.

 

La présence du manganèse dans les milieux anthropiques et dans l’environnement

Ce métalloïde est un élément chimique naturel plus ou moins commun. En effet, il est présent à hauteur de 0,1 % de la croûte terrestre. Il est donc particulièrement abondant dans l’environnement. On le rencontre dans plusieurs types de sédiments et de roches, dans l’eau et dans le sol. Il se disperse dans l’air, dans l’eau de pluie et dans les sols après l’érosion de ces derniers. Les embruns marins, les incendies de forêt, les transferts par les végétaux et les émissions de poussière de volcan libèrent également du manganèse.

Depuis la révolution industrielle, des sources anthropiques directes ont vu le jour dans les mines et dans les industries métallurgiques telles que les exploitations minières. De même, les usines de traitement de minéraux ainsi que les entreprises de production de manganèse et de ses alliages en génèrent.

Le lessivage des zones industrielles par l’eau de pluie et celui de la nécromasse contenant du manganèse sont d’autres sources de ce minéral. On le retrouve aussi dans les excréments des animaux et des humains. L’OMS cite la combustion de combustibles fossiles et les émissions issues de la combustion d’additifs de carburants comme une source importante d’émission de manganèse. Il est présent en grande quantité dans les eaux usées et les boues d’épuration puisqu’il n’est ni dégradable ni biodégradable.

Le manganèse dans l’air

La concentration de manganèse dans l’air est faible, surtout en milieu naturel. Sa valeur est comprise entre 0,5 et 14 ng/m3. En zone rurale, la teneur moyenne est de 40 ng/m3. Dans un environnement urbain, les taux moyens sont de 65 à 166 ng/m3 contre 8 000 ng/m3 dans les zones industrielles. Ce taux est sensiblement le même près des autoroutes particulièrement passantes. Il atteint 200 à 300 ng/m3 près des fonderies. À proximité des industries de ferromanganèse et de silicomanganèse, il peut dépasser les 500 ng/m3. En outre, il est possible d’inhaler du manganèse sous forme de composés volatils. On risque de l’ingérer par inadvertance quand il prend la forme de poussière.

manganese-05

Le manganèse dans l’eau

La teneur en manganèse de l’eau varie énormément en fonction du contexte géologique. Les taux oscillent entre 10 et 10 000 µg/L, mais dépassent rarement les 1 000 µg/L. Ils restent généralement sous les 200 µg/L. À noter qu’une concentration de quelques µg/L laisse des taches sur du textile. Le goût, la couleur et l’odeur de l’eau qui en contient peuvent être particuliers. Un traitement d’épuration qui fixe le manganèse en état solide est donc parfois nécessaire. L’eau qui contient une importante concentration de sels de manganèse est communément appelée « eau noire » dans le langage physico-chimiste.

Les deux principales formes du manganèse que l’on rencontre en milieu aquatique sont le Mn (II) et le Mn (IV). Le passage d’un état à un autre dépend du contexte microbien ou abiotique oxydoréducteur. La chimie environnementale du manganèse est régie par le pH et les conditions redox de l’eau. Le Mn (II) est en position dominante lorsque le pH ainsi que le potentiel redox sont bas. La proportion de manganèse colloïdal oxyhydroxyde est croissante dans les eaux non dystrophes, avec un pH supérieur à 5,5. Au niveau de la limite sédiment-eau et dans le sédiment, les facteurs qui influencent la forme chimique du manganèse sont :

  • le taux d’oxygène de l’eau sus-jacente ;
  • la pénétration de l’oxygène dans le sédiment ;
  • la quantité de carbone organique benthique.

L’anthropisation des milieux contribue à la modification de ces conditions. Ces changements sont fréquents avec l’acidification des océans et après les pluies acides. La tendance à l’eutrophisation et au colmatage des sédiments qui deviennent anoxiques est à prendre en compte.

