Expressivité du soufflet

Posé sur le genou en position assise ou debout (le genou sur un tabouret), le bandonéon tire son expressivité d’un soufflet maniable. Associé à la musique montée sur plaque, il révèle une subtilité remarquable dans les nuances.

Configuration typique : chromatisme sur 5 octaves

Le modèle uni-sonore, avec 40 boutons à la main droite et 33 à la main gauche, offre un jeu chromatique sur près de 5 octaves pour les deux mains. Au début du XX^e siècle, le choix entre le zinc et l’aluminium (sous brevet américain) marquait une distinction en Allemagne. Les musiciens professionnels privilégiaient souvent le zinc pour son poids plus lourd et sa sonorité « présente ». Les versions en alu, comme le duralumin, se caractérisent également par leur qualité de son.

Les origines et l’histoire du bandonéon

Le bandonéon est inspiré du concertina allemand conçu par le luthier Carl Friedrich Uhlig vers 1834. Cet instrument a été inventé pour répondre à une demande croissante d’élargissement de la tessiture et à la volonté de jouer dans toutes les tonalités.

Évolution des claviers

Le luthier allemand Heinrich Band, propriétaire d’un magasin d’instruments à Krefeld, a conçu en 1843 un nouveau système de claviers. En 1847, le facteur Friedrich Zimmermann à Carlsfeld a ensuite suivi le pas. Les termes « bandonion » puis « bandonéon » ont été adoptés en 1854, en hommage à Heinrich Band.

Dynastie des Arnold : épanouissement et héritage

Ernest Louis Arnold et Alfred Arnold travaillaient dans les ateliers de Zimmermann, puis ont repris l’affaire. Il s’agit de deux figures prééminentes dans l’histoire de cet instrument. Leur influence s’est étendue au cours des années, marquant une période prospère.

L’époque d’or du Tango

Initialement destiné au folklore d’Europe centrale, cet instrument a trouvé sa terre d’adoption en Argentine à la fin du XIX^e siècle. Le bandonéon y est ainsi devenu une figure emblématique du tango. La période d’entre-deux-guerres a été le sommet de la production, avec des modèles exportés en masse vers l’Argentine.

L’éclat en France : tango et bals populaires

La France, sous l’emprise du tango dès les années 1920, a vu cet instrument devenir un complément dans les bals populaires. Les accordéonistes chromatiques, en collaboration avec Alfred Arnold, ont apporté des modifications significatives à son plan de clavier.

Le bandonéon dans la culture

Le bandonéon, doté d’un vaste répertoire, transcende les frontières musicales. De la musique religieuse à la musique classique, du folklore allemand et nord-européen jusqu’aux régions du bassin du Rio de la Plata, l’instrument apporte sa sonorité si singulière. Il se retrouve même aux sommets des plateaux andins avec le chamamé, qui est une musique traditionnelle argentine.

Cet instrument trouve sa place dans l’interprétation de danses, de musiques et de chansons populaires françaises (bal musette). Sa présence se remarque aussi dans des traditions mondiales telles que les Balkans, entre autres. Il a également été utilisé dans le jazz, et s’illustre dans des œuvres contemporaines.

Le tango : l’essence du bandonéon

Malgré la diversité de son répertoire, le bandonéon conserve une position privilégiée dans le tango. Il a séduit d’éminents compositeurs, entre autres : Francisco Canaro, Enrique Santos Disceplo, Anibal Troilo et Ástor Piazzolla. D’autres contemporains tels que Ruben Juarez, Daniel Binelli, Dino Saluzzi, César Stroscio, Juan Jose Mosalini, et bien d’autres l’ont également adopté.

Sa sonorité profonde pour les émotions humaines

Le son profond du bandonéon se prête à la célébration des éléments les plus intrinsèques et sincères de l’Homme. La vie, la mort et l’amour envers les proches prennent une dimension artistique lorsqu’ils sont mis en musique par l’instrument.

