La caisse de résonance

Sa caisse de résonance, en forme de poire, est taillée dans une calebasse. Elle mesure environ 117 cm (3,5 chi dans la mesure traditionnelle chinoise). Cette unité de mesure spécifique reflète des valeurs et des croyances fondamentales, notamment les trois puissances et les cinq éléments. Autrement dit, le corps du pipa renvoie au ciel, à la terre et à l’homme. Cette partie symbolise également le métal, le bois, l’eau, le feu et la terre.

La table d’harmonie

Sa table d’harmonie est faite en bois, tandis qu’un chevillier recourbé en arrière termine son manche particulièrement court. Ce dernier accueille des frettes qui progressent sur le corps, dont le nombre a évolué à travers les âges. Sous la dynastie Ming, le pipa avait quatre frettes sur le manche et dix autres sur sa table d’harmonie, contre treize sur les modèles actuels. La grande étendue chromatique est désormais justifiée par la trentaine de frettes disponibles sur ce luth oriental.

Les cordes

Traditionnellement, les cordes en soie torsadées sont accordées sur les notes la, ré, mi, et la. En revanche, des raisons pratiques ont orienté les facteurs modernes vers d’autres matériaux, particulièrement le nylon et le métal. Ces matériaux renferment aussi des symboles importants, en faisant référence aux quatre saisons. Elles sont maintenues d’un bout à l’autre par des attaches sur la table d’harmonie, et par des chevilles coniques sur le chevillier. À l’accoutumée, ce luth chinois est accordé sur do2, fa2, sol2, do3.

Les décorations

Le pipa comporte généralement des incrustations, des figures, des gravures ou des ouïes en forme de croissants. Le fleuron de la cheville présente des symboles variés, comme un dragon, une chauve-souris ou une queue de phénix. Bien que le dos soit généralement uni, certains modèles sont ornés d’une ruche symétrique avec des symboles religieux (taoïste, confucianiste, bouddhiste, etc.)

Histoire du pipa

La première mention du pipa remonte au deuxième siècle avant Jésus-Christ. Son introduction en Chine est située entre l’an 386 et l’an 534, sous le règne des Wei du Nord. Il puise son origine dans l’Asie occidentale et centrale, puis gagne en popularité auprès de nombreuses dynasties chinoises. En effet, il représente un instrument de musique de cour de 206 av. J.-C. à 220 apr. J.-C., sous les Hans. Les Sui, qui ont régné de 581 à 618, l’ont vu se mêler au luth iranien pour une diversité musicale encore plus distinctive.

Élément identitaire

Le pipa a traversé les siècles pour devenir un véritable élément identitaire. Son jeu se retrouve dans une multitude de répertoires, de genres musicaux et d’œuvres modernes. Néanmoins, son utilisation reste ancrée dans la tradition, et les musiciens continuent de s’inspirer des mélodies d’antan. Progressivement, ce luth chinois accompagne la flûte, la guitare et aussi d’autres cordophones du pays comme le zheng et l’erhu. Il coexiste également aux côtés d’instruments japonais, à l’instar du shakuhachi et du biwa. Cet instrument à cordes pincées rejoint naturellement les répertoires occidentaux, à travers la fusion de styles, la formation orchestrale et les pièces à sonorités multiples.

Place dans la culture

Par son adaptabilité à toutes les techniques musicales, le pipa jouit d’une notoriété incontestable dans différentes cultures. Il se classe parmi les instruments en soie ou bayin, la classification chinoise répartissant les objets acoustiques selon leur matériau de fabrication. Cette variété de luth existe dans d’autres formes dans les pays orientaux, comme au Japon, en Corée ou encore au Vietnam. À titre indicatif, le modèle japonais se différencie par le nombre de frettes qui est limité à quatre.

Des compositions traditionnelles aux créations contemporaines, le pipa montre une grande polyvalence. Le compositeur Tan Dun fait partie des artistes qui le mettent à l’honneur dans leurs œuvres. Son concerto inspiré de « l’Opéra fantôme », tradition datant d’il y a 4 000 ans, peut être cité en exemple. De grandes musiciennes telles que Liu Fang (une véritable référence en la matière) et Wu Man (avec 5 albums nominés aux Grammy Award) font également la part belle à cet instrument traditionnel. Aux États-Unis, les stars adeptes de cette variété chinoise du luth ne manquent pas, dont Lou Harrison, Terry Riley ou encore Philip Glass.