Le manganèse dans les sédiments et les sols

Les concentrations de Mn dans les sédiments figurent parmi les plus élevées. Elles vont de 410 à 6700 mg/kg de poids sec au niveau des cours d’eau. Des teneurs importantes, voire astronomiques, ont été atteintes localement. Au fond des lacs urbains, elles peuvent atteindre 13 400 mg/kg (poids sec). En effet, ces étendues d’eau douce reçoivent les eaux de ruissellement des zones industrielles et résidentielles. Dans les estrans et dans les sédiments du nord de l’Adriatique, on compte 100 à 1 000 mg/kg de manganèse en poids sec. Dans la mer baltique, les charges sèches dans la partie supérieure des sédiments varient de 3 550 à 8 960 mg/kg en poids sec. Ces taux de manganèse inhabituellement élevés proviennent des activités de l’industrie sidérurgique et de la production de dérivés de ferromanganèse. Ces composés sont transportés par les nodules et les charges fluviales vers cette mer intérieure à faible capacité de régénération.

La teneur en Mn du sol varie en fonction des modifications de la matrice géologique ou de la « contamination naturelle » par les vents de poussière et par l’eau. Le « fond géochimique naturel » ou teneur globale en Mn peut aller de moins de 1 à 4 000 mg/kg de sol en poids sec. La moyenne est de 300 à 600 mg/kg de sol en poids sec. À teneur égale, la toxicité du manganèse est plus élevée dans les sols naturellement acides ou acidifiés.

Dans les sols largement contaminés par les activités humaines (friches industrielles, dépôts de pesticides, etc.), les champignons peuvent (re)concentrer le Mn. Ils l’exportent vers le réseau trophique sous forme soluble à travers son réseau mycélien. Cela n’exclut pas les transports par les animaux qui en consomment comme les limaces ou les écureuils. On a aussi la dégradation de la nécromasse, fin ultime de la biomasse.

Le manganèse dans les aliments

Dans l’alimentation humaine, le manganèse se trouve en grande quantité dans :

  • les pains au germe de blé et pains aux grains entiers ;
  • le seigle ;
  • les flocons d’avoine ;
  • le riz brun ;
  • la mélasse ;
  • les noix ;
  • les amandes et les noisettes ;
  • la noix de coco desséchée ;
  • le cacao ou le chocolat noir ;
  • les moules ;
  • les pétoncles et les huîtres ;
  • plusieurs espèces de poissons comme le brochet et la truite ;
  • les lentilles cuites ou le quinoa ;
  • les pois chiches ;
  • le soja ;
  • les avocats ;
  • les haricots verts ;
  • les épinards ;
  • les légumes à feuilles vertes ;
  • les fruits frais comme les mûres ;
  • les framboises ;
  • les fraises ;
  • l’ananas ;
  • l’huile d’olive ;
  • les jaunes d’œufs ;
  • les pignons de pin ;
  • les feuilles de thé ;
  • le sirop d’érable ;
  • les bananes séchées ;
  • les châtaignes crues.

On n’oublie pas non plus les herbes de Provence et les épices diverses telles que le gingembre, la cardamome, les clous de girofle et la cannelle.

Cinétique du manganèse

Le manganèse constitue un oligo-élément essentiel pour les plantes. Leurs besoins en Mn varient de 10 à 50 mg/kg de tissu. Il est facilement bioconcentré et bioaccumulé par un certain nombre d’organismes aquatiques. Les facteurs de concentration sont :

  • de 2 000 à 20 000 pour les plantes marines et d’eau douce supérieures ;
  • de 2 500 à 6 300 pour le phytoplancton ;
  • de 300 à 5 500 pour les macroalgues marines ;
  • de 800 pour les moules intertidales à 83 ;
  • de 35 à 930 pour les poissons.

Vers la fin du XXe siècle, les organismes aquatiques tels que les crustacés, les mollusques et les poissons renferment en moyenne 10 μg/g de manganèse (poids frais). Dans l’eau en revanche, sa bioaccumulation et sa concentration dans le réseau trophique varient avec la température. Ils diminuent cependant avec l’augmentation du pH et de la salinité.

Les données issues des recherches conduites sur ce sujet montrent que les invertébrés aquatiques et les poissons sont les espèces animales qui absorbent le plus le manganèse. La diminution du pH et l’augmentation de la température favorisent cette absorption. Ces deux tendances sont accentuées avec l’apparition de la crise écologique. Par ailleurs, ces deux facteurs n’influencent pas l’effet de l’oxygène dissous sur ce mécanisme. De plus, l’absorption de manganèse est inversement proportionnelle à l’augmentation de la salinité de l’eau. Le taux moyen de manganèse dans les organismes marins à la fin du XXe siècle était de 10 μg/g en poids frais. Néanmoins, sa bioaccumulation et sa concentration dans le réseau trophique marin sont variables. Elles augmentent avec la température et diminuent quand le pH est élevé.

