Il n’est pas utilisé pour les balles de chasse au grand gibier en raison de son manque de ductilité. En effet, suite à un incident de chasse, les risques toxiques de la présence des fragments de billes de bismuth dans le muscle ou les organes ont été étudiés et publiés en 2012. Pour ce faire, des petits morceaux de ces billes ont été introduits dans les tissus musculaires des rats de laboratoire. Les résultats ont montré la présence de molécules de Bi dans l’urine et le sang des cobayes. La bio-imagerie a permis de visualiser la diffusion du métal dans le tissu. Il est distribué légèrement et d’une manière asymétrique dans la chair autour des fragments, mais cette image peut ne pas correspondre exactement à sa distribution réelle. La présence de morceaux de Bi entraîne une concentration accrue de zinc dans la zone environnante, considérée comme indicateur d’une réponse inflammatoire induite par l’expérimentation.
Dans la production de munitions, le bismuth a été identifié comme une alternative plus sûre et moins nocive pour remplacer le plomb. Les balles « vertes », les balles non létales et les munitions anti-émeutes contenant du Bi sont ainsi de plus en plus utilisées, de même que celles destinées à l’entraînement, à l’impact ponctuel ou à la distraction suspecte.
Il est aussi utilisé comme alternative dans la fabrication d’écrans de protection contre les rayons X pour le corps humain. Ces écrans sont fabriqués en latex imprégné de bismuth et sont utilisés lors d’examens médicaux tels que les tomodensitomètres, afin de réduire les risques de toxicité associés à l’exposition au plomb.
La directive européenne sur la limitation de l’utilisation de substances dangereuses (RoHS) a étendu son utilisation dans la production de composants électroniques, en tant que composant de soudures à bas point de fusion (en substitut aux soudures traditionnelles au plomb-plomb, plus toxiques). Le bismuth est une alternative préférable pour les soudures utilisées dans les équipements de traitement des aliments et les conduites d’eau en cuivre. Il est appliqué dans l’industrie automobile, surtout au sein de l’Union européenne.
Cet élément peut remplacer le Pb dans les cuivres à usinage libre utilisés en plomberie, mais il ne possède pas les mêmes performances que les aciers au plomb.
En moulage
Le bismuth est un matériau de choix pour la fabrication de moules de précision sous pression en raison de sa bonne capacité de fusion. Ces moules sont utilisés dans le modélisme, notamment dans la fabrication des petites voitures de collection ou des maquettes. Il est également employé comme matériau métallique pour le moulage, permettant de créer des pièces métalliques complexes, avec une grande précision et une finition soignée.
En alliage
L’eutectique est le point de fusion le plus bas d’un alliage où les différents éléments qui le composent fondent simultanément. Pour les alliages à bas point de fusion, l’eutectique se situe à 48 % de bismuth en masse. À ce stade, ils changent de propriétés physiques : certains se contractent tandis que d’autres se dilatent. Ils sont sélectionnés pour réaliser des soudures à matériaux réduits. L’alliage bismuth-plomb, respectivement 56 % et 44 %, est adopté dans les soudures à froid dû à son point de fusion relativement bas de 125 °C. Son mélange avec l’étain (Sn42Bi58) est exploité en électronique pour produire des soudures à bas point de fusion dépourvues de plomb (RoHS).
L’alliage d’Arcet, connu sous le nom d’alliage de Darcet, est composé de 49,2 % de Bi, 32,2 % de Pb et 18,4 % de Sn. Cet alliage a la particularité de fondre à une température très basse, avant même 97 °C.
Le métal de Wood est un mélange fondant dans l’eau chaude à environ 70 °C, composé d’environ 50 % de Bi, 25 % de Pb, 12,5 % de Cd et de Sn. Comme l’alliage de Newton, il a la propriété d’absorber les rayonnements.
Les alliages de Rose et de Field contiennent du bismuth et d’autres métaux tels que le plomb, l’étain, le cadmium et l’indium. Avec le métal de Wood, ils sont souvent utilisés en raison de leur point de fusion très bas et leur capacité à être utilisés comme fusibles en électricité, à l’instar de l’association bismuth-étain (40 % / 60 %).
