Parmi ces percussions, certaines sont employées pour vénérer des divinités, et d’autres destinées à des usages profanes, mais officiels. Pour cette deuxième catégorie, les instruments sont battus pour invoquer les esprits des ancêtres dans l’exécution des danses rituelles. Ces membranophones sont également sollicités dans certaines circonstances pour chasser les esprits malveillants. La gestuelle, la technique de jeu et les intervenants respectent un ordre préétabli et des règles précises.
L’histoire de cet instrument de percussion
L’origine du tambour du Burundi est difficile à situer en raison de l’absence de documents écrits sur le sujet. Néanmoins, les traditions orales rapportent plusieurs hypothèses sur son histoire et les pouvoirs qui lui sont attribués. La seule certitude possible soutient que l’apparition du tambour est intrinsèque à celle de la monarchie burundaise. L’appellation « tambour royal » remonte à cette période de l’histoire de ce pays des Grands Lacs. Par ailleurs, le vocable ingoma signifie à la fois « règne », « tambour » et « royaume ».
Mythes
La légende raconte que cet instrument est apparu entre le XVe et le XVIIe siècle, sous le règne de Ntare Ier, fondateur de la monarchie ganwa. À cette époque, des rixes avec le monarque de Buha ont contraint Ntare à fuir son territoire. Ce dernier possédait une vache qu’il a emmenée lors de sa fuite. Ils ont trouvé refuge dans le massif du Nkoma où des anecdotes ont fait du nouveau venu quelqu’un de spécial. Un serpent appelé inkoma terrorisait les habitants de cette zone, et ces derniers ont demandé à Ntare de le tuer. L’homme s’exécuta en égorgeant sa vache et en étendant la peau de celle-ci sur la termitière dans laquelle le serpent se trouvait. L’animal fit plusieurs tentatives pour sortir et se frappa la tête contre la membrane tendue, provoquant des bruits percutants. Ainsi naquit l’inspiration pour le tambour du Burundi, selon les traditions orales. La dénomination ingoma trouve également ses origines dans cette histoire.
Croyances et symbolisme
La légende sur l’apparition de cet instrument à percussion traditionnel influe probablement sur ce qu’il incarne aux yeux des Burundais. Ce tambour représente la légitimité du pouvoir royal tout en apportant la protection divine au royaume. Il incarne également la prospérité et la fécondité, tout en servant d’intermédiaire entre le monarque et le divin. En ce sens, il constitue à la fois un objet de culte et un matériel musical, dont l’usage était strictement réglementé. Cet instrument percussif séculaire continue actuellement d’être considéré comme sacré. Il en va de même pour les coutumes qui s’y rattachent, à l’instar de la danse rituelle avec ses pirouettes et ses bonds prodigieux.
Au Burundi, l’expression « monter sur l’ingoma » signifie qu’un roi accède au trône. À cette grande occasion, ce dernier démontre sa force et sa capacité à diriger la nation en soulevant le tambour dynastique. En outre, le jeu de ces instruments royaux était l’apanage des ritualistes, qui se transmettait de génération en génération. Chaque troupe intègre un enfant afin de garantir la transmission du savoir séculaire, renforçant davantage l’attachement à cet héritage.
Ces instruments ne sortaient qu’occasionnellement, comme lors de l’intronisation ou des funérailles des monarques. Une lignée de tambourinaires, appelée les Batimbos, perpétue sa pratique jusqu’à maintenant.