Imprégnation de la population
L’exposition à l’arsenic peut varier considérablement en fonction :
- du contexte biogéographique et industriel ;
- du métier ;
- du mode de vie ;
- de l’alimentation (notamment la consommation de fruits de mer, de poissons marins carnivores et de gibier) ;
- du contexte géologique et environnemental.
Du point de vue de la santé publique, l’embryon, le fœtus et la femme enceinte sont les plus vulnérables aux risques liés à l’arsenic.
En France, le programme national de biosurveillance comprend un volet périnatal qui a évalué l’imprégnation des femmes enceintes par l’arsenic. L’étude a été réalisée auprès d’une cohorte de 4 145 femmes ayant accouché en France en 2011, hors Corse et TOM. Les résultats du dosage urinaire de 990 femmes enceintes arrivant à la maternité ont confirmé l’omniprésence de l’arsenic dans leur organisme et l’environnement.
Les niveaux mesurés étaient similaires à ceux observés chez les femmes en France et dans plusieurs pays ou régions d’Europe et d’Australie. La moyenne géométrique est de 11,0 μg/:, soit 15,1 μg/g de créatinine. Cependant, ils étaient plus élevés que les niveaux observés aux États-Unis et au Canada chez la population adulte générale. Cette étude a confirmé une surimprégnation des Français par l’arsenic total. Ce constat a déjà été mis en évidence en 2007 par une étude nationale nutrition santé menée par Santé publique France. Cette omniprésence semble être en grande partie liée à une consommation plus élevée de produits de la mer. Ces derniers constituent une source reconnue d’exposition à l’arsenic.
Toxicocinétique
La toxicocinétique et la métabolisation de l’arsenic dans l’organisme dépendent fortement de plusieurs facteurs, dont :
- sa forme chimique (organique ou minérale) ;
- sa valence (trivalent ou pentavalent) ;
- sa forme physique (vapeur, nanoparticule, aérosol, particule, etc.) ;
- la voie d’incorporation (orale, pulmonaire, percutanée, etc.).
En moyenne, dans un milieu de travail exposé à cet élément, environ 80 % de l’arsenic ingéré passe dans le sang. Il est de 40 à 60 % pour l’arsenic inhalé sous forme de poussières et de vapeurs. Il existe également une faible contamination percutanée.
Comme avec d’autres toxiques, il existe des différences interindividuelles dans la métabolisation de l’arsenic. Elles sont liées à la santé, à l’âge et au sexe de l’individu, probablement en partie sur des bases génétiques.
Métabolisation
La métabolisation et l’élimination de l’arsenic varient également selon sa forme chimique. Par exemple, sa forme inorganique est principalement métabolisée par la voie méthylation. Elle produit des métabolites organiques plus toxiques que l’arsenic inorganique lui-même.
Une fois qu’il pénètre dans l’organisme, il se distribue rapidement et se fixe aux protéines. Il a tendance à s’accumuler dans certains organes tels que le foie, la peau, les phanères et les poumons. Il peut y être détecté longtemps après la contamination. Sa demi-vie sanguine est triphasique, soit de deux à trois heures, 30 heures ou 200 heures.
La métabolisation de l’arsenic varie selon l’espèce chimique. Par exemple, l’arsenic pentavalent est métabolisé en arsenic trivalent. Il sera ensuite méthylé par oxydation pour former de l’acide monométhylarsonique (MMA). Ce MMA trivalent est hautement toxique et sera ensuite transformé en acide diméthylarsinique (DMA) pentavalent et peu toxique.
En médecine du travail, les métabolites de l’arsenic recherchés dans les analyses d’urine comprennent généralement :
- l’arsénite de cuivre ;
- l’arsénite de sodium ;
- le pentoxyde de diarsenic ;
- le trichlorure d’arsenic ;
- le trioxyde de diarsenic.
La demi-vie des métabolites de l’arsenic varie de deux à six jours, selon l’espèce chimique à l’origine.