Ces alliages sont des matériaux particulièrement adaptés à la protection contre les incendies. Par exemple, ils peuvent servir de coupe-circuits électriques, ou déclencher une vanne de sécurité anti-incendie (déclencheur de chute d’eau) en cas de température élevée, de fumées chaudes ou de vapeurs. Dans les systèmes d’extinction automatique à eau, comme les sprinklers, un mélange très fusible est souvent utilisé pour obstruer une vanne et empêcher l’eau de s’écouler jusqu’à 47 °C. L’alliage employé comme joint verre-métal (49,2 % Bi, 22 % Pb, 18 % Zn, 8 % Sn, 5 % Ca, 4 % Hg), qui fond à 45 °C, partage ces mêmes propriétés.
Les dispositifs d’extinction automatique (têtes arroseuses) pour les systèmes sprinklers ou les vannes de sécurité pour les cylindres de gaz comprimé (prises de sûreté) sont fabriqués à partir d’alliages de Bi.
Ses alliages avec le manganèse, ainsi que l’oxyde de bismuth, servent dans la fabrication des aimants permanents à champ coercitif élevé.
Il est choisi comme alternative au plomb dans le domaine de la plomberie. Il est utilisé en tuyauterie et en soudure. Les alliages de ce métal sont actuellement à l’étude pour réaliser des assemblages techniques à la place de son homologue.
Il est souvent adopté dans la fabrication d’éléments thermo-électriques grâce à sa capacité à convertir directement une différence de température en électricité. Mélangé avec le tellure ou l’antimoine (Bi2Te3, Bi1–xSbx), il acquiert des capacités semi-conductrices, nécessaires dans la fabrication des thermocouples.
En industrie chimique, céramique et verrière
Dans la fabrication de verre et de céramique, il est appliqué comme pigment blanc sous forme d’oxynitrate ou de sous-nitrate de bismuth (BiONO3), et comme pigment vert-jaune par l’orthovanadate de bismuth (BiVO4).
Le borosilicate de bismuth est appliqué en émaillage pour améliorer la durabilité et la résistance à l’usure des surfaces émaillées.
Les verres optiques, également appelés verres Flint, sont des verres spéciaux utilisés pour la fabrication d’objectifs optiques, de télescopes et d’autres instruments d’optique. Ils renferment du phosphate de bismuth.
Le carboxylate de Bi sert de siccatif dans l’industrie des peintures, en remplacement au plomb. Il agit comme agent accélérateur du processus de séchage. Ses oxydes sont autant employés dans l’industrie des peintures comme pigments. L’oxyde Bi2O3 produit une teinte jaune et est opté pour colorer les grues de chantier. L’oxychlorure BiOCl produit une teinte blanche et sert dans la fabrication des perles artificielles. Ces pigments sont appréciés pour leur stabilité chimique et leur résistance à la décoloration.
En pyrotechnie, il est utilisé comme combustible sous forme de triphényl-bismuth (TPB) et de tris (ethoxyphényl) bismuth (TEPB). L’exportation de ces composés est souvent réglementée et soumise à autorisation dans de nombreux pays.
Le BiCl3 est un catalyseur efficace pour différentes réactions chimiques, notamment dans la production des fibres acryliques et divers polymères. Par ailleurs, le bismuth agit comme ignifugeant et retardateur de flamme dans les papiers peints ou les polymères, et limite ainsi leur inflammabilité et la propagation du feu en cas d’incendie.
Dans l’industrie du caoutchouc, le sesquioxyde de bismuth (Bi2O3) est souvent adopté comme catalyseur de vulcanisation. Il s’agit du processus chimique qui permet de renforcer les propriétés mécaniques du caoutchouc.
Dans l’industrie nucléaire, l’hydroxyde et le phosphate de bismuth sont utilisés comme réactifs de séparation pour extraire le plutonium de l’uranium irradié.
Il est appliqué comme dopant pour le germanium et le soufre dans la fabrication de semi-conducteurs. Les hydrures de bismuth sont utilisés pour modifier les propriétés électriques du matériau, mais ils sont instables, volatils et très réactifs.
Ce métal est présent dans l’industrie des pesticides, notamment dans la composition de certains fongicides. Cependant, il est considéré comme un élément qui ne peut être décomposé naturellement dans l’environnement. Par conséquent, son application dans les pesticides peut entraîner une accumulation du métal dans le sol et dans les eaux environnantes, et avoir des conséquences néfastes sur l’environnement et la santé humaine.
