Le curcuma : son origine, sa production, ses vertus en phytothérapie, ses utilisations, et ses contre-indications.

Au XIII^e siècle, Marco Polo connaissait déjà cette poudre aromatique. Lorsqu’il voyagea en Chine, il remarqua que celui-ci ressemblait au safran. À partir du XVIII^e siècle, cette épice est importée en Europe (France, Royaume-Uni, Hollande et Portugal).

De nos jours, le curcuma est employé dans de nombreux mélanges d’épices. Il s’associe parfaitement avec des zestes d’orange, du cumin, du piment, du safran, de la vanille, de la cannelle, de la fleur de sel, du gingembre, etc.

Description du curcuma

Le curcuma est une plante herbacée rhizomateuse mesurant environ un mètre de haut. Il dispose de longues feuilles entourant l’inflorescence. Cette dernière est constituée d’un épi pouvant atteindre 25 cm. Quant aux fleurs, elles sont généralement jaunes ou blanches.

Les rhizomes présentent une couleur gris-brun à l’extérieur. L’intérieur est coloré en jaune orangé. Ces tiges souterraines du curcuma sont déclinées en deux types :

• les racines principales : qui donnent le curcuma rond ;
• les racines secondaires : qui donnent le curcuma long.

Dans les deux cas, les souches possèdent des propriétés identiques. Elles dégagent ainsi une odeur aromatique et forte, et leur goût est épicé et légèrement amer.

Étymologie et appellations vernaculaires

Le nom curcuma provient du sanskrit kunkuma. En anglais, il est nommé turmeric. Ce terme est hérité du français « terre mérite », celui-ci procède du latin terra merita désignant la racine. Cette dernière était connue pour présenter de grandes vertus. Selon certaines sources, « curcuma » serait aussi issu du mot arabe d’origine indienne kourkoum.

Le curcuma est considéré comme une épice sacrée en Inde où il a plusieurs appellations en sanskrit. Il fut ensuite commercialisé dans de nombreux pays où il obtint de nouvelles appellations. Voici quelques exemples de noms vernaculaires dans différentes langues :

• swahili: mmanjano ;
• sanskrit: kunkuma, haridra, hemaragi, shobhna, varna-datri, mangal prada, ranjani, etc.
• lituanien: ciberzole ;
• malgache: tamotamo ;
• hébreu : karkom ;
• chinois : jianghuang ;
• comorien: dzinedzanou ;
• indonésien: kunyit ;
• afrikaans : borrie ;
• anglais : turmeric, spice of life, golden spice ;
• français : safran des Indes, rhizome de curcuma, souchet malabar, terre mérite, racine de safran et curcuma.

En général, ces noms sont attribués au curcuma en regard de ses propriétés et de sa couleur jaune.

Principaux composants

La curcumine est le principe actif du safran indien. Cette molécule lui confère ses propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes. Le rhizome du curcuma est constitué de curcuminoïdes, qui lui procurent sa belle couleur jaune orangée. Ceux-ci sont constitués notamment par la dihydrocurcumine, la bidesméthoxycurcumine, la desméthoxycurcumine ainsi que la curcumine.

Le Curcuma longa contient aussi d’autres composants tels que :

• des alcaloïdes ;
• des glucides : ukonane A ;
• des benzénoïdes : curcumine et dérivés, gaïacol ;
• des phénylpropanoïdes : 4-hydroxycinnamoyl méthan, acide p-coumarique, acide caféique ;
• des lignanes : 4-hydroxy-cinnamoyl-(féruloxyl)méthane, iso-procurcuménol ;
• des monoterpènes : terpinène, camphène, cinéole ;
• des stéroïdes, stigmastérol, campestérol (aux vertus anti-inflammatoires), cholestérol ;
• des sesquiterpènes : curcuménone, curcumène, caryophyllène, bisacurone, bisacumol, alpha et gamma alantones ;
• des quinoïdes.