Environ 70 % des composés arsénieux inorganiques absorbés sont éliminés dans les urines. La moitié de l’arsenic est excrété en 48 heures et 90 % en six jours, sous forme de dérivés monométhylés (notamment d’acide monométhylarsonique). Ils représentent environ 25 % de la totalité). Il est aussi présent sous forme de dérivés diméthylés (acide diméthylarsinique, représentant environ 50 % de la totalité). Le reste est sous forme inchangé. La bile transporte également l’arsenic vers l’intestin. Comme pour le plomb et le mercure, le sang exporte également l’arsenic vers les phanères (poils, cheveux). Il peut persister après leur chute.
Intoxication aiguë
L’exposition à l’arsenic peut provoquer des symptômes immédiats tels que des vomissements. Elle peut aussi être à l’origine de douleurs abdominales et œsophagiennes ainsi que des diarrhées sanguinolentes. Celles-ci peuvent conduire à un état de choc, voire à la mort.
Intoxication par exposition chronique
L’arsénicisme se réfère à l’exposition à de faibles doses d’arsenic, souvent via la consommation d’eau contaminée par exemple. Les symptômes incluent :
- la mélanodermie ;
- l’hyperkératose des mains et des pieds ;
- la perte de cheveux ;
- la polynévrite douloureuse ;
- la striure des ongles.
Il constitue également un facteur de risque de plusieurs types de cancer (cancers du poumon, de la peau, de la vessie, du rein…). Il peut aussi provoquer des maladies cardiovasculaires et probablement des maladies respiratoires.
Les premières manifestations visibles de l’arsénicisme sont généralement cutanées, avec une augmentation de la pigmentation. Le cancer peut mettre plus de 10 ans à se développer. L’arsenic est également utilisé comme agent de conservation. Cela a conduit à des doutes sur l’empoisonnement de Napoléon Ier. Il y a une forte concentration d’arsenic dans ses cheveux.
Selon Manote, l’absorption de cet élément par la peau ne présente apparemment pas de risque pour la santé. L’empoisonnement à l’arsenic a été impliqué dans diverses affaires judiciaires, dont les affaires Marie Lafarge et Marie Besnard.
Perturbation endocrinienne
L’arsenic est un perturbateur endocrinien puissant. Il peut affecter la santé humaine et animale à des doses aussi faibles que 10 à 50 ppb en laboratoire. Il cause aussi des dégâts à des doses plus faibles sur des cultures cellulaires. Cette capacité en fait une préoccupation majeure pour la contamination de l’eau potable et de l’environnement dans certaines régions du monde.
L’arsenic perturbe les récepteurs stéroïdes tels que les hormones androgènes, la progestérone, les minéralocorticoïdes et les glucocorticoïdes. Il perturbe également la régulation des gènes à des taux aussi bas que 0,01 µM (environ 0,7 ppb). Même de très faibles doses ont été associées à une augmentation de la transcription des gènes dépendant d’un médiateur hormonal. Des doses légèrement plus élevées, mais non cytotoxiques, ont été associées à une inhibition de la transcription. Cela pourrait expliquer en partie les propriétés cancérigènes de l’arsenic. Chez les rats, des analyses histologiques et moléculaires ont montré que l’arsenic inhibe le développement de la prostate à la prépuberté. Il compromet la maturation structurelle et fonctionnelle de la prostate chez les rats pubertaires. Cela se produit même à des doses aussi faibles que 0,01 mg de NaAsO2 par litre d’eau de boisson à la prépuberté.
Écotoxicologie de l’arsenic
L’arsenic est un oligo-élément à très faible dose. Certains organismes ont des mécanismes d’adaptation à sa toxicité à faible dose. Cependant, il peut être un contaminant naturel des nappes phréatiques (par exemple au Bangladesh). Cet élément est considéré comme polluant au-delà d’un seuil d’écotoxicité. Ceux-ci varient en fonction de sa forme chimique et de la nature du sol. La biodisponibilité et la bioaccumulation de l’As sont également des facteurs importants pour sa toxicité. Ils dépendent du contexte pédologique et de la spéciation de l’arsenic. Cette spéciation est très complexe dans l’environnement en raison d’interconversions possibles et fréquentes entre les espèces chimiques. Elles sont contrôlées par des processus biotiques et abiotiques.