En médecine, soin du corps et parapharmacie
Pendant plusieurs siècles, la médecine traditionnelle a utilisé les sous-nitrates et les sous-carbonates de bismuth, dans la préparation des médicaments et en parapharmacie. Le nitrate Bi(OH)2NO3, un composé insoluble dans l’eau, possède des propriétés antiseptiques. Il a été adopté en médecine comme pansement gastrique sous le nom de « magisterium bismuti » ou magistère de bismuth. Il était généralement pris par ingestion, pour traiter l’ulcère gastro-duodénal et divers problèmes digestifs tels que les colites, la diarrhée, la constipation et les entérites. Ses propriétés calmantes et antiseptiques sont considérées comme efficaces pour les blessures et les brûlures (pansements), ainsi que contre les infections cutanées. Il trouvait aussi un usage important dans le traitement de la syphilis.
Pour garantir son application en médecine, le bismuth doit être sous sa forme chimique pure. Toutefois, cette pureté est difficile à atteindre dans la mesure où son minerai renferme des substances hautement toxiques telles que le tellure, l’argent, l’arsenic ou le plomb.
Le surdosage de ce métal peut causer des intoxications médicamenteuses graves telles que sa métabolisation dans le corps ou des dommages au cerveau. Ces effets peuvent survenir lorsqu’il est ingéré ou inhalé en quantités excessives, ou lorsque le traitement médicamenteux est prolongé au-delà de la dose recommandée. En France, l’application du bismuth sous forme soluble et insoluble a même été interdite.
Certaines formes dérivées de la chimie organique du bismuth sont encore appliquées en médecine. Ces produits ne sont toutefois présents qu’en très faible quantité et sous forme pure et insoluble dans l’eau, afin de minimiser les risques de toxicité. Les sels de bismuth insolubles, ayant une absorption digestive limitée, sont encore maniés pour fabriquer des pansements. La capacité couvrante élevée des nitrates et des carbonates basiques, ainsi que leurs propriétés antiacides et antiseptiques leur permettent de réduire considérablement les fermentations gastriques. Lorsqu’elles se divisent, ces couches salines développent une forte capacité à attirer les gaz soufrés (adsorption chalcophile), et le bismuth peut facilement les fixer dans le tube digestif. Par la suite, il se transforme en sulfure Bi2S3 qui donne une couleur noire aux selles. Il a la particularité d’être opaque aux rayons X. Par conséquent, le pansement doit être retiré avant une analyse radiologique afin que les substances de contraste nécessaires à l’examen circulent parfaitement. Cet élément est encore recommandé en petite quantité par certains oligothérapeutes contre les infections virales qui entraînent des infections douloureuses (laryngite ou pharyngite). Il est aussi appliqué dans le traitement de la leucémie.
Le bismuth possède une toxicité naturelle qui lui confère des propriétés désinfectantes. C’est pourquoi il a été utilisé dans certains désinfectants, notamment sous forme de sesquioxyde. Cependant, en raison de son impact négatif sur l’environnement et de sa persistance dans les écosystèmes, il a été remplacé par des alternatives moins toxiques et plus respectueuses de l’environnement. Le (sous)succinate de bismuth possède une action biocide, c’est-à-dire qu’il peut tuer les micro-organismes qui causent des maladies ou empêchent leur croissance. Il est administré par voie rectale (sous forme de suppositoire) pour traiter les angines, ainsi que par voie parentérale (injection) pour traiter la syphilis. Certains traitements par antibiotiques peuvent encore inclure l’application de dérivés liposolubles de bismuth tels que le butyl-thiolaurate de bismuthyle ou l’iodobismuthite de quinine. Ils sont administrés par voie intramusculaire à des intervalles de temps précis.
Le bismuth subsalicylate (BSS) est une substance active du Pepto-bismol, pris contre les troubles gastro-intestinaux, tels que la diarrhée, les nausées et les vomissements. Elle est considérée comme insoluble dans l’eau. Cependant, en 2005, des études ont montré que lorsque le BSS entre en contact avec des jus de fruits, des substrats contenant des thiols ou de l’acide ascorbique, il peut devenir soluble. Cette forme est la plus efficace contre Clostridium difficile, la bactérie qui provoque une diarrhée sévère chez les patients hospitalisés sous antibiotiques. Par ailleurs, des recherches sont en cours pour améliorer ses propriétés contre la bactérie clostridium.