L’huile essentielle de curcuma est constituée de terpinène, de camphre, de bornéol, de curcuménol, d’atlantone, de gingibérène, de déshydrotumérone et de turmérone.

Actuellement, plusieurs études sont en cours pour vérifier les effets de la turmérine et de la curcumine. Une méta-analyse plus poussée sur la chimie de cette dernière montre que celle-ci est un composé non biodisponible, réactif et instable. Selon les scientifiques, le principe actif du curcuma s’associe à toutes les molécules pendant les tests in vitro. Cette substance interagit avec la plupart des protéines impliquées dans les pathologies. Lors des phases de test préliminaire, des résultats prometteurs sont obtenus.

Vertus du curcuma

Reconnu pour ses propriétés antioxydantes, le safran d’Inde est exploité dans les médecines traditionnelles chinoise et indienne. Considéré comme un anti-inflammatoire naturel, le curcuma est utilisé en phytothérapie et dans la médecine ayurvédique. Certaines études démontrent que les curcuminoïdes ont le pouvoir d’améliorer les maladies inflammatoires chroniques, les  maladies cardiovasculaires ainsi que le syndrome métabolique.

Usages traditionnels

Dans la médecine ayurvédique, la racine du curcuma, réputée riche en principes actifs, permet de soulager les problèmes digestifs, le stress, les douleurs articulaires et musculaires, etc. Pour booster ses effets, les Indiens l’associent au pipérine ou poivre noir. Ce dernier présente également des vertus thérapeutiques. Contribuant à améliorer l’absorption du principe actif (curcumine), il améliore les bienfaits du curcuma.

Dans la médecine traditionnelle chinoise, le curcuma est utilisé afin de traiter la congestion sanguine, les douleurs d’arthrose ainsi que les tumeurs induites par le ch’i, flux d’énergie naturelle.

Prévention du cancer

Depuis 1985, les propriétés du curcuma dans la prévention du cancer ont fait l’objet d’études scientifiques. Des expériences in vivo et in vitro sur des souris ont été menées. Les résultats ont montré une diminution des tumeurs grâce au curcuma et son principe actif, la curcumine.

Par la suite, plusieurs recherches ont été réalisées sur les potentiels effets inhibiteurs du safran indien sur le développement des cancers. Ces études ont démontré que la curcumine est prometteuse contre le cancer de la prostate, du côlon, de l’ovaire, du sein, de l’estomac, du poumon et du foie. En effet, elle bloque la multiplication des cellules cancéreuses.

Utilisée comme agent adjuvant en chimiothérapie, elle est bénéfique pour traiter la leucémie et le mélanome.

La curcumine peut diminuer les effets secondaires de la radiothérapie et de la chimiothérapie. Des études ont rapporté qu’elle a réduit le niveau des marqueurs tumoraux chez les patients et amélioré leur qualité de vie.

Autres bienfaits du curcuma

Alicament naturel, le curcuma joue un rôle protecteur contre le diabète de type 2. Des recherches récentes montrent qu’il peut faire baisser le taux de mauvais cholestérol, et contribuer à réguler la glycémie. La curcumine contribue à la stimulation des cellules qui peuvent anéantir les protéines du cerveau. Elle protègerait donc de la maladie d’Alzheimer. Le curcuma pourrait également améliorer la mémoire et traiter les syndromes dépressifs majeurs. Consommé avec du poivre noir et du thé vert, il stimule la perte de graisse.

Au Cambodge, le curcuma en poudre ou en pâte est utilisé traditionnellement pour ses propriétés anti-inflammatoires et pour favoriser la contraction de l’utérus après l’accouchement. On pense également qu’il peut aider à réduire les saignements post-partum.

En Birmanie (Myanmar), le curcuma est utilisé pendant l’accouchement pour aider à soulager la douleur et à faciliter le processus de naissance. Il peut être consommé sous forme de poudre mélangée à de l’eau ou appliqué localement sous forme de pâte sur l’abdomen.