Environ un tiers de la population mondiale utilise de l’eau potable provenant de nappes phréatiques. Environ trois cents millions de personnes tirent leur eau de nappes fortement polluées par du fluorure et de l’arsenic et. Ils sont souvent d’origine naturelle et proviennent des roches et des sédiments lessivés par l’eau. En 2008, l’Institut suisse de recherche de l’eau Eawag a développé une nouvelle méthode. Elle a permis d’établir des cartes des risques des substances toxiques géogènes dans les eaux souterraines. Celles-ci permettent de mieux cibler les sources à contrôler. En 2016, le groupe de recherche a mis à disposition ses connaissances sur la plateforme GAP (Groundwater Assessment Platform). Il permet aux spécialistes du monde entier :
- de télécharger leurs propres données de mesure ;
- de les visualiser ;
- de créer des cartes de risque pour les régions de leur choix.
La plateforme sert également de forum d’échange de connaissances. Celles-ci contribuent au développement de méthodes visant à éliminer les substances toxiques de l’eau.
Origines
La présence de l’arsenic est liée au contexte et aux processus biogéochimiques et géochimiques. Son origine peut être naturelle et souvent associée à l’or (Au), à l’argent (Ag), au cuivre (Cu) et au sélénium (Se). Sa présence à forte dose dans les sédiments ou les sols est généralement due à des activités industrielles :
- les mines ;
- la métallurgie ;
- la production de pesticides ;
- l’agro-industrie (utilisation massive de pesticides arséniés dans les rizières, les vergers, les cultures de coton et les golfs).
De nombreux sols industriels sont pollués par l’arsenic, ainsi que les nappes phréatiques lorsqu’elles sont présentes. En France, 4 142 sites pollués ont été répertoriés selon les données disponibles. On a constaté que les sols de 488 d’entre eux (soit 12 %) sont pollués par l’arsenic. La pollution des nappes ne concerne que 257 sites pollués (soit 6 %).
Souvent, l’arsenic est aussi présent dans les sols agricoles ainsi que dans les jardins et vergers anciens. Il a été utilisé de façon massive par plusieurs dizaines de marques de pesticides.
Biodisponibilité
Aux États-Unis, une étude a été menée dans l’État du New Jersey au milieu des années quatre-vingt-dix. Elle devait évaluer les quantités d’arséniates de plomb et de calcium épandues sur les terrains de golf, les gazons et les champs. Les quantités épandues ont été estimées à 22 226 t pour l’arséniate de plomb. Elles sont de 8 165 t pour l’arséniate de calcium sur une période de 80 ans (de 1900 à 1980). Le total cumulé équivaut à environ 6 804 t d’arsenic pur pour cette période. Cela peut expliquer la forte teneur en plomb et en arsenic des sols de l’État. Cependant, les auteurs de l’étude soulignent que des évaluations de l’exposition humaine nécessitent des données sur la consommation locale de ces pesticides. Celles-ci doivent être rendues publiques.
Le méthanearséniate monosodique (MSMA) est l’une des molécules actives très utilisées, notamment sur les champs de coton. Il est utile pour le défanage chimique en pré-récolte et sur les terrains de golf. Cette molécule, tout comme le méthanearséniate disodique, a remplacé l’arséniate de plomb et l’arséniate de calcium, jugés trop toxiques. Elle est à la fois fongicide, désherbant et insecticide. Elle est largement utilisée aux États-Unis (1 800 t/an) sur les champs de coton et les terrains de golf.
En Amérique du Nord, l’arsenic a également été largement employé en forêt pour traiter les résineux contre les invasions de scolytes. Cette utilisation a peut-être été maladroite, car elle attire les scolytes et empoisonne leurs prédateurs.
Chez les animaux
Que ce soit à forte ou à faible dose, l’arsenic est extrêmement toxique pour les êtres humains et les animaux. Les effets sont les mêmes : si un animal ingère de l’arsenic dans sa nourriture, il mourra dans les douze heures qui suivent.
Chez les végétaux
Les zones minières sont souvent touchées par des pollutions à l’arsenic. Elles peuvent renforcer la toxicité d’autres contaminants tels que le mercure dans les anciennes mines de ce métal. L’arsenic est présent à l’intérieur et autour de certaines zones industrielles. Il peut polluer les sols et contaminer les cultures alimentaires et les animaux consommés par l’homme.
