La belladone, poison mortel, était utilisée pour parfaire la beauté des femmes de la Renaissance. Les Italiennes appliquaient quelques gouttes d’infusion de belladone sur leurs yeux pour dilater leurs pupilles. Cette pratique leur donnait une couleur noir profond et offrait un effet yeux de biche. En effet, le mot belladone signifie « belle femme » en italien. Les expressions sombres associées aux pupilles dilatées semblent avoir des pouvoirs excitants chez les hommes. Cela aurait été l’une des manifestations de l’excitation sexuelle et de la libido. Par ailleurs, la belladone occasionnait un léger strabisme, considéré comme un trait de beauté à l’époque, d’où l’expression « avoir de la coquetterie dans les yeux ».
En 1548, Mattioli a proposé des dosages en fonction de l’effet recherché. Ainsi, pour rendre une femme d’humeur coquine et pour qu’elle pense qu’elle est la plus belle du monde, il existe une technique. Il faudrait lui faire boire une drachme d’eau distillée de la plante. Pour la rendre plus folle, deux doses sont nécessaires. Cependant, dans son livre Commentarii in libros sex Pedacii Dioscoridis, il indique que faire ingurgiter plus de trois drachmes à une femme la ferait probablement mourir.
En outre, des préparations à base de belladone étaient utilisées au début du XIXe siècle par les médecins allemands Franz Reisinger (1787 à 1855) et Karl Himly (1772 à 1837). Leur objectif était la réalisation d’examens oculaires. À des doses contrôlées, le poison contenu dans la belladone peut servir de médicament. L’atropine, un de ses principes actifs, est encore aujourd’hui employée dans la médecine moderne.
La composition de la belladone et sa toxicité
Les feuilles sont la partie de la belladone la plus couramment exploitée, bien que quasiment toutes les parties de la plante soient toxiques. Les feuilles de cette plante contiennent environ 7 % d’eau, jusqu’à 15 % de minéraux et moins de 1 % d’alcaloïdes actifs. Parmi ces derniers, entre 90 % et 95 % sont des alcaloïdes atropiniques tels que l’hyoscyamine (un racémique de l’atropine) et l’hyoscine (ou scopolamine). La teneur de ce composé est de 5 % à 10 %. La belladone renferme des traces de scopolétol, un type de coumarine, détectables sous la lumière ultraviolette. Selon les espèces animales, les conséquences de l’ingestion de la belladone peuvent varier. Les moins sensibles parmi les mammifères sont les lapins, les lièvres et les rongeurs. Ces animaux possèdent une atropinase hépatique, une enzyme qui décompose l’atropine.
Les baies provoquent le plus souvent une intoxication, en particulier chez les enfants. Par ailleurs, la belladone a un goût sucré. Ses fruits peuvent facilement être confondus avec des myrtilles. Les conséquences d’une ingestion sur l’homme sont extrêmement sévères. Pour un adulte, la prise de 10 à 15 baies peut conduire au décès. Tandis que pour un enfant, deux à trois baies suffisent pour causer une grave intoxication. Cela se manifeste par des problèmes digestifs tels que des nausées et des vomissements. Des rejets de bribes de baie rouge noirâtre se font alors remarquer.
Des troubles neuro-végétatifs suivent rapidement :
- tachycardie ;
- sécheresse de la peau et des muqueuses ;
- difficulté à respirer et à avaler ;
- douleurs vulvaires chez les petites filles ;
- pupilles dilatées ;
- troubles de la vue, voire cécité absolue transitoire.
Des problèmes neurologiques concomitants peuvent apparaître, tels que :
- anxiété ;
- vertige ;
- délire de joie ou de colère ;
- hallucinations étranges et effrayantes ;
- convulsions.
De même, l’intoxication à la belladone se manifeste par une hyperthermie, une rougeur du cou et du visage, une constipation et une rétention urinaire.
L’état d’intoxication évolue progressivement vers une prostration, un coma tranquille, une perte de conscience et de réflexes. Un risque de paralysie cardio-pulmonaire pouvant entraîner la mort est également à craindre. Les humains peuvent être empoisonnés d’une autre manière, notamment par la consommation d’oiseaux ou d’escargots se nourrissant de feuilles ou de fruits de belladone.
