Usages culturels et musicaux
Dans les carnavals et les fêtes culturelles, les grelots sont d’usage. En kathak (danse), les danseurs indiens portent des chevillères avec des shinjini, des clochettes. Le rythme des danses traditionnelles de ce pays est accentué par des ghungharus, un ensemble de 200 petites cloches.
Ces objets, lorsqu’ils sont regroupés, forment un carillon. Leur nombre permet généralement de couvrir une gamme. En revanche, un ensemble campanaire comporte obligatoirement 23 éléments au minimum.
Dans une formation musicale, les modèles les plus répandus sont les agogô, composants essentiels de la musique latino-américaine, notamment celle du Brésil.
Place en France
Les cloches s’inscrivent dans une tradition baptismale qui consiste à leur attribuer un nom, traditionnellement celui de leurs parrains ou leurs marraines. Une cérémonie civile et religieuse est organisée à cette occasion. Cet élément identitaire peut également être éponyme à la ville ou à l’édifice auquel il est associé.
La France compte plus de 160 000 cloches d’église, dont 4 500 sont classées parmi les monuments historiques. De plus, chaque bourdon se distingue par son authenticité, avec des inscriptions et des décorations propres à chacun. Ce caractère unique s’explique par le procédé de fabrication qui implique de briser le moule lors du démoulage de la coulée.
Parmi les bourdons les plus connus en France figurent :
- La Savoyarde (1891) : do#, 18,835 T, basilique du Sacré-Cœur, Paris ;
- Jeanne d’Arc (1959) : fa2, 9,600 T, cathédrale Notre-Dame, Rouen ;
- Totenglocke (1427) : sol#2, 8,811 T, cathédrale Notre-Dame, Strasbourg ;
- Petit bourdon (1868) : si2 (haut), masse indéterminée, église Saint-Michel, Saint-Brieuc.
Cette liste est non exhaustive, car de nombreuses villes françaises (et même des villages) abritent des beffrois et des clochers. Par ailleurs, la cloche de Fontenaille, fondue en 1202, est la plus vieille de France.
Une vingtaine de bourdons de France a également disparu, dont :
- Gros bourdon (1789 – 1793) : mi2, 15 T, cathédrale Notre-Dame de Chartres ;
- Grosse cloche (XVIe siècle – 1747) : fa2, masse indéterminée, basilique Saint-Epvre de Nancy ;
- Gabrielle (1997 – 2010) : la2, environ 2,100 T, église Notre-Dame-de-Fives de Lille ;
- Jeanne d’Arc (1914 – 1944) : ré2, 16 T, cathédrale Notre-Dame de Rouen.
Leur disparition a des origines multiples. Certains bourdons n’ont plus résisté à l’usure liée à un long usage ou à des sonneries violentes. D’autres révèlent une rupture des anses, considérée comme l’une des faiblesses de cet instrument. Les guerres, les pillages et autres actes similaires, les tremblements de terre et autres catastrophes naturelles ont aussi entraîné leur destruction. En outre, les coûts de réparation s’avèrent onéreux dans certains cas, empêchant de restituer l’objet dans un bon état.
Symboles associés à la cloche
Par sa forte présence dans les traditions et les civilisations, la cloche est porteuse de significations historiques. Divers symboles y sont associés, différents d’une culture à l’autre. Parmi les plus connus figurent :
- le tintinnabule : clochette emblématique des basiliques catholiques ;
- les cloches de Pâques : dont le silence du jeudi, du vendredi et du samedi saint marque le deuil lié à la crucifixion du Christ ;
- le pouvoir des cloches (sauveterres) : relatif aux vertus apotropaïques dans la croyance des agriculteurs qui s’en servaient pour se protéger de la grêle, de la foudre et des orages ;
- le symbole de l’ouïe en Inde, dans les rituels bouddhistes tibétains, pour accéder à la connaissance et à l’interdépendance (Śūnyatā) ;
- le pouvoir d’exorcisme en Chine : pour se protéger des esprits malveillants ;
- la musique princière, en Chine également : pour symboliser l’harmonie universelle.
Il existe une multitude d’allégories qui y sont associées, et ce, dans les mêmes régions.
Sa fabrication
Chaque région possède ses propres processus de fabrication de cloches, mais quelques similarités ont pu être observées. À l’origine, la conception se limitait à un simple pliage et martelage des matériaux. Les instruments produits sont caractérisés par leur petite taille. Plus tard, les moines sainctiers ont développé une nouvelle technique qui a permis de proposer des modèles plus grands et plus lourds. Jusqu’au VIIIe siècle, ces fondeurs ont monopolisé le marché et ont participé à l’expansion de cet objet.
La composition
Traditionnellement, une cloche est composée d’un alliage d’airain, c’est-à-dire du bronze constitué de cuivre (78 %) et d’étain (22 %). Toutefois, d’autres compositions existent, comme celle fabriquée avec du laiton (un mélange de cuivre et de zinc).
Des fabricants en confectionnent avec :
- de la porcelaine, comme les carillons dans la région de Meissen ;
- de l’acier, comme la cloche de l’église Sainte-Madeleine à Tournus (1862) ;
- du bronze combiné avec de l’aluminium, comme la tentative du fondeur Georges Farnier (1919).
Les idées de composition se sont multipliées, avec des productions en verre, en terre cuite, en fer ou en cristal. En Inde, les clochettes rituelles contiennent même un alliage de huit métaux. Ces objets de culte sont fabriqués avec de l’ashtadhatu, un mélange d’or, d’argent, d’étain, de mercure, de plomb, de cuivre, de fer et de zinc.
La résistance à la frappe répétitive et la qualité musicale obtenue constituent les principaux critères pour le choix de la composition. Certains fondeurs accordent ainsi une importance capitale à la portée sonore et à la durée des vibrations. Ils travaillent leur production en fonction de ces paramètres.
Le processus de fabrication
La première étape consiste à concevoir un noyau, qui s’apparente à une cheminée, avec un feu de charbon de bois. Cet élément sert à définir les formes intérieure et extérieure, à l’aide d’un moulage appelé « fausse cloche » en argile et en poils de chèvre. Cette préfiguration reçoit les inscriptions à travers l’estampage des ornements. Le nom du bourdon ainsi que celui de son donateur et la date y sont alors inscrits.
La fausse cloche sert de moule pour former la chape. Celle-ci correspond à un genre de carapace conçue pour accueillir, via un canal en briques, l’alliage de métaux chauffé à 1 180 °C. Ce mélange se solidifie pendant environ 5 h. Une fosse spéciale est utilisée dans le cas d’une pièce pesant plus de 500 kg.
Le démoulage constitue l’étape suivante durant laquelle il faut casser le moule à l’aide de marteaux spécifiques. La cloche définitive retirée, les fondeurs procèdent au nettoyage, au polissage et à l’ajout des accessoires (suspension et battant, entre autres).