Son usage dans les cérémonies funéraires

Servant d’alternative à l’orgue lors d’enterrements religieux, l’instrument trouve une place singulière lors d’obsèques. Son usage convient de même à des funérailles civiles, amplifiant la dimension émotionnelle de ces moments solennels.

Le fonctionnement du bandonéon

Le fonctionnement d’un bandonéon présente une certaine complexité. Des lames en bois ou en métal agissent comme des filtres pour réguler le flux d’air, réagissant aux mouvements du bandonéoniste. À l’aide des claviers, le musicien opère l’ouverture et la fermeture de ces lames, façonnant ainsi une palette sonore variée.

Fabrication : comment c’est fait ?

Cet instrument est composé d’un certain nombre d’éléments.

Les plaques et les lames

La composante musicale du bandonéon repose sur des plaques collectives (en zinc ou en duralumin) sur lesquelles sont rivetées des lames d’acier. Ces dernières, appelées « anches libres », vibrent avec l’air, et produisent des sons distincts en fonction de leur taille. Les plaques, quant à elles, sont fixées aux sommiers de la mécanique, donnant naissance à deux voix simultanées.

La mécanique

Le bloc mécanique des claviers est constitué de boutons collés sur des leviers. Ces derniers actionnent des clapets, et permettent le passage de l’air dans les sommiers lors des mouvements de « tirer » ou de « pousser ». Cette mécanique en bois utilise des articulations en laiton et en acier.

Comment en jouer ?

Il existe différentes approches pour jouer du bandonéon, souvent héritées des techniques locales. Deux méthodes sont les plus utilisées, en particulier dans le tango argentin.

Manipulation

Produire un son avec cet instrument requiert les manipulations suivantes : appuyer sur un ou plusieurs boutons et exercer une compression de l’air dans le soufflet, en tirant ou en poussant. Les deux mains sont enveloppées de courroies en cuir, laissant les pouces à l’extérieur. Le pouce de la main droite est utilisé pour actionner la clef d’air. Les boutons sont appuyés avec la pointe des doigts tout en maintenant la main légèrement creuse.

Technique assise

En jouant assis, l’instrument repose à plat sur les genoux. Il est laissé tomber de chaque côté des genoux, exploitant la force gravitationnelle pour faciliter l’émission du son. En poussant, le soufflet est coincé entre les cuisses, puis l’usage de son poids est utilisé pour le ramener. Cette technique offre un contrôle total sur les sons émis.

Technique debout

La technique debout a été rendue célèbre par Ástor Piazzolla lors de ses concerts. Cette méthode implique que le musicien se tienne debout avec un pied posé sur une caisse, un tabouret ou une chaise d’environ 60 cm de hauteur. La jambe forme ainsi une équerre. Le bandonéon repose sur le genou de cette jambe et tombe de chaque côté. Cette technique produit un son plus dense et plus fort en tirant. Cependant, elle présente des défis supplémentaires en termes de contrôle sonore, de jeu à deux mains (en solo) et de jeu en poussant.

Il est important de noter que la technique instrumentale du bandonéon a évolué tout au long du XX^e siècle, en grande partie grâce aux contributions des bandonéonistes argentins.

Qu’en est-il de sa notation musicale ?

La tessiture étendue de l’instrument s’étale du clavier gauche au clavier droit. Bien que les deux claviers partagent une partie commune en termes de hauteur de note, le timbre de chacun diffère. À l’instar du piano, la main gauche est écrite en clé de fa, tandis que la main droite utilise la clé de sol. Dans la notation musicale, les changements de clés sont rares, ce qui conduit fréquemment à l’utilisation de lignes supplémentaires.

Le réglage et l’entretien du bandonéon

Le réglage ou l’accordage du bandonéon peut paraître complexe, et requiert l’expertise d’un professionnel. Pour l’entretien, voici quelques conseils pratiques pour préserver sa qualité.