En cosmétique, l’oxychlorure (BiOCl) et l’oxynitrate de bismuth (BiONO3) sont ajoutés aux produits (rouges à lèvres, laques pour ongles et ombres à paupière) pour leur donner une brillance nacrée. Le citrate de bismuth se retrouve à 0,2 % dans une lotion de repigmentation des cheveux. Il agit en se fixant sur les protéines de la kératine présentes dans les cheveux, et grâce au soufre présent dans le produit. Des dérivés de bismuth se retrouvent encore dans la composition des déodorants dans quelques pays qui n’ont pas adopté le principe de précaution. En ce qui concerne la France, ce dernier a été reconnu en 1974.
Recyclage
En raison de sa toxicité et de sa rareté, il est plus écologique de recycler le bismuth plutôt que de le jeter. Cependant, la récupération de cet élément dans de nombreux produits reste difficile, tels que les peintures, les fibres, les additifs, les munitions et les pesticides.
Le bismuth métal est souvent utilisé dans des alliages comme catalyseur. Le recyclage sous cette forme se fait actuellement avec des scraps d’alliage ou des alliages à forte teneur.
Commercialisation
En 2010, la Chine est devenue le plus grand producteur de bismuth, représentant plus de 60 % du marché mondial. Les réserves principales se trouvent dans son territoire, soit environ 75 % des 340 à 350 mille tonnes reconnues et exploitables dans le monde. Elles sont estimées suffisantes pour encore quarante ans, à une fréquence de consommation fixe de 9 000 tonnes par an.
En 2014, la France est considérée comme un importateur net de bismuth selon les douanes françaises, avec un prix moyen à l’importation de 17 000 € par tonne.
Sa forme très pure avoisinait les 40 $ pour 100 grammes avant 2010. Cependant, en l’achetant en grande quantité dans une forme moins pure, le prix du kilogramme descend entre 10 à 30 dollars.
Toxicité pour l’environnement
Les effets toxiques du bismuth sur l’environnement sont peu connus, et ceux de ses isotopes le sont encore moins. En revanche, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) a élaboré une fiche pédagogique sur le 209Bi pour sensibiliser le public aux risques liés à cet isotope.
Le bismuth métallique est considéré comme le moins nocif des métaux lourds et ses effets sur l’être humain sont temporaires. Cependant, les données sur son écotoxicité sont insuffisantes, en particulier les formes organométalliques et/ou inhalables ou volatiles (méthylbismuth).
En 2008, Von Recklinghausen et ses collaborateurs ont mené des expériences in vitro qui ont révélé des similarités entre le bismuth et le mercure. Ces éléments sont absorbés par les cellules humaines et causent des effets toxiques aux érythrocytes, lymphocytes et hépatocytes, en particulier le triméthyl-bismuth Bi(CH3)3 ou bismuth méthylé. Les résultats ont montré que les érythrocytes et les lymphocytes étaient les plus touchés par cette variété après une ou 24 heures d’exposition. Ses effets sont génotoxiques, et peuvent entraîner des mutations génétiques. En revanche, sous forme de citrate ou de glutathion, il ne montre pas d’effets toxiques pour l’ADN. Tout comme le mercure, il subit facilement une méthylation dans des sédiments peu oxygénés en réaction aux bactéries du groupe des methanobacteria/methanoarchaea.
Des études passées ont déjà révélé que la forme méthylée du bismuth peut provenir d’une partie de la flore intestinale du côlon humain. Les variations d’intoxications chez l’Homme ou l’animal de laboratoire pourraient s’expliquer par la variété des microbiotes, bien que cela n’a pas encore été confirmé. Les chercheurs ont décrété que cette forme rend le sel de bismuth primaire beaucoup plus toxique. De ce fait, des lésions chromosomiques (sans dérivé réactif de l’oxygène) se forment dans les cellules humaines. Cette toxicité est due à une inhibition de la réparation de l’ADN ou à une interaction directe avec l’ADN.
