L’ispaghul : son origine, sa description, sa composition, sa culture, ses propriétés en phytothérapie, son usage et ses effets indésirables.

Historique de l’ispaghul

Depuis des millénaires, l’Homme a été séduit par les vertus du psyllium. Sa première description a été faite, au XVIIIe siècle, par Forsskål un explorateur européen. Il s’est basé sur un spécimen trouvé à Alexandrie, en Égypte. Cependant, l’histoire de l’ispaghul remonte bien avant cette période.

L’utilisation des graines de psyllium date de l’époque de l’Égypte ancienne. Les anciens Égyptiens avaient coutume de les employer pour soulager et résoudre les problèmes d’infections rénales, d’inflammations urinaires, de constipation et de diarrhée. Les graines d’ispaghul continuent d’être consommées en Égypte et la culture de cette plante connaît une intensification significative.

Au 1^er siècle, l’écrivain romain Pline mentionne la plante sous le nom grec de psyllion (ou cynoïs, ou cynomia, ou crystallion) dans l’ouvrage Histoire naturelle.

Au XII^e siècle, pour traiter rapidement les problèmes de digestion, Hildegarde de Bingen, Médecin de l’Église, fut la première à recommander la consommation du psyllium. Ainsi, cette appellation, associée au Plantago afra, s’est perpétuée jusqu’à nos jours.

En 1820, brièvement, la plante a été nommée Plantago ispaghula.

L’inde est le premier producteur de cette plante. Les graines étaient appliquées dans les médecines yunâni et ayurvédique, des pratiques médicinales millénaires. Grâce au climat favorable de ce pays, cette plante a pu prospérer pendant des siècles et continuer d’être cultivée à grande échelle.

Depuis de nombreuses années, le psyllium avait suscité beaucoup d’intérêt en Europe et aux États-Unis. Au fil du temps, il est devenu populaire.

Dans les années 1990, les autorités allemandes avaient reconnu ses bienfaits. À la même période, la marque américaine Kellogg avait réalisé une stratégie marketing majeure. Elle avait obtenu l’autorisation d’afficher sur l’emballage des céréales les avantages de la consommation d’ispaghul. Cela avait boosté la vente de ses produits. Les États-Unis sont désormais parmi les principaux acteurs de la production de Plantago ovata.

Dans les régions méditerranéennes, malgré la similarité de leurs propriétés, le psyllium noir a supplanté le psyllium blond. Toutefois, ces deux plantes peuvent cohabiter. En France et particulièrement en Provence, ce dernier est couramment cultivé. On peut également rencontrer des cultures de cette plante partout en Europe.

La plante figure parmi les ingrédients de nombreux produits transformés, y  compris les crèmes glacées et les desserts.

Description de l’ispaghul 

Le Plantago ovata est une plante herbacée annuelle qui présente une courte tige près du sol (subcaulescens) et recouverte de poils doux.

Les feuilles allongées et étroites sont disposées en rosette. Elles ont 3 à 15 cm de long et 1 à 6 mm de large. De forme obtuse à aiguë, elles sont marquées par trois nervures et sont abondamment couvertes de poils laineux.

La hampe florale, longue de 1 à 9 cm, porte un épi tubulaire court. Il prend une forme ovoïde lors de la maturation et porte une touffe de fleurs blanches lobées. La floraison du Plantago ovata a lieu en mai et juin.

Le fruit de l’ispaghul est une pyxide mesurant environ 4 à 5 mm qui s’ouvre par le milieu pour libérer deux graines. Ces dernières sont ovées, lisses et de couleur brun jaunâtre ou beige rosé. La face convexe est recouverte d’une tache brun clair. La fructification se passe en juin-juillet.

Sa courte tige, ses feuilles vertes linéaires, ses fleurs blanches et ses fruits beige-rosé confèrent à la plante une apparence attrayante.

Habitat et culture de l’ispaghul

Habitat

Le Plantago ovata est une plante qui pousse dans les régions désertiques de l’hémisphère nord, mais sa répartition géographique est vaste. Il peut se développer dans les sols relativement faibles.

Bien que la plante puisse pousser de manière sauvage, sa culture est en expansion en Égypte et en Inde, en raison de la forte demande.