Au-delà d’un certain seuil de phytotoxicité, l’arsenic modifie le métabolisme des plantes. Il inhibe leur croissance, puis les tue, que ce soit des monocotylédones ou des dicotylédones. Les processus impliqués dans ces effets ne sont pas encore entièrement compris.
Toxicité variable selon le type de sol
Contrairement aux animaux, les formes inorganiques de cet élément chimique sont les plus toxiques pour les plantes. Leur toxicité varie considérablement selon le type de sol. Cette variation est due à la biodisponibilité de l’arsenic. Elle dépend de sa spéciation et de son degré d’adsorption sur l’argile, les complexes argilo-humiques ou la matière organique du sol. La marge entre la teneur naturelle du fond géochimique et le niveau toxique pour la plupart des plantes est parfois très étroite.
Par exemple, l’arsenic inorganique est cinq fois plus toxique dans les sables et les limons. La moyenne géométrique du seuil de phytotoxicité signalé par la littérature est de 40 mg/kg. Dans les sols argileux, la moyenne géométrique passe à 200 mg/kg, c’est pourquoi il n’y a pas de norme pour l’arsenic. Une norme devrait être adaptée au type de sol, ce qui rendrait sa mise en application difficile.
Développement d’une certaine tolérance
Certaines plantes ont développé une certaine tolérance aux désherbants à base de dérivés organiques d’arsenic. Il s’agit des fougères Pityrogramma calomelanos, Pteris vittata et Pteris cretica. Elles réduisent l’arséniate en arsenite, puis translocalisent les toxines vers les parties aériennes avec stockage vacuolaire. Sur un sol contenant 97 ppm d’arsenic, les feuilles de P. Vittata peuvent en bioaccumuler 7 000 ppm après 20 jours de croissance.
Sur certains terrils et crassiers miniers riches en arsenic, certaines souches d’herbacées survivent à des taux d’arsenic. Ils tueraient pourtant la plupart des plantes. Comme l’Agrostis tenuis, ces souches survivent à condition que l’arsenic soit sous forme d’arséniate et non d’arsénite. L’arséniate est la forme la plus lixiviable de cet élément chimique.
Dans les milieux arides, la Parkinsonia Florida bioconcentre l’arsenic, deux fois mieux dans les sols sableux que dans les sols limoneux. Cette plante a été proposée pour la phytoremédiation de l’As en région semi-aride.
À Löcknitz, en Allemagne, des chercheurs ont montré que certaines plantes peuvent absorber des quantités significatives d’arsenic, sans en mourir. Cela peut ensuite contaminer le gibier ou le bétail. Des champignons prélevés sur des sols fortement contaminés ont également montré des teneurs élevées en arsenic.
Certaines plantes peuvent bioaccumuler des quantités significatives d’arsenic lorsqu’elles poussent dans de l’eau polluée. Cela peut survenir facilement en aval des champs de coton, des tomates, des haricots et de nombreuses autres plantes comestibles. Des algues marines peuvent également bioconcentrer de l’arsenic, sans en mourir. Le cycle et la spéciation de l’arsenic ont également été étudiés pour certains légumes tels que la carotte.
Dans le sol
Dans certains cas, la présence de l’arsenic dans le sol est une séquelle de la guerre. Par exemple, en Belgique, un site en lisière d’une zone forestière a été fortement pollué par le démantèlement de munitions chimiques après la guerre. Il en va de même pour la forêt de Verdun. Une forte présence d’arsenic a été constatée sur un ancien site de démantèlement de munitions de la Première Guerre mondiale. Une entreprise avait brûlé le contenu chimique de plus de 200 000 obus chimiques allemands. Ils contenaient du chlorure de diphénylarsine et du cyanure de diphénylarsine.
Sensibilité
Dans le sol, pratiquement toutes les formes de vie sont sensibles à l’arsenic, surtout à ses versions inorganiques. L’exception concerne certaines bactéries extrémophiles. Des champignons microscopiques peuvent capter cet élément et faciliter ou freiner son transfert du sol aux plantes selon les cas. D’autres champignons peuvent bloquer l’arsenic hors du système racinaire dans le sol, apparemment via une protéine appelée glomaline. Certains auteurs préconisent de tester cette protéine pour dépolluer des sols contaminés par des métaux. C’est ainsi que la houlque laineuse ou quelques autres espèces peuvent résister à des sols pollués par l’arsenic.