Toxicité pour l’Homme
Les effets toxiques du bismuth sur le corps humain sont peu connus. Antoine Béchamp, professeur à Montpellier, a signalé dès 1860 dans sa thèse de médecine que les sels de bismuth étaient nocifs.
Le salicylate de Bi a été testé comme remède contre la syphilis chez l’être humain. Son injection a eu comme effets secondaires des dégâts sur le foie et les reins, ainsi que des dommages neurotoxiques. Les patients présentaient une gingivostomatite sous forme de taches noires sur les gencives (ligne de bismuth), une mauvaise haleine et une salivation excessive. Des recherches récentes par observations au microscope électronique ont révélé que les cellules épithéliales tubulaires proximales du rein, exposées au bismuth, ne meurent pas naturellement, mais par nécrose. La z-VAD-fmk est un inhibiteur de l’enzyme caspase-3, impliquée dans le processus de mort cellulaire programmée ou apoptose. Dans le cas des cellules NRK-52E exposées au Bi, l’inhibition de la caspase-3 par la z-VAD-fmk n’empêche pas la mort cellulaire, contrairement au cisplatine. Les études ont montré que les effets toxiques de cet élément sur les reins ne sont liés ni à la dysfonction mitochondriale ni à l’induction de radicaux libres. Les indices précoces de dommages et le déplacement anticipé de la N-cadhérine suggèrent qu’il attaque directement les fonctions de la membrane des cellules épithéliales tubulaires proximales du rein, entraînant ainsi leur apoptose. Les effets nocifs du bismuth sont réversibles après quelques mois d’exposition, contrairement aux conséquences permanentes des autres métaux lourds. Toutefois, ses retombées sur les embryons ou les fœtus, ainsi que sur les travailleurs n’ont pas été cherchées.
Des études ont montré que cet élément peut traverser la barrière hématoencéphalique. Il s’accumule dans plusieurs parties du cerveau, dont les neurones et les cellules gliales du cervelet, du néocortex, du thalamus ou encore de l’hippocampe. En effet, ces résultats ont été découverts suite à l’autopsie de personnes décédées d’intoxication au bismuth, et au traçage histochimique effectué sur des animaux. Il est plus présent dans les parois des vaisseaux sanguins du cervelet que dans celles des autres parties du cerveau. Il se retrouve dans les cellules, principalement dans les lysosomes, mais aussi dans les membranes basales de certains vaisseaux sanguins.
Le bismuth est capable de se déplacer d’un axone à l’autre. Cette capacité a été observée après son injection dans le triceps d’un rat. Une accumulation de Bi a été retrouvée trois jours plus tard dans les motoneurones qui relient le muscle à la moelle épinière, ainsi que dans les cellules des ganglions de la racine dorsale, près de la zone d’injection. En 2002, une étude a été menée pour examiner l’effet du citrate de bismuth sur les macrophages présents à la base et aux marges d’ulcères. Les résultats ont montré qu’il se regroupait dans les lysosomes, organites intracellulaires impliqués dans la dégradation de différentes molécules. Cette agglomération peut conduire à une rupture des lysosomes et conduire à la mort des cellules (apoptose). Une autre étude affirme que le Bi accumulé augmente à la fois avec la durée du traitement et la dose administrée. En 1996, ses propriétés d’induction puissante de la métallothionéine dans la cellule ont été découvertes. Il s’agit d’une protéine qui se lie aux métaux dans le processus de détoxication de la cellule. Le bismuth est responsable de la production de diverses enzymes glycolytiques. Sa présence dans la cellule conduit à une diminution de l’oxygène disponible pour la cellule, et active un stress de type « hypoxie ». L’apoptose des cellules en réponse au Bi peut résulter de l’interaction entre les protéines Bnip3 et BCL2/adénovirus E1B 19 kDa, connue pour réguler la mort cellulaire causée par l’hypoxie.
L’inhalation de ses vapeurs conduit à une intoxication par voie respiratoire. Le bismuth émet des vapeurs toxiques à basse température, et sa forme méthylée à température ambiante.
Lorsqu’il est ingéré, une partie passe à travers la barrière gastro-intestinale. La quantité absorbée varie selon la forme ingérée et les caractéristiques individuelles de chaque personne.