L’écotoxicité du manganèse

Les tests de toxicité du Mn ont été majoritairement réalisés avec du manganèse ionique. On a encore du mal à établir son écotoxicité globale. La toxicité aquatique des formes complexées, nanoparticulaires, particulaires et colloïdales est également peu connue. À doses équivalentes, les trois premières formes citées sont moins toxiques.

Le comportement du manganèse dans l’environnement peut être modélisé avec le manganèse 54. Toutefois, les données qui indiquent sa localisation ainsi que son suivi ne peuvent permettre une évaluation écotoxicologique. Cette dernière est d’ailleurs mise en difficulté par deux facteurs. Le premier est le seuil critique qui varie de manière considérable selon les espèces. Pareillement, on doit tenir compte des sous-populations et des cultivars de l’espèce pris en considération. Le second facteur est sa synergie positive ou négative avec d’autres éléments tels que la silice.
Le manganèse étant un oligo-élément, il devient toxique dans les deux cas suivants :

  • une carence : fréquente dans les sols calcaires, surtout lorsque ceux-ci contiennent une importante quantité de matière organique ;
  • un excès qui se traduit par des niveaux supérieurs aux seuils de concentration, ces derniers variant d’une espèce à une autre.

Par ailleurs, pour un même niveau de concentration dans l’environnement, on constate l’apparition d’effets négatifs lorsque les doses sont plus faibles. De plus, la dynamique environnementale (notamment la mobilité dans les sédiments et les sols) s’accélère dans les milieux acides et anaérobies. Ces effets augmentent la biodisponibilité de ce métal dans le sol à travers des oxydes. La mobilité du manganèse dépend de son degré d’oxydation et du pH du milieu dans lequel il se trouve. Ainsi, il se déplace rapidement dans les environnements acides. Un ralentissement conséquent est constaté lorsque le pH est supérieur à 7.

Il a été démontré que le manganèse agit comme un inhibiteur ou devient toxique pour certaines levures. L’expérimentation consistait à ajouter 2 ppb de ferrocyanure de manganèse à la mélasse de betterave. Ce sous-produit de l’industrie sucrière est utilisé comme substrat de fermentation acide résultant de la dégradation de la levure Aspergillus niger (souche A-1-233 du CNRC). Cette quantité de ferrocyanure de manganèse est suffisante pour diminuer de 10 % la production d’acide. Ce mélange a entraîné un changement de la morphologie de la levure. Le stress engendré par cette baisse de la formation d’acide la fait passer d’une forme en granule à une forme filamenteuse. Des ajouts plus faibles de l’ordre de 0,4 à 2 ppb ont conduit à la formation d’une agglomération de levures. Cela correspond, à priori, à une réaction de stress. En augmentant la quantité de ferrocyanure de manganèse (de 2 à 100 ppb), on remarque une baisse significative de rendements.

Les résultats obtenus lors de l’ajout de 100 ppb sont le quart de ceux constatés avec 1 ppb, voire moins. Les autres métaux testés en laboratoire (Al3+, Ca2+, Co2+, Cu2+, Fe2+, Mg2+, Ni2+, Zn2+) n’ont pas donné le même effet. Ils n’ont pas entraîné une modification notable de la morphologie de la levure. Seuls Al3+, Fe2+ et Zn2+ ont causé une réduction de la production d’acide, mais à des concentrations relativement élevées (5-25 ppm). De plus, l’ajout de ces autres métaux n’a pas changé les effets néfastes du manganèse sur la croissance et la formation d’acide.

Pour certaines algues (par exemple, la diatomée marine Ditylum brightwellii ou les algues d’eau douce Scenedesmus quadricauda), il est toxique à faible dose.

L’excès de manganèse dans les plantes provoque une chlorose localisée, un développement inégal des feuilles et des lésions nécrotiques. Cet élément peut être présent à des concentrations hautement toxiques dans certaines espèces végétales. Les plantes vivrières en renferment à des valeurs critiques qui vont de 100 à 5 000 mg/kg.