Positionnement optimal

Toujours disposer l’instrument sur ses pieds, avec la caisse de la main gauche en contact avec le sol. Un placement à l’envers pourrait entraîner des déformations des plaques, impactant les vibrations et le son.

Vérification régulière par un professionnel

Il est conseillé de faire vérifier régulièrement l’instrument en fonction de sa fréquence d’utilisation. En outre, l’accordage peut changer avec le temps, et les réglages nécessitent des ajustements périodiques.

Une éventuelle remise en état peut entraîner des coûts significatifs, surtout s’il a été exposé à des conditions ambiantes défavorables. Les répercussions peuvent être conséquentes.

Position correcte pendant le jeu

Maintenir une bonne position lors du jeu, en particulier en utilisant une technique assise est cruciale. Une posture inadéquate peut contribuer à détériorer le dessous du soufflet, parfois nécessitant un remplacement coûteux.

Utilisation prudente des boutons

Ramener l’instrument en appuyant sur les boutons des basses et accords est fortement déconseillé. L’utilisation du bouton prévu à cet effet pour éviter tout dommage est nécessaire.

L’apprentissage du bandonéon

L’apprentissage du bandonéon est possible à travers diverses méthodes, permettant aux passionnés de maîtriser cet instrument à leur propre rythme.

Cours en ligne

Les cours en ligne constituent une ressource précieuse pour les apprentis bandonéonistes. De nombreuses plateformes proposent des cours structurés, offrant la flexibilité d’apprendre à tout moment et de n’importe où. Ces programmes en ligne permettent une progression adaptée aux besoins individuels, facilitant ainsi l’assimilation des techniques et des répertoires spécifiques à l’instrument.

Conservatoire de musique

Certains conservatoires de musique intègrent le bandonéon dans leur programme d’enseignement. Ces institutions offrent une approche plus traditionnelle, mettant l’accent sur la rigueur académique et la formation complète. Les élèves bénéficient d’une immersion dans un environnement structuré, favorisant une compréhension académique musicale solide.

Cours particuliers avec un professionnel

Faire appel à un professionnel pour des cours particuliers offre une expérience d’apprentissage hautement personnalisée. Ce type d’enseignement donne l’occasion à l’élève de recevoir des conseils spécifiques et des corrections immédiates, accélérant ainsi le processus. L’évolution en temps réel par l’instructeur permet également une adaptation du programme en fonction des compétences, de la progression et des objectifs de l’apprenant.

En somme, le bandonéon propose une variété d’options pour apprendre, chacune avec ses avantages caractéristiques. Les aspirants musiciens peuvent ainsi choisir la méthode qui correspond le mieux à leurs préférences et à leurs objectifs.

L’achat et le choix d’un bandonéon

Pour les amateurs, trouver un modèle neuf s’avère être un véritable défi de nos jours. L’instrument, bien que riche en histoire, a largement perdu sa popularité, entraînant un quasi-arrêt de la production de modèles neufs en Europe. Cette rareté contraint les aspirants musiciens à se tourner vers des modèles anciens et d’occasion pour satisfaire leur passion. En Argentine, par exemple, où cet instrument est profondément enraciné dans la culture musicale, il n’en restait que 2 000 en circulation en 2011. Un plan de sauvetage a ainsi été mis en place dans ce pays.

L’achat d’occasion : prudence durant le choix

Bien que les bandonéons d’occasion soient plus accessibles, il est crucial de faire preuve de prudence. Avant tout achat, un examen minutieux est nécessaire pour évaluer l’état général et pour identifier les éventuelles pièces nécessitant un remplacement. Il est souvent inévitable de changer certaines pièces, mais cela peut altérer le son d’origine de l’instrument.

Des prix variables

Les prix des modèles d’occasion peuvent varier considérablement. Un instrument vendu à un tarif trop bas peut présenter des problèmes irréparables, ne convenant qu’aux collectionneurs. À l’inverse, certains bandonéons peuvent atteindre des milliers d’euros, offrant un son authentique et constituant une véritable pièce d’histoire musicale.