Ses substances qui se lient aux métaux lourds (chélateurs), à savoir la D-pénicillamine et son dérivé N-acétyl, sont efficaces dans le traitement de l’intoxication au citrate de bismuth chez la souris par voie intrapéritonéale.
A l’ingestion, il n’est détectable dans le plasma qu’à des concentrations significatives, généralement inférieures à 1 ron 10. Il est partiellement absorbé par le tube digestif, mais une grande partie est éliminée dans les selles.
Le bismuth a été utilisé avant 1974 à des doses dangereuses, presque mortelles, sans interruption ni limite de temps, malgré les avertissements émis depuis plus d’un siècle. En 1910, des précautions d’emploi ont été édifiées, notamment en précisant que son usage soit discontinu. Les laboratoires et les médecins ont par la suite encouragé son utilisation thérapeutique, entraînant une augmentation de sa prescription. De 1964 à 1974, la consommation de bismuth a doublé pour atteindre 800 tonnes par an en France.
À partir de 1974, l’épidémiologie des effets du bismuth a commencé à être mieux comprise en France, grâce à l’étude menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, à travers le programme « maladies transmissibles et accidents toxiques ». Elle a examiné 942 cas d’intoxication à l’ingestion du Bi décrits dans la littérature médicale, dont 72 se sont soldés par la mort. Les recherches ont révélé l’implication de tous ses sels dans les intoxications graves. Par ailleurs, son niveau de dangerosité n’a pas été pris en compte de manière appropriée. Ces recherches ont permis d’établir que la prise de ce métal comme médicament était responsable d’encéphalopathies. Elles se présentent en deux phases distinctes, dont la première, la phase prodromique, est marquée par l’asthénie, l’insomnie, les céphalées et la perte de mémoire. Arrive ensuite la phase aiguë, caractérisée par des troubles neurologiques graves (semblables aux symptômes provoqués par le plomb ou le mercure) tels que la dysarthrie, l’ataxie, les troubles de la mémoire, les états confusionnels, la désorientation, l’agitation, les tremblements, les troubles de la marche, les myoclonies, les hallucinations et les convulsions. Après l’arrêt de la prise de bismuth, une amélioration clinique est généralement constatée en quelques jours. Certains symptômes persistent toutefois, à l’instar des troubles de la mémoire et/ou les céphalées, des troubles du sommeil, et de l’asthénie.
Les fortes doses de ce métal dans les médicaments ont été interdites par le ministère de la santé français suite à l’identification de milliers de cas de contamination en France et en Australie. Certains pays l’utilisent encore en petite quantité en oligothérapie. Les dérivés du « sous-citrate de bismuth-colloïdal » tels que le citrate DENOL* et le complexe citrate de bismuth-ranitidine sont choisis par certains pays pour traiter certaines affections ORL. Ces formes sont prescrites uniquement pour traiter les ulcères gastroduodénaux. Ses propriétés toxiques permettent d’éliminer efficacement la bactérie responsable de cette maladie (Helicobacter pylori), qui est difficile à éliminer avec d’autres traitements. Les doses de bismuth présentes dans le médicament sont bien plus faibles que celles prescrites avant 1974. Chaque phase de traitement dure un mois, et doit être suivie d’une pause de deux mois minimum avant de poursuivre.
Indicateurs d’exposition chez l’Homme
Les analyses classiques de sang et d’urine ne révèlent que des contaminations récentes au bismuth. En effet, il est éliminé en quelques jours via les urines après la fin de l’exposition. En revanche, comme pour le plomb, l’antimoine et l’arsenic, des traces se retrouvent dans les cheveux s’ils ne sont pas coupés.
Histoire chimique et origine étymologique
L’origine étymologique du mot allemand « das Wismuth » est attribuée à un étymon double de l’allemand « weisse Masse », qui signifie « masse blanche », ou « weisse matte », traduit comme « matte blanche ». Le nom wismuth apparaît dans le livre Ein nützlich Bergbüchlin, destiné aux apprentis maîtres-mineurs, publié vers 1527. Le minerai de bismuth y est appelé wißmad ärcz, signifiant minerai blanc (wissmatt ou wissmad), pour indiquer qu’il est souvent relié aux veines de cobalt argentifères. Georgius Bauer, aussi connu sous le nom d’Agricola, l’a appelé cinereum plumbum ou plomb cendré sous l’influence de l’alchimie. Il a suggéré que le bismuth natif se forme par une réaction entre un métal plus dense (plomb) et des cendres carbonées moins denses. Cette réaction se produit à l’air libre ou dans le mélange de minéraux contenant des sulfures ou des oxydes, et conduit selon lui à la formation de bismuth d’apparence métallique.