Une équipe de l’Institut d’astrobiologie de la NASA a publié un article controversé. Elle affirme que la bactérie extrémophile GFAJ-1 avait la capacité d’intégrer l’arsenic dans son organisme à la place du phosphore. Il est son analogue chimique proche voisin dans le tableau de Mendeleïev.
Réduction de l’écotoxicité
Il est possible de réduire l’écotoxicité d’un environnement riche en arsenic en augmentant la teneur en oxyde de fer. Ce processus est également possible en ajoutant conjointement de la zéolite et une forte quantité de matière organique dans le sol. Des essais ont été menés sur un sol fortement contaminé par cet élément (34 470 mg/kg de sol). Les chercheurs ont ajouté jusqu’à 20 % de compost amendé avec de la zéolite et/ou de l’oxyde de fer.
La biodisponibilité de l’arsenic a ensuite été mesurée en examinant la quantité absorbée par du ray-grass (Lolium perenne L.). Il a été cultivé sous serre sur le sol traité. Le taux de présence dans le ray-grass a été réduit à 2 mg/kg (poids sec). Le compost contenait 5 % d’oxyde de fer ou 5 % de zéolite. Dans les deux cas, les plantes n’ont absorbé que moins de 0,01 % de la teneur totale en arsenic du sol. Dans le sol enrichi avec ces composts, la fraction soluble de l’arsenic a été réduite de 10 à 37 %. L’arsenic s’est distribué principalement dans la matrice de fer et d’oxygène des échantillons traités.
Présence dans les prairies
L’arsenic est parfois présent dans les prairies suite à des retombées aériennes et à des apports d’effluents ou de ruissellement. Tel est aussi le cas à la suite de l’utilisation antérieure des prairies pour le traitement des bois destinés à faire des piquets ou des poteaux. Une étude en Nouvelle-Zélande a porté sur 50 échantillons de sols de prairies permanentes, collectés près de Levin en 1989. Ces prairies à ray-grass (Lolium perenne) et trèfle rampant (Trifolium repens) avaient été polluées différemment par trois métaux (19 à 835 mg/kg de cuivre, 47 à 739 mg/kg de chrome et 12 à 790 mg/kg d’arsenic dans les cinq premiers centimètres du sol) suite au traitement de bois de pin (Pinus radiata). Les analyses ont montré que les Cu, Cr et As restaient corrélés entre eux et leur teneur diminuait avec la profondeur (mesures prises à 30 cm).
Dans des parcelles moyennement à hautement contaminées, le coton enfoui ne se décompose presque pas, indiquant une inhibition de l’activité des décomposeurs. Une autre indication était la disparition totale des lombrics (Lumbricus rosea et Aporrectodea rubellus) dans les parcelles moyennement à hautement contaminées. Cependant, aucune accumulation particulière de métaux lourds dans les tissus de vers de terre n’a été mise en évidence dans d’autres endroits.
Absence de lombricidés
L’absence de lombricidés était associée à une plus grande compaction du sol, ce qui le rendait asphyxiant et moins drainant dans les zones concernées. Dans les parcelles faiblement contaminées, une présence plus importante d’enchytréides (petits vers translucides habituellement associés aux sols asphyxiants, acides et pauvres) et de nématodes a été constatée. La diversité des nématodes était plus grande à faible (0-5 cm) ou moyenne (5-10 cm) profondeur que dans les parcelles témoins ou celles très contaminées. La proportion de “ravageurs” augmentait avec la contamination et la respiration du sol diminuait sur les sols contaminés.
La contamination réduisait également la nitrification, mais la totalité de l’azote minéral était transformée en nitrates après 14 jours. La sulfatase était l’activité enzymatique la plus réduite par les fortes contaminations. À 100 mg/kg, les Cu, Cr et As n’ont causé qu’une faible inhibition de l’activité biologique globale du sol, mais des effets plus délétères sur la vie du sol étaient observés à 400 et 800 mg/kg. Dans le cas présent où les apports en métaux ont cessé, les effets globaux sur la production fourragère semblent ne pas justifier une dépollution des sites.