En infusion

Le safran indien peut être consommé sous forme d’infusion. Pour la décoction, il faut du curcuma moulu. Ajouter ce dernier dans de l’eau chaude. Incorporer du gingembre en poudre, du citron et un peu de miel. Afin d’amplifier les bienfaits, ne pas hésiter pas à ajouter du poivre noir dans l’infusion.

Sous forme de compléments alimentaires

Le curcuma est employé dans la composition de nombreux compléments alimentaires. Ceux-ci sont disponibles en gélules et sous forme de liquide. En général, ces produits sont recommandés pour les femmes allaitantes. Les compléments alimentaires à base de curcuma conviennent également aux sportifs ou aux personnes souhaitant faire une cure.

Sous forme de cataplasme

Les personnes souffrant de problèmes de peau tels que le psoriasis, les éruptions cutanées et l’eczéma peuvent recourir au safran indien. Afin de préparer un cataplasme, il convient d’ajouter une ou deux cuillères à café de curcuma en poudre dans un récipient. Ensuite, l’humidifier avec un peu d’eau pour former une pâte homogène. Appliquer directement le mélange sur la zone à traiter. Laisser agir pendant une dizaine de minutes avant de rincer.

Autres usages du curcuma

Le Curcuma longa entre dans la composition de remèdes traditionnels, de préparations culinaires, de produits cosmétiques, etc. Dans le Colour Index International, la couleur jaune végétale du curcuma s’identifie avec le code NY3. En raison de sa teinte authentique, le rhizome du Curcuma longa fait office de colorant.

Colorant alimentaire, textile et autre

Pour extraire l’oléorésine du curcuma, on utilise du solvant. Purifiée par cristallisant, elle procure deux colorants alimentaires : E100(ii) (curcuma) et E100(i) (curcumine).

En tant que plante tinctoriale, le curcuma est exploité dans l’industrie textile pour colorer la soie, la laine et le coton en jaune orangé. Toutefois, le pigment du safran indien s’avère sensible à la lumière. Il a tendance à se décolorer facilement.

Traditionnellement, la teinture de curcuma est employée pour les costumes safran des moines bouddhistes et des sâdhus. Dans la Grèce antique, les femmes portaient des tuniques spéciales pendant les fêtes religieuses des Panathénées. Ces vêtements étaient colorés avec du curcuma.

En Polynésie française, le safran indien sert à la coloration des tapas, qui sont des costumes traditionnels de cérémonie.

Au Moyen Âge, le Curcuma longa était utilisé comme teinture pour les sceaux à cacheter. En Europe, il était aussi exploité pour la coloration des savons. Au XVIII^e siècle, les droguistes ont employé le curcuma afin de produire du colorant alimentaire. Ce dernier était utilisé pour falsifier des substances telles que le sirop de chicorée, l’huile d’œufs ainsi que l’huile de palme. Les Indiens utilisent le curcuma depuis longtemps comme conservateur alimentaire.

Usages rituels et cosmétique

En Inde, le curcuma figure parmi les offrandes aux divinités lors de fêtes de Divali. Le tilak, la marque rouge sur le front des personnes à bénir, est conçu à partir d’un mélange de chaux et de poudre de curcuma.

Lors des cérémonies de mariage, les Indiens préparent une pâte de curcuma pour l’appliquer sur le visage, le cou, les mains et les pieds des mariés. Selon les croyances, cela protège le couple du mauvais œil et leur attire la chance.

En Polynésie française, le safran indien est utilisé comme peinture corporelle sur les enfants. Les femmes enceintes l’appliquent également sur leur ventre à partir du second trimestre de grossesse.