On la trouve en Eurasie et en Afrique du Nord, dans les régions du bassin méditerranéen telles que les îles Canaries, la Libye, le Maroc et l’Algérie. Elle se rencontre aussi en Asie du sud-ouest, de l’Égypte et en Inde de l’Ouest.

Aux États-Unis, le Plantago ovata prospère dans les régions arides du sud-ouest du pays ainsi que dans le maquis côtier de la Californie.

La grande distance entre ces deux zones a suscité diverses suppositions. Initialement, on a présumé que la variété américaine appartenait à une espèce différente appelée Plantago fastigiata. Cependant, Bassett et Baum ont constaté que la structure des grains de pollen des variétés ovata et fastigiata était similaire. Elles pourraient appartenir à la même espèce. Les chercheurs avaient conclu que le P. ovata a été introduit en Amérique par les colonisateurs espagnols.

Se basant sur l’étude des structures génétiques de 585 spécimens provenant de différentes régions, Meyer et Liston ont identifié quatre sous-espèces distinctes. P ovata serait une espèce hybride résultant des variétés de l’Ancien Monde. L’utilisation d’horloges moléculaires ont permis aux chercheurs de dater son introduction en Amérique, à une période comprise entre 200 000 à 650 000 ans.

Plantago ovata est également capable de s’adapter aux régions tempérées. Il a été introduit en France, ainsi qu’en Chine.

À des fins médicinales, l’Égypte, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde cultivent l’ispaghul pour ses graines. Ce dernier pays en est le principal producteur mondial et il possède des cultures répandues dans les États du Gujarat, du Maharashtra, du Punjab et du Rajasthan. Au Pakistan, la culture se concentre dans la province du Sindh.

Composition de l’ispaghul

Les macromolécules de polysaccharides présentes dans le tégument de la graine d’ispaghul confèrent à la plante ses propriétés médicinales. Ils sont constitués principalement de :

• L-arabinose (20 %) ;
• D-xylose (65 %) ;
• rhamnose (6 %) ;
• D-acide galacturonique (9 %). 

Ils ont une structure de arabinoxylane très ramifiée, liée aux monosaccharides. Cela les rend difficilement hydrolysables dans le tube digestif supérieur. Ils ne sont pas absorbés, mais seuls les monosaccharides le sont.

Les graines de Plantago ovata sèches renferment entre 25 et 30 % de mucilage. Ce taux est le plus élevé parmi les espèces de plantain. Ce composant, peu fermentescible, a la capacité d’absorber un grand volume d’eau (jusqu’à 40 fois son poids) et de constituer un gel volumineux dans le côlon.

Le psyllium blond contient des protéines, des lipides et des glucides, bien que leur proportion soit relativement faible. Cependant, sa faible valeur énergétique constitue un avantage, avec seulement 9,8 kcal pour 100 g de poudre. Cette composition en fait un choix idéal pour ceux qui recherchent un complément alimentaire riche en fibres, mais faible en calories. Les fibres alimentaires jouent un rôle essentiel dans le maintien d’un système digestif sain et d’un bon transit intestinal régulier.

Propriétés de l’ispaghul en phytothérapie

Les téguments d’ispaghul sont préconisés pour soulager le syndrome du côlon irritable. Ils possèdent également d’autres propriétés, en plus de son rôle de régulateur du transit intestinal.

Laxatives

Le Plantago ovata, à l’exemple de tous les plantains, est un laxatif mécanique, également appelé laxatif de lest. D’ailleurs, l’Agence européenne des médicaments a confirmé cette propriété pour son tégument. Les mucilages rétablissent la fermeté des selles liquides ou hydratent un bol fécal trop sec. Cela s’avère utile en cas de diarrhée ou de constipation. Ils stimulent le mouvement péristaltique des intestins et favorisent l’élimination des selles par défécation. Cet effet est bénéfique dans les crises d’hémorroïdes.

Chez les personnes souffrant de constipation chronique, il a été démontré que l’ispaghul ramollissait davantage les selles et en augmentait la quantité totale par rapport au docusate de sodium.

De plus, l’ispaghul agit comme un coupe-faim naturel et procure une sensation de satiété. Cette fonction est renforcée par une diminution de l’absorption des aliments. Il constitue une option intéressante dans le cadre d’un programme de perte de poids.