Sous conditions anoxiques et réductrices (par exemple, en cas de remontée de nappe ou d’inondation), de l’arsenic pur peut être libéré des formes complexes ou organiques présentes dans le sol. Dans les rizières, cela peut être un facteur contribuant à la stérilité du riz.
Synergies
Bien qu’elles soient peu connues, des interactions entre l’exposition à l’arsenic et d’autres facteurs environnementaux existent. Par exemple, une exposition à cet élément chimique seule ne semble pas avoir d’effet mutagène sur l’organisme. Si elle est associée à des radiations UV de courte longueur d’onde, l’As agit comme un promoteur de tumeurs dans le processus de carcinogénèse.
Cinétique environnementale
La cinétique de l’arsenic dans l’environnement est influencée par plusieurs facteurs, dont :
- le contexte pédogéologique ;
- l’acidité des eaux lixiviantes ;
- la spéciation de l’arsenic.
En général, cet élément est largement dispersé et se trouve à des concentrations faibles dans l’environnement.
Les concentrations courantes de l’arsenic sont les suivantes :
- dans les sols: entre 2 et 15 mg/l ;
- dans l’eau: moins de 10 µg/l ;
- dans les aliments: moins de 0,1 mg/kg ;
- dans l’air: entre 0,005 et 0,1 mg/m3.
Les activités minières telles que l’extraction de plomb, de zinc, d’argent et de fer sont des sources de pollution par l’arsenic. Il en va de même pour la lixiviation et le ruissellement. Les processus de lixiviation et de ruissellement sont influencés par de nombreux facteurs. Par exemple, un sol pollué par un pesticide arsenical a été régulièrement arrosé pendant quatre mois. Cela a entraîné le relargage de 0,6 % de l’arsenic total du sol (40 mg) dans l’eau. Sur cette quantité relarguée :
- 7,5 % étaient en solution dans la colonne d’eau ;
- 44 % étaient dans les sédiments peu profonds ;
- 48,5 % étaient enfouis plus profondément dans le sédiment.
Dans la nature, les facteurs tels que le courant, la bioturbation et la bioconcentration peuvent modifier la cinétique de cet arsenic lessivé. Différentes formes d’arsenic ont été recherchées dans l’eau lixiviée et dans l’eau interstitielle des sédiments. Seule la forme d’arsenic appelée arséniate a été lessivée dans le sol. Dans l’eau du mésocosme, l’arséniate était l’espèce dissoute prédominante. Du DMAA et des espèces particulaires ont aussi été détectées. Dans les sédiments superficiels, l’arséniate était à nouveau l’espèce la plus abondante avec un peu de DMAA. Dans les sédiments profonds, l’arsénite était prédominant.
Golfs
Les composés organo-arséniés actuellement utilisés dans les golfs ont une faible toxicité pour les humains et les animaux à sang chaud. Cependant, leur décomposition dans l’environnement peut produire des sous-produits arsenicaux inorganiques hautement toxiques. Ils peuvent potentiellement s’accumuler ou se concentrer dans la chaîne alimentaire.
Vignes
Le métier de viticulteur était l’un des plus exposés aux pesticides arsenicaux. Ils ont été utilisés comme insecticides et fongicides sur les vignes pendant plus d’un siècle. Bien qu’ils aient été théoriquement interdits en 1973, leur utilisation s’est prolongée en France. Une dérogation a permis aux vignerons de continuer à les utiliser (jusqu’en 2001) pour traiter l’esca. Il s’agit d’une maladie fongique incurable du bois des ceps de vigne.
Risques alimentaires de l’arsenic
L’arsenic peut affecter les hommes de plusieurs manières, notamment par contamination des aliments ou pollution des nappes phréatiques. Le riz est une source fréquente d’arsenic alimentaire dans le monde. En mai 2013, l’Administration vétérinaire et alimentaire du Danemark (DVFA) a recommandé la limitation de la consommation de produits à base de riz chez les enfants.
Normes
La limite de concentration maximale de l’arsenic dans l’eau à 0,01 mg/l (10 µg/l). Elle a été fixée par l’OMS, l’EPA, Santé Canada, la France (en 2003) et l’UE. Cependant, cette norme s’applique uniquement à l’eau du robinet et aux eaux de source.