Dans les rites funéraires en Polynésie française et en Inde, le curcuma est un incontournable. Associé aux nourritures et mélangé avec de l’eau, il était déposé près du défunt, pour qu’il s’en nourrisse pendant son dernier voyage. Par ailleurs, les Cambodgiens frottaient le corps du défunt avec du curcuma. En cosmétique, le curcuma est utilisé dans plusieurs shampoings indiens.

Production

L’Inde est le plus grand exportateur mondial et producteur de curcuma. Ce pays produit jusqu’à 3 millions de tonnes d’épices par an. Près de 90 % de la production de curcuma est destinée au marché interne. En Asie, d’autres pays produisent du curcuma comme la Chine, le Sri Lanka, le Bangladesh, la Birmanie, l’Indonésie ainsi que le Pakistan.

Dans certains pays d’Amérique latine tels que le Costa Rica, le Brésil, la Jamaïque et le Pérou, on trouve aussi des producteurs de curcuma. En Afrique, le seul producteur et exportateur du safran indien est l’Éthiopie. L’île de la Réunion figure aussi parmi les producteurs de cette plante. En 2016, elle en a produit près de cinq tonnes en agriculture biologique. Le lieu de plantation se trouve dans la ville de Saint-Joseph, plus précisément, sur la Plaine des Grègues.

Les principaux importateurs de curcuma sont les États-Unis, les Émirats arabes unis, le Japon, l’Iran, l’Afrique du Sud ainsi que le Royaume-Uni.

En raison de ses propriétés médicinales qui sont de plus en plus reconnues, le curcuma est utilisé dans le domaine de la phytothérapie et de la thérapie naturelle. Cela se traduit par une forte augmentation de sa demande. En 2007, l’International Trade Center a estimé une croissance de la demande mondiale de cette plante à 10 %. Par conséquent, le prix du curcuma a connu une nette augmentation, notamment en 2009 suite à des phénomènes météorologiques affectant les cultures.

En 2005, la Commission européenne a décidé d’approfondir ses contrôles qui visent à détecter la présence de teintures synthétiques appelées « colorant Sudan » dans le curcuma. Cette pratique d’adultération du safran indien est décelée grâce à l’amélioration des méthodes d’analyse aux rayons X.

L’Inde envisage de monopoliser la production du safran indien. Ainsi,  son Institut agronomique national a imposé l’interdiction de l’exportation des cultivars de curcuma afin de protéger les patrimoines génétiques.

Posologie

Vous pouvez consommer du curcuma tous les jours. En revanche, veillez à respecter les dosages recommandés, afin que votre organisme profite des bienfaits de la curcumine.

Vous pouvez en administrer jusqu’à six grammes par jour, ce qui correspond à 400 mg de curcuminoïdes. La consommation excessive de ce produit est déconseillée.

Le surdosage du curcuma est susceptible d’entraîner des flatulences, une sécheresse de la bouche ainsi que des brûlures d’estomac. Il est également possible que les personnes allergiques au curcuma présentent des réactions intenses comme des vomissements et des nausées.

En cas de doute concernant le dosage, renseignez-vous auprès d’un professionnel de santé ou d’un phytothérapeute, là où vous vous procurez votre curcuma.

Contre-indications et précautions

En ce qui concerne la toxicité du curcuma, cette épice ne présente aucun danger pour la santé. Il est possible de la consommer en toute sécurité. Toutefois, l’association du Curcuma longa et du nimésulide peut entraîner des troubles hépatiques graves.

Les produits à base de curcuma pourraient aussi interagir avec les médicaments anti-inflammatoires et des médicaments fluidifiants du sang comme la warfarine.

La consommation du curcuma est contre-indiquée chez les personnes ayant des problèmes de foie ou un ulcère de l’estomac. Si vous souffrez d’une obstruction des voies biliaires, il vaut mieux ne pas en prendre.

L’Agence européenne du médicament préconise de ne pas consommer de produits contenant du curcuma pendant la grossesse. L’usage du safran indien chez les enfants de moins de 15 ans est aussi déconseillé.