Hypoglycémiantes

Plusieurs études ont observé la capacité de l’ispaghul à réduire la hausse de la glycémie après les repas (glycémie postprandiale). Des sujets souffrant d’hypercholestérolémie légère à modérée et de diabète de type 2 ont mangé des téguments de la plante. Les résultats ont montré qu’après un repas, le taux de diminution était de :

• 19 % pour le glucose ;
• 13 % pour le cholestérol LDL ;
• 10 % pour le cholestérol total.

Des patients souffrant de diabète de type 2 et prenant de l’ispaghul ont montré une baisse significative de leur glycémie à jeun de 37,0 mg/dL. Leur taux de HbA1c (hémoglobine glyquée) a chuté de 1 %. Cependant, ce constat était relatif au taux de sucre dans le sang à jeun avant le traitement. Aucune diminution n’a été constatée chez les personnes avec un taux de glycémie normal.

Hypocholestérolémiantes

Des études récentes ont démontré que l’ispaghul est efficace pour réduire les niveaux de cholestérol.

En 1989, pendant huit semaines, des patients atteints d’hypercholestérolémie légère à modérée, ont pris 3,4g de la plante (une cuillère à café), trois fois par jour. Ils ont vu leur cholestérol total diminuer de 4,8 %, et leur cholestérol LDL de 8,2 %. Toutefois, aucun effet n’a été constaté sur la tension sanguine, les triglycérides et les niveaux de HDL.

En 1997, un méta analyse a évalué l’effet métabolique des céréales contenant de l’ispaghul sur le cholestérol (total, LDL et HDL), pris au petit déjeuner. Chez les personnes atteintes d’une hypercholestérolémie légère à modérée, le cholestérol total et le cholestérol LDL ont chuté respectivement de 5 % et de 9 %. Aucun impact sur la tension artérielle ni sur les niveaux de triglycérides et de HDL n’a été observé.

D’autres essais cliniques ont aussi démontré que la prise quotidienne d’ispaghul (10 g/j mélangés à des aliments) entraînait une légère réduction du LDL-cholestérol (de 8 à 13 %) et du cholestérol total (de 4 à 8 %). En revanche, elle n’avait aucun effet sur les taux de triglycérides et de HDL-cholestérol.En résumé, la consommation de la plante peut entraîner une légère diminution du cholestérol total et du cholestérol LDL chez les patients atteints d’une hypercholestérolémie légère à modérée. Cependant, son effet n’a pas d’impact sur les triglycérides et le cholestérol HDL. Aussi, le Plantago ovata ne peut pas être considéré comme efficace pour réduire un taux de cholestérol très élevé.

Posologie

Pour traiter la constipation ou les diarrhées, les téguments et les gélules peuvent être pris par voie orale, une à trois fois par jour, à une dose de 10 g dans 100 ml d’eau. Buvez rapidement le mélange avant qu’il ne se transforme en gel. Puis, faites suivre par au moins 200 ml d’eau.

Effets indésirables et contre-indications de l’ispaghul 

Au début du traitement avec l’ispaghul, des gaz peuvent se faire ressentir, mais ils s’atténuent par la suite. Une obstruction intestinale risque de survenir si la quantité d’eau prise au moment de l’ingestion des graines est inférieure à 300 ml.

À la différence des autres laxatifs végétaux, tels que la bourdaine ou le séné, le Plantago ovata n’irrite pas la muqueuse intestinale. Il peut être utilisé sur des périodes prolongées, sans effets indésirables connus pour une utilisation régulière. Toutefois, si vous ne constatez aucune amélioration après trois jours de traitement, une consultation auprès de votre médecin devient impérative.

La prise des graines d’ispaghul n’est pas recommandée en cas de présence de sang dans les selles. Il en est de même chez les personnes qui souffrent de sténose, de paralysie intestinale ou de mégacôlon.

L’ispaghul peut contrecarrer l’absorption du fer, du calcium, du zinc, du magnésium, de la vitamine B12. Il en est de même pour les anticoagulants, les médicaments cardiaques et les médicaments pour les troubles bipolaires et de l’épilepsie. Par conséquent, un délai d’au moins deux heures est nécessaire entre la prise des graines et celle de ces médicaments.

En général, les autorités médicales considèrent que le risque de toxicité et de surdosage lié à la prise d’ispaghul est minime.