Dans l’art pictural, ce cordophone se révèle indissociable de la musique céleste. Il est souvent représenté entre les mains de beautés divines. En art martial, un mouvement appelé « jouer du pipa » existe en tai-chi.

Fonctionnement du pipa

Les anciennes notations musicales du pipa datent du X^e siècle sous forme de partitions, dont les plus célèbres sont celles de Dunhuang. Ye Dong, un érudit du Conservatoire de musique de Shanghai, a décodé 25 de ces pièces dans les années quatre-vingt.

Techniques de jeu

Derrière la simplicité de son nom et de sa signification, ce luth traditionnel chinois exige une remarquable dextérité en termes de jeu. Sa richesse expressive justifie probablement cette caractéristique. En ce sens, il fait partie des instruments les plus délicats à jouer, malgré des bases similaires à celles de la guitare. Par exemple, le musicien le maintient de la même façon que cette dernière au départ, c’est-à-dire horizontalement. Plus tard, sous les Tang (618-907), la technique a évolué, et il est désormais plus courant de le voir tenu et joué à la verticale.

Doigté

L’attaque de la corde s’effectue avec la main droite, en joignant le pouce et l’index, avec les ongles. Il est pertinent de noter également que dans le passé, le musicien se servait d’un plectre pour pincer les cordes. Le jeu avec les doigts a été adopté à partir de la dynastie Tang, mais seuls deux étaient utilisés. Le pincement avec cinq doigts est venu plus tard. Cette évolution coïncide ainsi avec la période où les musiciens ont changé leur façon de tenir l’instrument.

Plusieurs manières de jouer ouvrent aux nombreuses sonorités proposées par ce luth chinois. Parmi elles, se distinguent le pizzicato (propre aux cordophones frottés), le roulement des cinq doigts et le jeu des harmoniques. En général, la transmission de l’art de pipa passe par l’écoute, comme dans l’ancien temps où les notations musicales n’existaient pas encore. Le rapport de maître à élève maintenait la tradition de cette musique.

Actuellement, le doigté s’apprend à travers des signes abrégés et le système gongche, particulièrement connu pour la transcription des opéras et des pièces anciennes. Par ailleurs, il est appréciable de préciser que ce système de notation musicale est aujourd’hui rarement utilisé, le jianpu l’ayant progressivement remplacé. Pour le cas du pipa, la notation part sur un accord de base la, ré, mi, et la.

 Autres possibilités

Ce luth traditionnel doit sa notoriété à son éventail d’expressions. De ce fait, il offre diverses possibilités de jeu, dont le vibrato, le portamento ou encore le glissando. Certains musiciens créent une sonorité proche de celle des cymbales en tambourinant sur la caisse de résonance en bois.

Bases pour apprendre à jouer du pipa

Pour s’initier au pipa, quelques notions de base sont essentielles. En premier lieu, il est conseillé de tenir l’instrument à la verticale sur les genoux. De cette façon, le musicien jouit d’une liberté essentielle pour explorer les différentes techniques de jeu avec ses mains.

Pour compléter ces bases, plusieurs solutions s’offrent aux débutants :

• La première consiste à s’inscrire dans un conservatoire ou dans une école de musique. Les professeurs de ces établissements détiennent des compétences reconnues pour transmettre des arts séculaires. 
• La deuxième option porte sur les cours particuliers dispensés par des professionnels de musique. Cette méthode donne accès à des conseils personnalisés et un suivi de l’évolution de l’apprenant. 
• Le troisième choix implique de suivre les masterclass et les ateliers organisés par des structures ou des espaces culturels. 
• Enfin, le quatrième moyen d’apprentissage reste Internet, à travers les vidéos, les tutorings, les contenus multimédias divers, etc.

Les onglets sont fixés sur le bout des doigts afin de produire les sonorités claires et expressives caractéristiques de ce cordophone chinois. 

Les onglets sont fixés sur le bout des doigts afin de produire les sonorités claires et expressives caractéristiques de ce cordophone chinois.

Entretien du pipa

Le pipa s’entretient de la même façon que la plupart des instruments de son genre. Concrètement, il est préconisé de le ranger à l’abri de l’humidité, idéalement dans un sac ou dans un étui. Après usage, ce luth traditionnel chinois se positionne à plat. Craignant les chutes, il ne peut pas être placé debout ou contre le mur, au risque d’altérer considérablement la sonorité et la qualité de ses notes. En dernier lieu, il est indispensable de procéder à des vérifications régulières des cordes et des attaches.

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