Le manganèse conditionne la survie des Daphnia magna. Les doses nécessaires au développement de ces crustacés planctoniques varient énormément en fonction de la dureté de l’eau. Selon l’OMS, des tests toxicologiques sur des invertébrés aquatiques ont donné des valeurs de CL50 ou EC50 à 48 heures comprises entre 0,8 mg/L (Daphnia magna) et 1389 mg/L (Crangonyx pseudogracilis). Les valeurs de CL50 les plus basses ont été observées dans une eau à faible dureté (25 mg de carbonate de calcium par litre).

L’exposition à 0,01 mg/L de manganèse pendant 7 jours réduit considérablement l’éclosion des larves de crabe jaune (Cancer anthonyi)

La sensibilité des poissons au manganèse varie d’une espèce à l’autre. Les larves de saumon Coho sont plus sensibles à cet élément que les larves de poisson-chat (Heteropneustes fossilis). Le manganèse, à des doses inférieures à 0,5 à 1 mg/L, est létal pour les œufs ou les alevins de truite, surtout si l’acidité augmente (pH inférieur à 5). La maladie de la carapace des crabes bleus (Callinectes sapidus) a été attribuée à une contamination par le manganèse. Celui-ci se dépose également sur les branchies de la langoustine Nephrops norvegicus. Ce phénomène lui donne une coloration brune ou noire. On a observé cet effet du manganèse dans la zone anoxique au sud-est du Kattegat, en mer baltique, près de la Suède.

L’écotoxicité du manganèse diminue en présence d’agents chélatants. La dureté de l’eau est aussi un facteur qui réduit les effets toxiques de cet élément sur les milieux vivants.

En général, 1 mg/L de manganèse est suffisant pour provoquer des effets toxiques sur les organismes aquatiques évoluant en eau douce. Pour protéger 95 % des espèces, avec 50 % de garantie d’aboutissement, une valeur générale de 0,2 mg/L de Mn a été proposée pour les eaux douces. Pour le milieu marin, cette teneur est de 0,3 mg/L.

Économie et production de manganèse

Vers le début des années 1990, les principaux producteurs de minerai à faible teneur en manganèse étaient la Russie et ses anciens voisins de la CEI. On parle du Kazakhstan, de l’Ukraine, de la Chine et de l’Inde. Les minerais à forte teneur sont, en revanche, extraits au Brésil, au Gabon, en Australie et en Afrique du Sud. À cette époque, la production mondiale annuelle de minerai de manganèse avoisinait les 30 millions de tonnes. Les plus grands importateurs étaient la France, le Japon et la Chine.

À partir des années 1980, le marché des ferroalliages est monopolisé par les producteurs de manganèse. Les groupes sidérurgiques recherchent des matériaux intermédiaires pour la fabrication de l’acier et de ses dérivés technologiques. Des accords d’échange de technologie sont conclus entre les pays qui exploitent ce minerai et les pays industrialisés. Pour s’assurer une avance durable, le puissant groupe minier sud-africain Samancor s’associe à un consortium de groupes japonais. On fait notamment allusion à Mizushima & Ferroalloy Industries Sumitomo et de Japan Metal & Chemical & Mitsui.

La production de ferromanganèse augmente de plus en plus, avec une préférence pour l’usage des fours à arc électrique. On laisse ainsi de côté l’ancien procédé qui consistait à se servir de hauts fourneaux.

Le volume de la production pour l’année 2013 répartie par principaux pays producteurs miniers ainsi que leurs éventuelles réserves estimées en minerai de Mn se présentent comme suit :

PaysProduction minière en équivalent Mn (Mt)% mondialRéserves estimées (Mt)
Afrique du Sud4,325,4150
Chine317,744
Australie2,97517,697
Gabon1,96711,624
Brésil1,126,654
Inde0,925,449
Ghana0,5333,2
Malaisie0,432,5
Kazakhstan0,392,35
Ukraine0,31,8140
TOTAL MONDIAL16,9100570

Durant l’année 2015, on a extrait 46 millions de tonnes de minerai de manganèse au niveau mondial. Cela correspond à une production de 15,3 millions de tonnes de Mn.

Pour la France, la quantité de minerai de manganèse oscille entre 150 et 160 000 tonnes. De nos jours, l’industrie française importe surtout du manganèse en provenance du Gabon. En effet, l’Hexagone ne dispose plus de mines capables de fournir du Mn. Cependant, le groupe Eramet est l’une des plus grandes sociétés minières qui extraient du manganèse. En se basant sur les informations de la douane française, à l’import, le prix moyen à la tonne du Mn était de 220 € en 2014.

 

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