Sa forme native, ou le métal lourd, a été désignée sous le terme bisemutum en latin médiéval et dans la langue alchimique. Ce terme apparaît dès 1450 avec wismutum, et vers 1530 avec bisemutum. Le terme wesemut est attesté en moyen-allemand en 1390. Une hypothèse suppose qu’il dérive d’un terme d’origine arabe et/ou grec, traduit dès le IXe siècle à partir du livre de référence de Dioscoride, De materia medica, ou grâce à des spécialistes miniers. Une autre avance que b[i]sīmūtīyūn, serait une adaptation du grec ancien ψιμύθιον psimýthion signifiant « blanc de plomb ». Une dernière suppose que le mot vient de bi iṯ’mid ou bi’ ’ithmid, qui signifie littéralement « semblable à l’antimoine ». Cette alternative suppose que la similitude et la différence entre le bismuth et l’antimoine natif étaient préalablement connues. Ces dernières alternatives sont considérées comme les plus probables. Deux autres éventualités sont toutefois proposées par la tradition minière. La première met en relation l’origine du mot avec le site minier de Saint-Georges « in der Wiesen » situé près du Schneeberg dans l’Erzgebirge saxon au XVe siècle. Ce gisement très actif produisait de la matte ou de la masse de bismuth. La seconde suggère que la racine wis(se)mat ne désigne qu’une masse ou une matte blanche. Ces étymologies dites populaires ou pseudo-savantes, bien qu’imprécises, rappellent les pratiques minières anciennes.
Le bismuth est largement mentionné dans les écrits de Basilius Valentinus, à l’époque connu comme moine bénédictin, pseudonyme possible de l’éditeur allemand Johann Thölde (XVIIe siècle). Malgré son association avec l’alchimie, le bismuth est principalement connu des experts miniers et des spécialistes en métallurgie. C’est pourquoi ses autres appellations sont reliées à d’autres éléments chimiques tels que le plomb cendré ou le « plumbum cinearum » en latin, l’étain de glace ou l’étain gris, l’antimoine blanc, la weisse matte, ou encore le vrai démorgon, la glaure, et la nymphe.
Henri Lammens suggère que la langue arabe peut fournir une origine linguistique. Selon lui, le bismuth vient du mot أُثمُد (othmod) / إِثمِد (ithmid), traduit au sens littéral comme antimoine.
Finalement, la connaissance du bismuth a été promue au XVIIIe siècle par les scientifiques Carl Wilhelm Scheele, Jean Hellot, Claude François Geoffroy, Johann Heinrich Pott, et Torbern Olof Bergman.
Le bismuth a souvent été confondu avec d’autres métaux lourds tels que l’antimoine, le plomb ou le zinc par les potiers d’étain ou les alchimistes. Les scientifiques se sont servis de cette confusion pour mieux avancer dans leurs recherches.
Le tain provient d’un mélange de bismuth, de plomb et d’étain, qui est réduit en feuille puis appliqué sur une surface miroir.
En 1830, la région minière de Saxe lance la première production industrielle de bismuth. Vers 1901, le bismuth extrait de l’alliage du plomb doux est distribué en grande quantité en tant que sous-produit. Entre 1918 et 1939, ses alliages ont été largement utilisés, notamment pour les besoins militaires.
Les médicaments thérapeutiques contenant du bismuth dépassent les 150 tonnes par an en 1953. Le ministère de la Santé français ne prend des mesures qu’en 1974, suite aux effets négatifs sur les patients. Son utilisation en pharmacie a été réduite à moins de 10 tonnes en 1979. L’application de composés à base de bismuth comme retardateurs de flamme dans l’industrie plastique, ainsi que comme pigments a toutefois stimulé la croissance de l’industrie du bismuth.