Propriétés phytothérapeutiques et vertus de la belladone
La plante et ses feuilles doivent être exclusivement utilisées pour la préparation des formes galéniques employées en milieu pharmaceutique. Les principes actifs de la belladone sont incorporés dans des suppositoires ou des sirops. En phytothérapie, la belladone se consomme sous forme de teintures, d’extraits, de gouttes et de granules homéopathiques. La principale raison de son usage thérapeutique est son action parasympatholytique due à la présence de l’atropine.
Les feuilles de la belladone entrent dans la composition de produits antispasmodiques. Dans ce cadre, elles contribuent au traitement de troubles fonctionnels des voies biliaires et du tube digestif lorsqu’elles sont associées avec du laxatif. Ce médicament non rationnel était auparavant présent dans des dépuratifs. Ces derniers se révélaient plus ou moins caustiques lors d’un usage prolongé, selon l’écrivain et l’ethnobotaniste français Pierre Lieutaghi. Jusque dans les années 1980, ces dépuratifs étaient commercialisés dans les pharmacies en périphérie des villes en Haute-Provence.
Pour le traitement d’un certain nombre de pathologies, le rapport bénéfice risque de la belladone n’a pas été très positif. Cela a donc entraîné une suppression progressive de plusieurs produits pharmaceutiques en rapport avec la plante. Cette situation s’est produite vers la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle.
La belladone est utilisée en raison de sa capacité à décontracter les muscles. Elle soulagerait les douleurs intestinales et les coliques. En outre, elle pourrait réduire la production d’acidité lors d’ulcères gastriques et diminuer certains spasmes, particulièrement ceux du système urinaire. La plante serait aussi idéale dans la réduction des sueurs nocturnes. Elle serait un remède efficace contre les crises d’asthme.
En homéopathie, la belladone est principalement indiquée dans différents cas, à savoir :
- forte et soudaine fièvre ;
- otite, trachéite, rhinopharyngite et angine ;
- aphonie et enrouement ;
- furoncle, panaris, brûlures au 1ᵉʳ degré, coup de soleil et début d’abcès ;
- bouffées de chaleur lors de la ménopause ;
- diverses affections oculaires.
La belladone peut aider à soigner certains problèmes dentaires.
Les dosages varient en fonction de la pathologie à traiter. Pour les fièvres brutales, il faut prendre deux granules de 5 CH à 10 DH toutes les heures. Dans le cas d’hypertension ou de bouffée de chaleur, la prise correspond à cinq granules de 9 CH à 18 DH par jour. Ces quelques posologies ne sont donnés qu’à titre indicatif. Se rapprocher d’un professionnel de la santé est indispensable pour connaître le dosage adapté.
Il fut un temps, la belladone était utilisée sous forme de cataplasme pour calmer les douleurs. Ses feuilles étaient aussi exploitées dans la fabrication de cigarettes spéciales luttant contre l’asthme. Aujourd’hui, les racines de cette plante servent à produire de la teinture de belladone. Ce produit améliore la mobilité et la parole dans le cadre du traitement de la maladie de Parkinson. La belladone est efficace pour réduire les tremblements causés par cette pathologie.
Belladone : quelques contre-indications et précautions d’emploi
D’une manière générale, aucune contre-indication spécifique n’existe pour la prise de belladone. Les femmes enceintes ou allaitantes ainsi que les enfants peuvent prendre la forme homéopathique nommée belladonna. Cependant, du saccharose et du lactose peuvent figurer parmi les composants de ce médicament. Les personnes qui souffrent de syndrome de malabsorption de glucose, de galactose ou de déficit en lactose et de galactosémie ne doivent pas en prendre. Toutefois, il existe des formes de granule et des doses spécifiques destinées à ceux qui tolèrent mal le lactose. Celles-ci sont souvent composées de saccharose ou de xylitol.
En ce qui concerne la prise de belladonna, il est toujours conseillé de suivre les recommandations des médecins homéopathes. Généralement, il faut en prendre en dehors des repas. Il est déconseillé de l’associer avec des produits excitants comme le café ou le tabac.